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Bergson et l'intelligence

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"L'intelligence humaine se sent chez elle tant qu'on la laisse parmi les objets inertes, plus spécialement parmi les solides, où notre action trouve son point d'appui et notre industrie ses instruments de travail, [...] Nos concepts ont été formés à l'image des solides, [...] ; notre logique est surtout la logique des solides [...] ; par là même, notre intelligence triomphe dans la géométrie, où se révèle la parenté de la pensée logique avec la matière inerte, et où l'intelligence n'a qu'à suivre son mouvement naturel, après le plus léger contact possible avec l'expérience, pour aller de découverte en découverte avec la certitude que l'expérience marche derrière elle et lui donnera invariablement raison. Mais de là devrait résulter aussi que notre pensée, sous sa forme purement logique, est incapable de se représenter la vraie nature de la vie, la signification profonde du mouvement évolutif. Créée par la vie, dans des circonstances déterminées, pour agir sur des choses déterminées, comment embrasserait-elle la vie, dont elle n'est qu'une émanation ou qu'un aspect? Déposée, en cours de route, par le mouvement évolutif, comment s'appliquerait-elle le long du mouvement évolutif lui-même? Autant vaudrait prétendre que la partie égale le tout, que l'effet peut résorber en lui sa cause, ou que le galet laissé sur la plage dessine la forme de la vague qui l'apporta. De fait, nous sentons bien qu'aucune des catégories de notre pensée, unité, multiplicité, causalité mécanique, finalité intelligente, etc... ne s'applique exactement aux choses de la vie : qui dira où commence et où finit l'individualité, si l'être vivant est un ou plusieurs, si ce sont les cellules qui s'associent en organisme ou si c'est l'organisme qui se dissocie en cellules? En vain nous poussons le vivant dans tel ou tel de nos cadres. Tous les cadres craquent." BERGSON

Bergson est le philosophe de l'intuition et de l'intelligence. Reprenant les analyses de Schopenhauer sur l'intelligence, il ne voit en celle-ci qu'une faculté pratique, destinée à permettre à l'homme de s'adapter à son environnement et à exploiter celui-ci. Il consacre ainsi dans L'évolution créatrice de longues études sur l'intelligence, qui est un élan vers la matière et qu'il oppose à l'instinct. Ce dernier est en effet programmé, fixé une fois pour toute, alors que l'intelligence permet au comportement de l'homme de changer en fonction des situations. Dans ce passage, le philosophe oppose l'intelligence et la vie. Selon lui, l'intelligence humaine ne peut comprendre le mouvement évolutif de la vie. Pourquoi ? Quelles caractéristiques de l'intelligence sont en cause dans cette incompréhension ?

« "L'intelligence humaine se sent chez elle tant qu'on la laisse parmi les objets inertes, plus spécialement parmi les solides, où notre action trouve son point d'appui et notre industrie ses instruments de travail, [...] Nos concepts ont été formés à l'image des solides, [...] ; notre logique est surtout la logique des solides [...] ; par là même, notre intelligence triomphe dans la géométrie, où se révèle la parenté de la pensée logique avec la matière inerte, et où l'intelligence n'a qu'à suivre son mouvement naturel, après le plus léger contact possible avec l'expérience, pour aller de découverte en découverte avec la certitude que l'expérience marche derrière elle et lui donnera invariablement raison. Mais de là devrait résulter aussi que notre pensée, sous sa forme purement logique, est incapable de se représenter la vraie nature de la vie, la signification profonde du mouvement évolutif.

Créée par la vie, dans des circonstances déterminées, pour agir sur des choses déterminées, comment embrasserait-elle la vie, dont elle n'est qu'une émanation ou qu'un aspect? Déposée, en cours de route, par le mouvement évolutif, comment s'appliquerait-elle le long du mouvement évolutif lui-même? Autant vaudrait prétendre que la partie égale le tout, que l'effet peut résorber en lui sa cause, ou que le galet laissé sur la plage dessine la forme de la vague qui l'apporta.

De fait, nous sentons bien qu'aucune des catégories de notre pensée, unité, multiplicité, causalité mécanique, finalité intelligente, etc...

ne s'applique exactement aux choses de la vie : qui dira où commence et où finit l'individualité, si l'être vivant est un ou plusieurs, si ce sont les cellules qui s'associent en organisme ou si c'est l'organisme qui se dissocie en cellules? En vain nous poussons le vivant dans tel ou tel de nos cadres.

Tous les cadres craquent." Bergson est le philosophe de l'intuition et de l'intelligence.

Reprenant les analyses de Schopenhauer sur l'intelligence, il ne voit en celle-ci qu'une faculté pratique, destinée à permettre à l'homme de s'adapter à son environnement et à exploiter celui-ci.

Il consacre ainsi dans L'évolution créatrice de longues études sur l'intelligence, qui est un élan vers la matière et qu'il oppose à l'instinct.

Ce dernier est en effet programmé, fixé une fois pour toute, alors que l'intelligence permet au comportement de l'homme de changer en fonction des situations.

Dans ce passage, le philosophe oppose l'intelligence et la vie.

Selon lui, l'intelligence humaine ne peut comprendre le mouvement évolutif de la vie.

Pourquoi ? Quelles caractéristiques de l'intelligence sont en cause dans cette incompréhension ? L'intelligence a pour fonction d'appréhender l'inerte et le divisible pour permettre à l'homme de survivre - Pour Bergson, l'intelligence est le propre de l'homme, ce qui le distingue des autres espèces vivantes dont l'adaptation à la nature et à l'environnement est assurée par d'autres moyens.

L'animal dispose en effet d'instincts qui fixent ses réactions et ses comportements en des actions complètes et assurées, les plantes, elles, sont équipées de dispositifs nécessaires à leur survie.

L'action humaine, elle, n'est déterminée par nature, ni dans ses fins ni dans ses moyens.

Il doit donc résoudre les problèmes liés à la satisfaction de ses besoins par son propre effort et par la mise en action de son intelligence. - C'est d'ailleurs la fonction originaire de l'intelligence pour le philosophe.

Il reprend en quelque sorte ici, le mythe platonicien de Prométhée, l'intelligence est offert par Prométhée à l'humanité pour compenser son manque d'instinct, de griffes, d'organes utiles à sa survie. À la définition classique de l'homme comme homo sapiens, Bergson substitue celle d'homo faber.

Cela ne signifie nullement que l'intelligence ne nous définirait pas mais elle est fondamentalement une faculté active, qui vise d'abord la fabrication d'outils, c'est-à-dire à assurer la survie de l'homme dans un milieu hostile.

L'intelligence, puisqu'elle dépend de la faculté d'agir, n'est en fait jamais désintéressée.

Elle excelle à nous fournir des règles d'action, elle est utilitaire et pragmatique.

Mais puisque l'intelligence a pour fonction d'aider l'homme à maîtriser le monde extérieur, ses caractéristiques sont déterminées par cette fonction et limitée. - L'intelligence est, en ce sens, directement tournée vers la matière considérée en tant que pur substrat passif de l'activité et elle prend pour modèle la matière, en adopte les caractéristiques pour pouvoir agir sur elle.

L'intelligence fige le réel, elle mesure et procède à des délimitations dans l'espace et dans la durée.

l'intelligence travaille à découper, distinguer, c'est pourquoi sa forme propre est pat excellence l'analyse.

Elle a en effet, besoin pour agir de points, de repères fixes.

Les objets matériels sur lesquels l'intellect trouve s'exercer sont ainsi par nature dépendant de l'action.

Ils sont posés comme stables, car l'action doit bien s'appuyer "sur du solide".

Bergson définit l'intelligence comme conception des rapports dans l'espace, comme tout d'abord rapport entre une situation donnée et les moyens pour s'y adapter.

La géométrie se veut justement la science des mathématiques qui formalise l'espace et étudie les figures dans cet espace.

C'est pour cela que Bergson parle d'un léger contact avec l'expérience.

Une fois pris en compte les données matérielles, l'intelligence comme dans la géométrie peut raisonner seule, à partir des lois et des rapports.

Les concepts sont comparés au solide parce qu'ils opèrent aussi une découpe dans le réel selon les besoins de l'intelligence et de l'homme. L'intelligence n'est qu'une partie de la vie, elle a été crée par elle et ne peut comprendre l'évolution - Bergson explique ensuite comment est apparue l'intelligence.

Elle est en effet une création de la vie, de l'élan vital. Diverses tendances présentes au sein de l'élan vital font qu'il se sépare à plusieurs reprises, d'abord entre végétaux et animaux, puis entre deux tendances dont l'une aboutit à une forme d'instinct parfaitement efficace, chez les insectes comme les fourmis, où le mouvement de l'élan vital est non pas arrêté mais comme annulé, dans une sorte. »

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