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apprendre est ce seulement s'informer ?

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« La question "apprendre, est-ce seulement s'informer ?" apparaît d'abord comme une interrogation portant sur la complexité et les ambiguïtés des notions d'apprentissage et d'information.

Le problème est de savoir si l'accumulation d'informations e s t u n e c ondition nécessaire et suffis ante pour apprendre quelque c hose.

Il faut alors distinguer un apprentissage dynamique et fertile d'un apprentissage stérile et passif.

T oute information "n'informe", "ne peut donner vraiment forme à quelque chose" que lorsque celui qui s'informe participe activement à c e qu'il apprend.

Dans le roman Bouvard et P é c uchet, Flaubert raconte l'histoire de deux hommes persuadés que le savoir est dans les livres.

Ils apprennent grâce aux bibliothèques, et parlent de ce qu'ils ne savent finalement pas.

Le problème tourne autour de la différence entre apprendre et s 'informer au sens ou il s 'agit, avec "apprendre", de "c omprendre".

O n peut par exemple comparer deux expressions : "j'ai appris à nager" et "j'ai appris la nouvelle ce matin".

Dans le deuxième cas , apprendre une nouvelle, c'est s'informer.

Dans le premier c as, c'est plus complexe.

Si, par exemple, la personne qui parle a appris par des cours théoriques ("nager, c'est faire tels et tels mouvements "), elle a reçu une information, mais elle ne sait pas pour autant nager.

A pprendre, c 'est donc aussi pouvoir faire quelque c hose de ce qu'on apprend.

Et peut-être e s t - c e là l'un des s e n s de "comprendre", pouvoir produire un résultat.

Kant disait qu'il y a deux manières d'acquérir une connaissance.

La première est "une manière historique", la pers onne apprend quelque chos e comme un fait.

La deuxième manière est une "manière rationnelle", que l'on peut reproduire.

D ans le Ménon, Platon distinguait ainsi l'opinion droite, qui est une vérité ne sachant pas pourquoi elle est vraie, de la "science", qui connaît les raisons de ce qu'elle sait.

De plus, l'information est hétéroclite, elle ne nous dit pas ce qui est important ou non.

P ar exemple, quand on lit le journal, on a aussi bien les résultats du tiercé que les changements dans la C ons titution, et il faut soit que l'on sache par soi-même déjà ce qui est important, s oit que l'on fasse confiance au journal pour déc ider, selon la place qu'il accorde à chaque élément, ce qui est important et ce qui l'est moins .

A pprendre, c'est toujours exercer une action s ur des informations . Réflexion sommaire sur les implications de la question. P eut-on réduire le fait d'apprendre au fait de s'informer? La question posée invite à réfléc hir s ur les limites éventuelles de l'information.

A u sens strict, celle-ci est transmission neutre de renseignements sur un événement déterminé, ou un domaine particulier.

P ar exemple, s'informer sur un c onflit armé, c'est recueillir toutes les indications possibles sur le déroulement de c e conflit, sur les faits marquants qui le caractérisent.

Les obs ervations transmises permettent-elles à elles seules de comprendre réellement c e qui arrive ? Rien n'est moins s ûr.

Une c o n n a i s s a n c e d e s c auses, de l'histoire proche et lointaine, est requise pour qu'une véritable intelligibilité de l'événement soit obtenue.

Si je ne pense authentiquement apprendre qu'en comprenant, la seule information res te insuffis ante.

Éclatée, descriptive, à la surface des choses, elle ne peut faire s ens.

Reconstruite, interprétée, elle dépend du point de vue particulier du journaliste - sauf si celui-ci fait effort pour présenter des connaissances qui permettent d'éclairer l'événement qu'il raconte.

M ais dans cette hypothèse, il sort de son rôle strict, pour instruire.

O n ne peut plus dire alors qu'il se contente d'informer. Approche de l'enjeu de la question. Le rôle propre de l'École est d'instruire, ou plutôt de faire en sorte que les élèves (ceux qui s 'élèvent) s'ins truis ent : la forme pronominale indique avec force l'activité d'un sujet qui, tout en apprenant, développe sa c apacité de réflexion et, finalement, n'apprend véritablement que ce qu'il comprend, c'est-à-dire ce qu'il fait s ien par l'exercice personnel de son jugement.

Une telle démarc he est donc irréductible à la simple mémorisation d'informations ou de s avoirs dont ne seraient compris ni les principes ni les enjeux.

C eux qui, de plus en plus nombreux aujourd'hui, affirment que l'École n'a plus le monopole de la «transmission des connaissances» n'ont raison qu'en apparence, car ils confondent en fait information et connaissance, et oublient que connaître, c e n'est pas s eulement engranger d e s informations.

M alentendu tout à fait contestable, qui c o n s i s t e à penser le rôle de l ' É c o l e s u r le modèle de la simple trans mission journalistique d'informations, pour ensuite affirmer que l'École...

n'est pas le seul lien de cette transmission ! La critique d'un tel contresens devra montrer au contraire que l'École ne transmet pas, à strictement parler, des informations (car elle instruit, ce qui n'est pas la même chos e).

Son rôle est autre, et unique, dès lors qu'elle vise à développer l'autonomie du jugement.

Il sera donc tout à fait utile de réfléchir précisément s ur la différenc e entre le fait d'apprendre, et celui de s'informer.

Q uitte d'ailleurs à précis er l'éventuelle articulation des deux démarches, après avoir s ouligné que s 'informer ce n'est pas seulement «recevoir» des informations, mais les chercher soi-même.

U ne telle recherche, remontant aux causes lointaines et s ouvent oubliées, ou passées sous silence, des événements, permet de relativiser le commentaire simplement journalistique, trop souvent soucieux de spectaculaire.

Elle délivre donc, par l'accès à l'histoire profonde, des fas cinations de l'immédiat et des préjugés du moment. INTRODUCTION Dans la société contemporaine, l'information oc cupe une place majeure (rôle des différents médias, fascination du public pour l'image télévisuelle...).

M ais est-elle s uffisante pour cons tituer un s avoir progress if et fournir à qui la consomme un apprentissage authentique ? Si l'on examine ce qu'exige le fait d'« apprendre », ses conditions s ont-elles remplies dès le simple fait de s'informer ? I.

LIMITES DE L'INFORMATION — A u sens général, l'information implique: • un rapport au quotidien: elle est dès lors périssable et peu cumulative; • une tendance (récente, mais de plus en plus prononcée) au spectaculaire: elle se condamne par là à rester superficielle; • une tendance à la multiplication.

P roblème : comment mémoriser (ou faire un choix dans) la totalité des informations? — «A pprendre» a plusieurs sens, entre autres: • un sens événementiel (j'ai appris le mariage de mon cousin); • un sens relatif à l'exercice de la mémoire (apprendre par coeur); • un sens désignant des exercices pratiques ou intellectuels exigeant de la durée (apprendre un métier manuel ou une langue étrangère); • un sens propre à la «didactique»: apprendre une méthode, apprendre à apprendre. — D è s ce, premier repérage, il apparaît que s'informer ne peut correspondre à ces différents niveaux — mais seulement au premier, et partiellement au second. II.

ÉVÉNEMENTS ET STRUCTURATION — L'information es t événementielle (du moins au quotidien).

Elle couvre des domaines hétérogènes (politique, culture, sports, vulgarisation, etc.) qui peuvent, pour un individu, se présenter comme concurrents ou incompatibles. — L'accumulation des informations ne se structure (dans un domaine choisi) que si le s ujet a d'abord appris à les structurer. — T out traitement des informations suppose ains i que le mode de traitement ait été antérieurement ac quis , indépendamment des informations elles-mêmes. — Si l'événement que rapporte l'information est éphémère, s'informer n'engage pas, ou très peu, la mémoire, 'à l'inverse de l'apprentissage. III.

APPRENDRE, S'INFORMER: POURQUOI ? — C e qui résulte de l'apprentiss age est un savoir (pratique, technique, théorique), c'es t-à-dire un acquis durable (même s ' i l n é c e s s i t e un entretien périodique), susceptible de conférer un pouvoir, ou du moins une efficacité. — L'accumulation des informations ne constitue pas un savoir authentique — tout au plus un s t o c k d'exemples ou d'arguments pour alimenter une discussion ou briller dans «le dernier s alon où l'on cause». — C f.

l'opposition classique, déjà soulignée par M ontaigne, entre la tête bien faite» (capable de maîtriser et d'organiser son savoir) et la «tête bien pleine» (bourrée d'informations). — Si l'on préfère, cf.

Hegel : la lec ture des journaux du matin est le bénédic ité du philosophe — mais c'est précisément parce que ce dernier est capable, grâce au sens qu'il a appris à repérer, de saisir la signification de l'information et de n'en retenir que c e qui compte (ou comptera). CONCLUSION S'informer, c'es t recevoir les échos du monde ou d'un de ses aspec ts.

C ela peut favoriser la passivité de l'esprit, son simple gavage insignifiant.

A pprendre implique toujours un choix, une décision et un travail actif.. »

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