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ALAIN: Penser et Croire

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Penser n'est pas croire. Peu de gens comprennent cela. Presque tous, et ceux-là même qui semblent débarrassés de toute religion, cherchent dans les sciences quelque chose qu'ils puissent croire. Ils s'accrochent aux idées avec une espèce de fureur ; et, si quelqu'un veut les leur enlever, ils sont prêts à mordre. [...] Lorsque l'on croit, l'estomac s'en mêle et tout le corps est raidi ; le croyant est comme le lierre sur l'arbre. Penser, c'est tout à fait autre chose. On pourrait dire : penser, c'est inventer sans croire. Imaginez un noble physicien, qui a observé longtemps les corps gazeux, les a chauffés, refroidis, comprimés, raréfiés. Il en vient à concevoir que les gaz sont faits de milliers de projectiles très petits qui sont lancés vivement dans toutes les directions et viennent bombarder les parois du récipient. Là-dessus le voilà qui définit, qui calcule ; le voilà qui démonte et remonte son « gaz parfait », comme un horloger ferait pour une montre. Eh bien, je ne crois pas du tout que cet homme ressemble à un chasseur qui guette une proie. Je le vois souriant, et jouant avec sa théorie, je le vois travaillant sans fièvre et recevant les objections comme des amies ; tout prêt à changer ses définitions si l'expérience ne les vérifie pas, et cela très simplement, sans gestes de mélodrame. Si vous lui demandez : « Croyez-vous que les gaz soient ainsi ? » il répondra : « Je ne crois pas qu'ils soient ainsi, je pense qu'ils sont ainsi. ALAIN.
La croyance a toujours été un problème philosophique. Elle a souvent été considéré négativement comme adhésion naïve. Pourtant, certains philosophes ont tenté de la réhabiliter soit comme ciment collectif tel Schelling soit comme moteur de l’action tel Nietzsche ou Edgar Morin. Pourtant Alain reprend ici une critique de la croyance et essaie de montrer qu’elle n’a rien de rationnel. Le philosophe tend à marquer une distinction entre le fait de croire et celui de penser, comme choses dont la nature est totalement différente. La croyance n’est-elle que sentiment ? Quel danger comporte-t-elle ? Qu’est-ce qui la distingue de l’acte de penser ?

« Penser n'est pas croire.

Peu de gens comprennent cela.

Presque tous, et ceux-là même qui semblent débarrassés de toute religion, cherchent dans les sciences quelque chose qu'ils puissent croire.

Ils s'accrochent aux idées avec une espèce de fureur ; et, si quelqu'un veut les leur enlever, ils sont prêts à mordre.

[...] Lorsque l'on croit, l'estomac s'en mêle et tout le corps est raidi ; le croyant est comme le lierre sur l'arbre.

Penser, c'est tout à fait autre chose.

On pourrait dire : penser, c'est inventer sans croire.

Imaginez un noble physicien, qui a observé longtemps les corps gazeux, les a chauffés, refroidis, comprimés, raréfiés.

Il en vient à concevoir que les gaz sont faits de milliers de projectiles très petits qui sont lancés vivement dans toutes les directions et viennent bombarder les parois du récipient.

Là-dessus le voilà qui définit, qui calcule ; le voilà qui démonte et remonte son « gaz parfait », comme un horloger ferait pour une montre.

Eh bien, je ne crois pas du tout que cet homme ressemble à un chasseur qui guette une proie.

Je le vois souriant, et jouant avec sa théorie, je le vois travaillant sans fièvre et recevant les objections comme des amies ; tout prêt à changer ses définitions si l'expérience ne les vérifie pas, et cela très simplement, sans gestes de mélodrame.

Si vous lui demandez : « Croyez-vous que les gaz soient ainsi ? » il répondra : « Je ne crois pas qu'ils soient ainsi, je pense qu'ils sont ainsi.

ALAIN. La croyance a toujours été un problème philosophique.

Elle a souvent été considéré négativement comme adhésion naïve. Pourtant, certains philosophes ont tenté de la réhabiliter soit comme ciment collectif tel Schelling soit comme moteur de l'action tel Nietzsche ou Edgar Morin.

Pourtant Alain reprend ici une critique de la croyance et essaie de montrer qu'elle n'a rien de rationnel.

Le philosophe tend à marquer une distinction entre le fait de croire et celui de penser, comme choses dont la nature est totalement différente.

La croyance n'est-elle que sentiment ? Quel danger comporte-t-elle ? Qu'est-ce qui la distingue de l'acte de penser ? La croyance est sentiment, fureur refermée sur elle-même - Pour Alain, même si la religion tend à décliner et que beaucoup se déclarent athées, la croyance n'a pas disparu de notre monde.

Il tend même à dire que la science est maintenant le domaine où s'enracine la croyance.

Il est vrai qu'à l'époque l'idée que la science pouvait résoudre tous les problèmes était répandue. - La croyance est une adhésion à une idée, mais une adhésion affective.

Il s'agit d'une affection même du corps qui n'a rien à voir avec la raison froide.

La croyance est ainsi sentiment qui attache l'homme à une idée.

C'est par cela même que la croyance peut être dangereuse. - Le croyant est attachée à son idée et y tient énormément.

Il ne peut accepter d'être contredit et c'est pour cela que Alain parle de « fureur » ou compare la croyance au lierre.

Ce dernier ne peut vivre sans l'arbre puisque c'est de lui qu'il tire sa substance vitale.

Ce qui fait que celui qui croit est fermé au monde extérieur et ne peut accepter les faits qui contredisent sa croyance.

De ce fait la croyance est dangereuse, peut mener à un dogmatisme extrême et amener à accomplir des actions dangereuses. La pensée est travail de l'esprit - Alain se sert de l'exemple du physicien pour essayer de démontrer que la croyance n'intervient nullement dans l'acte de penser.

Essayons de voir la démarche de ce scientifique : tout d'abord il observe longuement et il expérimente, c'est-àdire qu'il s'appuie sur des faits observables par tous.

Il conçoit ensuite une hypothèse mais il ne s'arrête pas là. - Ce qui différencie en effet la croyance de la pensée, c'est que cette dernière essaie de retourner du réel, de chercher des preuves de ses hypothèses.

Elle soumet donc ses idées à l'expérimentation et accepte les contradictions.

Ces dernières en effet ne sont pas considérées comme détruisant la substance même de l'homme mais comme bénéfiques.

L'erreur est alors considéré comme étape vers la vérité et les contradictions de l'expérience comme des indicateurs sur la voie de la connaissance. - L'homme donc est tout disposé à changer ses hypothèses de départ alors que le croyant n'y est pas prêt et refuse tout dialogue avec le réel.

Il y a donc d'un côté la croyance irrationnelle et la pensée logique, rationnelle et calculatrice. La croyance empêche l'esprit de penser - Il serait donc possible pour Alain de faire disparaître la croyance.

Il suffirait ainsi de faire travailler l'esprit et la raison pour que l'homme ne croit plus mais pense.

Cependant, comme Alain l'a dit au début du texte, celui qui croit ne veut pas s'arracher à la croyance.

Il semble en effet que les deux choses soient sur des plans séparés et que la croyance n'est pas accessible à la raison - En effet, puisque la croyance est attachement à une idée, adhésion à une idée nous empêche de travailler, d'en examiner la valeur.

En d'autre terme toute croyance nous empêche de penser, c'est-à-dire de tester.

Elle nous empêche aussi d'inventer puisque nos croyons justement que les idées auxquelles nous adhérons sont censées suffire à expliquer l'apparence des phénomènes. - Mais surtout, il semble que la croyance soit un refus de penser.

Ce texte semble en effet révéler une profonde, viscérale peur de penser, qui est une dimension de l'homme.

La croyance peut en effet être plus positive à l'homme surtout à l'homme qui veut être actif et efficace.

Il faut bien comprendre qu'aucune action ne serait accomplie si les individus qui les entreprennent ne croyaient pas en leur chance de réussir. Ainsi, la croyance et penser sont ainsi opposés.

La croyance se base sur les sentiments, adhésion naïve sans vérification. Elle n'est pas ouverte sur le réel et refuse toute contradiction.

La pensée elle, expérimente, teste et réajuste progressivement ses idées.

Elle invente sans cesse sans s'attacher à ses hypothèses.

La croyance empêcherait à l'homme par son attachement à l'idée se penser, d'inventer.

Elle serait inaccessible à la raison.

Pourtant, on peut se demander si la pensée est toujours débarrassée de toute croyance, si chaque scientifique peut élaborer des hypothèses sans y croire. Pour Pascal, les sceptiques sont des êtres fous et malheureux et seule la croyance est la marque d'une force d'esprit.. »

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