Y a-t-il une morale naturelle ?
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«
INTRODUCTION
Définition des termes et problématisation : Le terme à déterminer de prime abord est la qualification
« naturelle » attachée à la morale, cela permet de resserrer le sujet, de savoir précisément de quoi il est
question.
La morale naturelle se distingue de la morale conventionnelle, elle ne serait pas construite par
l'homme mais elle prendrait sa source dans la nature qui resterait à interpréter.
La morale conventionnelle,
quant à elle, n'est pas à rechercher dans la nature mais elle est le produit d'un consensus social, pouvant
donc différer selon les sociétés considérées.
Le caractère naturel de la morale pose le problème de l'identité
de l'interprète.
Qui est à même de déterminer la morale naturelle ? Chaque homme, certains hommes ?
Comment savoir précisément ce que la nature nous dit de faire ? Et de quelle nature parle-t-on ? De la
nature humaine ou de la nature mondaine ? Les deux difficultés que nous devons résoudre sont les
suivantes : si l'éthique est fondée en nature comment reconnaître puis appliquer cette fondation ? Si la
morale est conventionnelle ne risque-t-on pas de sombrer dans une relativisme éthique ? Leur résolution
suppose l'examen de trois hypothèses.
La première consiste à envisager l'existence d'une morale naturelle qui
fonde et corrige la morale conventionnelle ou positive.
La deuxième conçoit la morale dans un unique sens
positif, le droit alors et la morale ne semblent pas distingués.
Enfin la troisième hypothèse examine la possible
réhabilitation de la morale naturelle.
PLAN DETAILLE
Première partie : la morale naturelle est fondatrice.
1.1 Convention relative et stabilité naturelle.
« Etablissons, maintenant, des divisions parmi les actes injustes et les actes justes, en parlant de ce point que
la définition du juste et de l'injuste se rapporte à deux sortes de lois, et que leur application à ceux qu'elles
concernent a lieu de deux manières.
Je veux parler de la loi particulière et de la loi commune.
La loi particulière est celle que chaque collection
d'homme se détermine par rapport à ses membres, et ces sortes de lois se divisent en loi non écrite et en loi
écrite.
La loi commune est celle qui existe conformément à a nature.
En effet, il y a un juste et un injuste,
communs de par la nature, que tout le monde reconnaît par une espèce de divination, lors même qu'il n'y a
aucune communication, ni convention mutuelle.
C'est ainsi que l'on voit l'Antigone de Sophocle déclarer qu'il
est juste d'ensevelir Polynice, dont l'inhumation a été interdite, alléguant que cette inhumation est juste,
comme étant conforme à la nature [...] Or il en va ainsi des prescriptions qui ne sont pas justes
naturellement, mais varient en fonction des hommes et elles ne sont pas identiques partout dès lors que les
régimes politiques ne le sont pas non plus, sauf qu'il n'y a qu'un seul régime partout qui soit d'après nature le
meilleur.
» ARISTOTE, Rhétorique, I 13.
1.2 La morale naturelle fonde la morale positive.
« Quand, par suite, la loi pose une règle générale, et que là-dessus survient un cas en dehors de la règle
générale, on est en droit, là où le législateur a omis de prévoir le cas et a péché par excès de simplification,
de corriger l'omission et de se faire l'interprète de ce qu'eût dit le législateur lui-même s'il avait été présent à
ce moment, et de ce qu'il aurait porté dans sa loi s'il avait connu le cas en question.
De là vient que
l'équitable est juste, et qu'il est supérieur à une certaine espèce de juste, non pas supérieur au juste absolu,
mais seulement au juste où peut se rencontrer l'erreur due au caractère absolu de la règle.
Telle est la
nature de l'équitable : c'est d'être un correctif de la loi, là où la loi a manqué de statuer à cause de sa
généralité.
En fait, la raison pour laquelle tout n'est pas défini par la loi, c'est qu'il y a des cas d'espèce pour
lesquels il est impossible de poser une loi, de telle sorte qu'un décret est indispensable.
De ce qui est, en
effet, indéterminé la règle aussi est indéterminée, à la façon de la règle de plomb utilisée dans les
constructions de Lesbos : de même que la règle épouse les contours de la pierre et n'est pas rigide, ainsi le
décret est adapté aux faits.
» ARISTOTE, Ethique à Nicomaque, V 14.
Transition : La mise en évidence de la morale naturelle laisse irrésolue la question de son interprétation, qui sera
en mesure d'interpréter la nature, de déterminer les prescriptions naturelles ? La morale naturelle peut-elle
être comprise dans un autre sens ?
Deuxième partie : La morale naît de la convention et non de la nature.
2.1 L'éthique est positive.
« Il peut paraître étrange à celui qui n'a pas bien pesé ces choses que la nature dissocie ainsi les humains en les
rendant capables de s'attaquer et de s'entretuer les uns les autres [...] Les désirs et les autres passions
humaines ne sont pas en eux-mêmes des péchés.
Pas plus que ne le sont les actions engendrées par les
passions, pour autant qu'il n'y a pas de loi faisant savoir qu'il est interdit de les accomplir [...] Ceci est aussi
une conséquence de cette guerre de chacun contre chacun : que rien ne peut être injuste.
Les notions du
bon et du mauvais, du juste et de l'injuste n'ont pas leur place ici.
Là où n'existe aucune puissance
commune, il n'y a pas de loi ; là où il n'y a pas de loi, rien n'est injuste.
» HOBBES, Léviathan, 13.
»
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