Alain, Contre le fatalisme

« Alain, Contre le fatalisme Indications générales FATALISME : Doctrine selon laquelle tout homme a un destin inévitable, si bien que la liberté est une illusion.

L'argument paresseux, fataliste, rapporté par Cicéron, enseigne une passivité totale, puisqu'il est inutile d'essayer d'échapper à son destin. Émile Chartier, dit Alain (1868-1951), fut un grand professeur de lycée et commentateur de l'actualité.

Rationaliste, il conçoit la philosophie comme un instrument de libération de l'homme, et invite l'individu à la méfiance à l'égard des préjugés et des pouvoirs établis.

Ce que résume son célèbre aphorisme : «Penser, c'est dire non».

C'est dans cette perspective qu'il propose de distinguer le déterminisme du fatalisme. Citation «Cette confusion est cause que les hommes peu instruits acceptent volontiers l'idée déterministe; elle répond au fatalisme, superstition bien forte et bien naturelle comme on l'a vu.

Ce sont pourtant des doctrines opposées; l'une chasserait l'autre si l'on regardait bien.

L'idée fataliste c'est que ce qui est écrit ou prédit se réalisera quelles que soient les causes.

Au lieu que, selon le déterminisme, le plus petit changement écarte de grands malheurs, ce qui fait qu'un malheur bien clairement prédit n'arriverait point».

(Éléments de philosophie, 1941.) Explication Le déterminisme est la doctrine rationaliste selon laquelle rien n'arrive sans cause.

Il est facile de la confondre avec le fatalisme pour qui, puisque tout est déterminé, tout ce qui arrive est comme écrit à l'avance, et il n'y a donc rien à faire pour l'éviter.

Alain dénonce cette confusion.

Le fatalisme nie en effet toute liberté et incite à se plier aux circonstances.

Le déterminisme, au contraire, même s'il dit que tout est déterminé, est la condition de la liberté: car c'est parce que le monde suit un ordre réglé que l'on peut prévoir ce qui va se passer et agir pour l'éviter.

C'est parce que le monde suit un ordre réglé que l'on peut prévoir les conséquences de ses propres actes et agir «en connaissance de cause», c'est-à-dire librement. Exemple d'utilisation Le texte d'Alain permet de bien comprendre comment déterminisme et liberté sont non seulement compatibles mais nécessairement liés.

Il permet ainsi d'éviter les contradictions de la notion de liberté absolue.

Du point de vue de la religion, il montre aussi que le fatalisme fondé sur l'idée que Dieu connaît à l'avance notre destin est absurde: car si Dieu connaît notre destin, nous ne le connaissons pas: nous ne pouvons donc rien en déduire sur ce que nous devrions faire ou ne pas faire.

L'idée de la prédestination n'autorise donc pas à s'abandonner aux circonstances ni à nous débarrasser de toute responsabilité.

De même en politique: le texte d'Alain est un appel à ce que chacun prenne son destin en main pour faire advenir la société qui lui paraît la plus juste, sans l'attendre d'une puissance tutélaire (à mettre en parallèle avec les textes de Tocqueville et de Marx). SUJET TYPE: La liberté est-elle incompatible avec l'idée de déterminisme? Contresens à ne pas commettre Il faut bien comprendre que le déterminisme n'est pas le contraire de la liberté.

Certes, il rend impossible une liberté absolue qui consisterait à échapper à toute causalité [voir Spinoza).

Mais si rien n'était déterminé, alors aucun de mes actes n'aurait aucun sens: je ne pourrais jamais en prévoir une quelconque conséquence.

Ce n'est donc que dans le cadre d'une nature déterminée que la liberté est pensable.. »