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élément pour commentaire: "LA QUÊTE D'EURYDICE" (Livre X, vers 1 à 39) — Éléments de commentaire

Publié le 22/04/2023

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« "LA QUÊTE D'EURYDICE" (Livre X, vers 1 à 39) — Éléments de commentaire I.

— L'ÉPISODE INITIAL (vers 1-10). II.

— LA DESCENTE AUX ENFERS (vers 11- Le livre X commence avec l'arrivée d'Hyménée, le mariage d'Eurydice et d'Orphée, la mort d'Eurydice. 1) Hyménée et le rite du mariage. · Hyménée est, chez les Grecs, le dieu qui préside au mariage : il conduit le cortège nuptial qui, symboliquement, mène la jeune fille de la maison de son père à celle de son époux.

Cf.

les diverses allusions au rite de la cérémonie nuptiale (en réalité beaucoup plus romain que grec1) : les paroles consacrées ("sollemnia uerba"), le voile jaune safran que portait la jeune épousée (le flammeum), les torches ("faces") dont la flamme brillante était un heureux présage ("omen"). · Ainsi, la poésie d'Ovide fusionne-t-elle les traditions religieuses nationales (remises à l'honneur à l'époque d’Auguste) et le merveilleux mythologique (par exemple le dieu Hyménée, qui traverse les airs de Crète en Thrace, ou le cortège des Naïades escortant la dryade2 Eurydice). 2) La mort d'Eurydice. · Mais le début du livre X fait contraste avec la fin du livre IX (auquel il s'enchaîne par l'adverbe "Inde").

Au mariage heureux d'Iphis et d’Ianthé, dans la Crète ensoleillée (fin du Livre IX), s'oppose le mariage malheureux d'Orphée et Eurydice, dans la Thrace "nordique" (aux confins du monde grec et de la "barbarie" 3).

L'issue ("exitus") tragique en est annoncée par une série de mots négatifs (l’adverbe "nequiquam", la répétition de "nec"). La fumée de la torche récalcitrante fait couler des larmes, annonciatrices du chagrin causé par la mort d'Eurydice.

Le poète dramatise d'ailleurs l'événement au vers 8 : "Exitus auspicio grauior".

À noter que la voix d'Orphée est d'emblée impuissante, malgré ses pouvoirs magiques ("Orphea nequiquam uoce uocatur"). · Ainsi, en l'espace de dix vers à peine, Ovide donne à l'ensemble du livre X sa tonalité sombre et tragique : au mariage, à l'amour, sont associées la mort et la douleur. Tel sera, en effet, le sort de tous les personnages — ou presque — évoqués dans la suite.

Le livre X des Métamorphoses est placé sous le signe tragique de l'union consubstantielle entre Éros et Thanatos. 1 Adaptation des légendes mythologiques grecques au temps (le règne d’Auguste) et au lieu (Rome) de l'énonciation, dans une perspective didactique et nationaliste typique de la littérature augustéenne. 2 Rappelons que les Naïades sont des nymphes aquatiques (peuplant les fleuves, les rivières, les fontaines, etc.), qu’une dryade est une divinité des chênes, et par métonymie une nymphe des arbres, protectrice des forêts.

Naïades, dryades, oréades (nymphes des montagnes) constituent l'ensemble des Nymphes, divinités féminines de la Nature dans la conception panthéiste des Anciens. 3 Rappelons que la Thrace était une vaste contrée aux contours flous, située au nord du monde grec (≈ le sud de la Bulgarie actuelle), considérée comme une terre sauvage, une terre de légendes, peuplée de musiciens, d’ivrognes et de magiciens ( le véritable royaume du dieu Dionysos). 22). Après la mort de sa jeune épousée, après l'échec de ses lamentations dans le monde d'en haut, Orphée descend aux enfers, dans l'espoir de ramener Eurydice parmi les vivants. 1) Un motif littéraire célèbre. · Dans l'Odyssée (chant XI), Ulysse entre en contact avec le devin Tirésias et d'autres morts, après avoir pratiqué un sacrifice, mais sans descendre pour autant aux enfers.

Seuls quelques héros (Héraclès, Thésée, Orphée, Énée) ont pu aller dans le monde d'en bas 4 et en revenir. Ovide reprend le topos de la catabase (= en grec, descente), propice aux effets dramatiques, ainsi que l'a illustré VIRGILE dans de puissants tableaux (Énéide, VI et Géorgiques, IV). · Ovide emprunte donc à ses prédécesseurs une rapide et conventionnelle topographie des enfers : cf.

l'itinéraire convenu, qui passe par les gorges du Ténare, par le Styx, jusqu’au royaume des ombres et à son endroit le plus reculé, le Tartare ; de même, il rappelle les figures les plus célèbres du personnel infernal : le gardien des enfers, Cerbère ("le monstre issu de Méduse"), Perséphone et son redoutable époux (Pluton), les suppliciés légendaires (évoqués plus loin dans les vers 41 à 44). 2) Une approche originale. · Mais Ovide évite habilement de refaire l'œuvre de Virgile : peu d'éléments descriptifs, quelques rapides allusions, une impression d'ensemble (monde mystérieux et inquiétant) ; d'ailleurs l'évocation des enfers n'occupe que quelques vers. · Tout se passe comme si Ovide composait dans les creux des poèmes virgiliens : là où Virgile reste silencieux, le poète des Métamorphoses imagine le contenu du chant d'Orphée, qui constitue, au discours direct, le temps fort de ce début du livre X. III.

— LE DISCOURS D'ORPHÉE (vers 1739). La supplique adressée par Orphée aux divinités infernales est le chant d'un uates (v.

12), un poète inspiré, un prophète (= un "porte-parole") des Muses.

Mais ici le lyrisme élégiaque épouse les formes très codifiées de l'éloquence judiciaire.

Sa composition rhétorique est conforme à l'ars dicendi de l'époque, ou eloquentia. 1) Un morceau d'éloquence judiciaire. · Ovide était familier des subtilités de l'art oratoire. Jeune homme, il avait subi l'influence de ses maîtres d'éloquence.

Il s'amuse à appliquer les leçons des rhéteurs 4 Rappelons que le mot latin inferi renvoie étymologiquement aux "gens d’en bas", par opposition aux superi, "les gens d’au-dessus" (c'est-à-dire ceux qui vivent sur la terre). Yann NÉDÉLEC, d'après les travaux de Denis MERLE (éd.

Ellipses) et de Hervé DUCHÊNE (éd.

Bréal) dans ce qui prend alors l'allure d'un exercice.... »

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