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Carl Maria von Weber

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Celui qui a respiré le parfum sylvestre du Freischütz, qui a pénétré dans le monde féerique d'Obéron et s'est aventuré dans l'intimité des sonates ne peut, me semble-t-il, se refuser à l'extraordinaire attrait de l'art de Weber. Il s'en éprend, au contraire, et fait dans son cOeur une place à part à ce musicien dont la figure élégante et racée occupe au seuil du Romantisme une situation qui n'a pas de pareille. Entre Beethoven et Schubert, Weber, en effet, personnifie une nuance de la sensibilité, une forme de l'expression musicale qui ne se retrouvent ni chez le héros de la Symphonie avec chOeurs, ni chez le tendre poète de la belle Meunière. Il ne s'est pas, comme le premier, formé dans le voisinage des purs symphonistes et n'a d'autre part, pas connu cette atmosphère propre au développement d'un lyrisme intime ou familier que procura au second une vie végétative éclairée de plaisirs modestes. D'un père extravagant ­ ancien militaire tout entiché de théâtre et de musique et, de surcroît, quelque peu barbe-bleue ­ Weber reçut une éducation dangereusement tendue vers ce but : faire de l'enfant un second Mozart. Il était né chétif, presque infirme, le 18 décembre 1786 à Eutin (Holstein) et grandit dans les coulisses des théâtres allemands où la fantaisie paternelle se donnait momentanément carrière. Et, de fait, c'est entre fosse et plateau que devait s'écouler presque tout entière sa trop brève existence.

« Carl Maria von Weber Celui qui a respiré le parfum sylvestre du Freischütz, qui a pénétré dans le monde féerique d'Obéron et s'est aventuré dans l'intimité des sonates ne peut, me semble-t-il, se refuser à l'extraordinaire attrait de l'art de Weber.

Il s'en éprend, au contraire, et fait dans son cOeur une place à part à ce musicien dont la figure élégante et racée occupe au seuil du Romantisme une situation qui n'a pas de pareille. Entre Beethoven et Schubert, Weber, en effet, personnifie une nuance de la sensibilité, une forme de l'expression musicale qui n e s e retrouvent ni chez le héros d e la Symphonie avec chOeurs, ni chez le tendre poète d e la belle Meunière.

Il ne s'est pas, comme le premier, formé dans le voisinage des purs symphonistes et n'a d'autre part, pas connu cette atmosphère propre au développement d'un lyrisme intime ou familier que procura au second une vie végétative éclairée de plaisirs modestes. D'un père extravagant ancien militaire tout entiché de théâtre et de musique et, de surcroît, quelque peu barbe-bleue Weber reçut une éducation dangereusement tendue vers ce but : faire de l'enfant un second Mozart.

Il était né chétif, presque infirme, le 18 décembre 1786 à Eutin (Holstein) et grandit dans les coulisses des théâtres allemands où la fantaisie paternelle se donnait momentanément carrière.

Et, de fait, c'est entre fosse et plateau que devait s'écouler presque tout entière sa trop brève existence. Par sa précoce connaissance des mystères de la scène autant que par la mobilité de son tempérament, Weber est donc homme d e théâtre, et la réalisation d'un opéra conforme à la nature de son génie est au centre de son effort créateur qui est comme irradié par l'esprit de la musique dramatique.

A l'âge de douze ans déjà, il s'essaye à écrire une scène bouffonne, le Pouvoir de l'amour et du vin. Cette partition et d'autres qui suivirent n'ont guère de succès.

Talonné par un père ambitieux, Weber, en effet, jusque vers 1803, perd un temps précieux à produire au lieu d'apprendre.

Le meilleur de ce que pouvaient contenir ces pages, nous le trouverons repris dans des ouvrages ultérieurs.

Dans Sylvana s'ébauche la poésie allemande du Freischütz tandis qu'Abou-Hassan trahit un goût de l'orientalisme dont devaient témoigner de manière plus apparente la musique pour Turandot et la turquerie de maints passages d'Obéron. L'année 1816 marque dans la vie d e Weber un tournant décisif.

Il a trente ans à peine et vient d e se fiancer avec la jolie cantatrice Carolina Brand, lorsque Dresde l'appelle pour assumer la direction d'un opéra allemand destiné à faire concurrence au théâtre italien de Morlacchi.

Le musicien, qui, jusque-là s'était surtout fait apprécier par ses compositions instrumentales et ses talents de virtuose et de chef d'orchestre, se trouve, grâce à s e s nouvelles fonctions, devant une occasion inespérée d e faire valoir les réformes qu'il rêvait d'introduire dans le domaine de la musique dramatique. Donner à cette Allemagne que ses chants avaient conduite au combat lors des campagnes libératrices de 1813 à 1814 un drame qui convienne à son génie profond, opposer à la brillante machine rossinienne une composition fondée sur la légende et inspirée d e ce romantisme qui autour de lui commençait à pénétrer la musique et les lettres d'un extraordinaire renouveau, tel fut, en gros, le rêve de Weber.

En 1821, le Freischütz éclate comme un manifeste.

L'inoffensif singspiel se pare d'une noblesse et d'une grandeur d'accent absolument nouvelles.

C'est un coup de maître que confirme un succès prolongé.

Cependant, la critique ne laissa pas de le faire observer, le Freischütz, par son caractère populaire et ses dimensions, ne peut prétendre à faire figure d'Oeuvre de grand style.

Euryanthe mise à la scène en 1823 eût dû constituer une réponse à cette objection.

La faiblesse du livret entraînant dans sa chute une partition trop riche de musique fit que cette réponse n'apparut pas probante.

Euryanthe reste un magnifique cortège de musique, le plus beau peut-être qu'ait créé Weber.

Il lui manque toutefois le soutien d'une action assez ferme pour constituer un spectacle. La composition d'Euryanthe et l'intense activité déployée par Weber à la direction des théâtres d e Dresde avaient considérablement éprouvé sa fragile santé.

Le musicien, qui avait mené jusqu'à son mariage une existence assez dissipée, était devenu un être mûri par bien des épreuves et qui sentait avec angoisse ses forces l'abandonner.

Il lui fallut le souci qu'il avait de l'avenir des siens pour l'arracher à une inaction de quatorze mois et répondre à la commande d'un opéra que lui faisait le directeur de Covent-Garden à Londres. Obéron fut le cadeau princier qu'apportait Weber aux Anglais en franchissant la Manche au mois de mars 1826.

En cours de route, il s'était arrêté à Paris où il avait tenu à rendre visite à Paër, Cherubini et Auber, car cet h o m m e qui détestait Napoléon adorait la musique française et se délectait de Méhul et de Monsigny.

Londres fit à Weber un accueil triomphal et lui, qui avait eu tant de luttes à soutenir dans sa propre patrie, eut la joie de voir sa dernière Oeuvre mise en scène avec un luxe de décoration qui l'émerveilla.

C'est sur cette vision heureuse que Weber, à la veille de se rembarquer pour le continent, ferma les yeux pour ne plus les rouvrir.

Ses amis le trouvèrent mort dans son lit au matin du 5 juin 1826. On affecte aujourd'hui de dédaigner l'Oeuvre instrumentale de Weber.

On a bien tort car non seulement elle est à la source de tout un courant du romantisme musical, mais elle constitue en outre un portrait de l'artiste tel qu'on n'en saurait imaginer de plus fidèle.

Les témoignages de ceux qui ont connu Weber nous le dépeignent spirituel, charmeur, plaisant aux femmes et de caractère assez inconstant. Ses manières aristocratiques, son goût de la recherche vestimentaire, en un mot, un certain dandysme faisaient de lui l'hôte apprécié des sociétés les plus huppées. Cette prestance, nous en retrouvons la marque particulière en plus d'une page d e la musique d e piano d e Weber où l'imprévu d e l'accentuation et je ne sais quoi d'effervescent dans le trait déterminent une impression d'élégance nerveuse et racée.

On la dirait faite, cette musique, par un homme qui n'avait point à redouter de paraître vulgaire en se montrant brillant.

Et, en effet, elle donne toujours aux formes les plus extérieures leur caractère le plus élevé, à la polonaise un style chevaleresque, à la valse une grâce suprême. Dans les proportions de la sonate, Weber a introduit une conception "romancée" de la forme dont on a pu critiquer le manque de rigueur, mais qui ouvre de larges perspectives aux élans d'une imagination éprise de contrastes dramatiques et de belles mélodies. Un poète que la muse romantique avait déjà touché d e son baiser fatal y exhale sa mélancolie avec une mesure où se reconnaît l'héritage de l'ancien régime. "Le plus allemand des musiciens", a dit de lui Wagner.

Le plus européen des Allemands, dirais-je plutôt, et peut-être bien le dernier à avoir reçu au seuil de la forêt germanique un rayon de cette lumière d'universalité dans laquelle baigne tout entière l'Oeuvre d'un Mozart.. »

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