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Le Moi de l’héroïne, l’Autre et les thèmes dominants dans “Mon Coeur à l’étroit” de Marie NDiaye (1)

Publié le 04/08/2023

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« Le Moi de l’héroïne, l’Autre et les thèmes dominants dans “Mon Coeur à l’étroit” de Marie NDiaye 1.

Introduction Le roman que nous analysons dans cette recherche est Mon Coeur à l’étroit de Marie Ndiaye qui a reçu le prix Fémina en 2001 pour son roman Rosie Carpe. Notre roman est structuré principalement d’une cohésion harmonieuse entre dialogue (discours direct) et monologue intérieur que le grand linguiste Emile Benveniste (1966) a considéré comme un dialogue intériorisé : « un dialogue intériorisé, formulé en “langage intérieur”, entre un moi locuteur et un moi écouteur ».

(Benveniste, 1974 : 85) Ce roman représente un exemple concret du roman psychologique qui focalise sur l’état d’âme des personnages et leurs troubles psychologiques (Gunn, 1990).

Les exemples de ces troubles sont énormes dans la littérature moderne esquissant les divers cas maladifs comme la dépression, la personnalité borderline, l’anxiété, les phobies ou la schizaphrénie (Nespoulous, 2004 ; Peterfalvi, 1974). Aussi, notre roman est centralisé sur la première personne du singulier Je en action et réaction avec les autres personnages : nous y comptons 2931 « Je ».

Le Je de l’auteure est complètement absent face au Je de l’héroïne, Nadia, qui est, en même temps, la narratrice du roman. Cette héroïne/narratrice y exprime ses réactions et les sentiments qui lui sont non seulement propres ou partagés avec les autres personnages, mais aussi 1 propres aux autres personnages eux-mêmes.

tels que la peur, l’hésitation, la honte, l’embarras, l’angoisse, etc. Notre roman s’ouvre dès la première phrase par l’intrigue même.

Il y s’agit de l’héroïne/narratrice, Nadia, qui est marié avec Ange, tous les deux dans leur deuxième mariage.

Ceux-ci sont deux instituteurs dans une même école à Bordeaux en France.

Ils menaient une vie paisible et calme, basée sur la certitude et l’estime de soi.

Tout d’un coup, ils se trouvent soumis à une hostilité inexplicable de tous ceux qui les entourent : les élèves, la directrice de l’école, la pharmacienne, le fils de Nadia et les filles d’Ange de leur premier mariage, etc.

Tentant de comprendre ce qui se passe, Nadia se pose toujours des questions sans réponses, les questions qui la déroutent : Qu’estce que j’ai fait? Et à qui? Elle n’arrive pas à comprendre pourquoi subir tant de haine disproportionnée de tout le monde. 2.

Approche suivie et cadre théorique de la recherche Nous adoptons une approche statistique et linguistique pour relever l’expression du moi de l’héroïne et les effets de cette expression sur elle-même et sur les autres personnages à travers l’analyse quantitative des variables les plus saillantes (expressions des personnages (le Moi et l’Autre) vs thèmes dominants). Emile Benveniste (1974) est considéré parmi les pionniers de la linguistique qui a posé les jalons de la subjectivité langagière ; mais, dans le cadre d’une subjectivité relationnelle.

Dans cette relation, les partenaires « Je-Tu » de l’énonciation se posent comme co-locuteurs, influençant l’un l’autre.

Donc, c’est 2 autour des pronoms personnels que ce grand linguiste fonde les principes de sa théorie où il étudie la manière dont chaque personne, dans la relation « Je-Tu » se situe par rapport à l’autre.

C’est ce qu’il appelle «le cadre figuratif de l’énonciation».

(Benveniste, 1974 : 85) Dans sa pensée, Benveniste s’appuie sur des langues comme l’arabe et l’hébreu selon lesquelles on classe les paramètres de l’énonciation sur deux plans : 1.

Le locuteur (« celui qui parle ») par opposition à l’allocutaire (« celui à qui on parle »): Je/Tu.

(Mosès, 2001 : 516) Les deux plans se situent dans un cadre spatio-temporel bien défini. 2.

Le référent (« celui qui est absent ») : Il/Elle.

(Mosès, 2001 : 516) D’après le premier plan, la subjectivité du Je (pilier de cette relation) se définit par la relation psycholinguistique entre Je-Tu, dans le sens commençant par le Je allant vers le Tu : « Celle-ci […], est la capacité du locuteur à se poser comme “sujet”.

Elle se définit non par le sentiment que chacun éprouve d’être lui-même, mais comme l’unité psychique qui transcende la totalité des expériences vécues qu’elle assemble, et qui assure la permanence de la conscience ».

(Benveniste, 1974: 259) Cette relation est orientée par la nature du pronom Je qui se définit par lui-même et non par un objet dans le monde extérieur.

Je désigne « la personne qui énonce la présente instance de discours contenant Je.

Instance unique par définition, et valable seulement dans son unicité.

» (Suenaga, 1997 : 123) Aussi, la signification du Je, comme celle du Tu, est inclus seulement dans le temps et le lieu spécifique où il se prononce et où cette forme linguistique est en même temps le référent et le référé. 3 La seule différence entre le Je et le Tu, c’est que le Je désigne « la personne qui profère l’énonciation » (Benveniste, 1974 : 232) alors que le Tu désignes « celle à laquelle l’énonciation s’adresse.

» (Benveniste, 1974 : 232) Benveniste a appelé alors la première personne par la « personne-je » et la deuxième personne par la « personne-non-je » (Tu) ; ou la personne subjective par opposition à la « personne non-subjective.

» (Benveniste, 1974 : 232) Cette relation entre le Je et le Tu est nécessaire pour toute énonciation et elle est inscrite dans la définition du Je.

De l’autre côté, ces deux personnes s’opposent aux pronoms Il/Elle ou la « non-personne.

» (Benveniste, 1974 : 232) Si Benveniste dans ce sens a parlé de «la transcendance du Je par rapport au Tu (d’une antériorité logique) » (Mosès, 2001 : 517), ce cas est applicable pour l’exemple d’un verbe comme rencontrer (le Tu se constitue à partir du Je), mais dans l’exemple du verbe découvrir le cas est tout à fait contraire car le Tu existe déjà , et le Tu est transcendant à Je.

C’est cette idée qui est à la base de l’analyse phénoménologique du dialogue de Lévinas (1961) : « C’est l’apparition d’autrui et de la parole qu’il m’adresse qui met à l’épreuve la vérité du dialogue.

» (Benveniste, 1976 : 38) D’où Lévinas conclut par l’idée de l’asymétrie du Je et du Tu.

Cependant, Benveniste met en relief l’idée de leur symétrie ( « la structure duelle de l’intersubjectivité » ) : « celui que “je” définis comme “tu” se pense et peut s’inverser en “je”, et “je” (moi) devient un “tu”.

» (Benveniste, 1974 : 230) Lévinas ne nie pas cette idée, mais il explique ses conditions de possibilité : « La vérité de la relation du Moi avec l’Autre ne saurait être saisie par un observateur extérieur, elle ne peut être perçue que de l’intérieur, par le 4 Moi lui-même qui découvre l’altérité de l’Autre.

Cette altérité, qui est extériorité absolue, découverte d’un être qui m’est radicalement étranger, se donne à moi comme une révélation.

» (Mosès, 2001 : 518) Lévinas dénomme cette révélation d’autrui comme étranger par sa transcendance. « Dire qu’autrui est transcendant au Moi signifie que son apparition vient rompre soudainement l’autarcie du Moi […].

De ce point de vue, même si la rencontre du Je et du Tu s’accomplit à travers le langage, ce n’est pas le langage qui la constitue.

Car le langage lui-même (et, en particulier, le discours dialogal) ne peut se produire que sur l’horizon du face-à-face entre deux personnes, face-à-face que l’on ne peut décrire de l’extérieur sans en annuler la signification même, mais qui doit être décrit comme une expérience intérieure à la subjectivité, et dans laquelle celle-ci s’efface devant la transcendance d’autrui.

» (Mosès, 2001 : 518) En nous appuyant sur ces principes théoriques de Lévinas, nous jetons les balises de notre analyse quantitative afin de circonscrire la nature des relations maintenues entre le Je et l’autre (le Tu et Il/Elle ou les autres personnages du romans).

Dans notre roman, Notre hypothèse du départ postule que le Je existant dans un premier plan décrit une expérience intérieure à sa subjectivité et à l’affrontement concrète d’autrui (Tu ou Il/Elle) dans un face à face attestant la transcendance d’autrui. Nous appliquons le test de Pearson ou le test Khi2 (χ2) afin d’évaluer la distribution en probabilité des indices subjectifs de l’héroïne/narratrice dans sa relation avec elle-même et avec les autres personnages du roman (Muller, 1968 ; Ménard, 1984).

Nous confrontons les valeurs observées (o) aux valeurs théoriques 5 ou calculées (c) en nous appuyant sur le principe de l’hypothèse nulle de Muller (1968) sur la base de l’inférence inductive. « L’hypothèse nulle notée H0 est l’hypothèse que l’on désire contrôler : elle consiste à dire qu’il n’existe pas de différence entre les paramètres comparés ou que la différence observée n’est pas significative et est due aux fluctuations d’échantillonnage.

Cette hypothèse est formulée dans le but d’être rejetée. L’hypothèse alternative notée H1 est la "négation" de H0, elle est équivalente à dire « H0 est fausse ».

La décision de rejeter H0 signifie que H1 est réalisée ou H1 est vraie.

» (Ruch, 2013 : 6) Notre H1 dans cette recherche sera comme suit : Il existe.... »

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