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Y a-t-il une limite au désir ?

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« Termes du sujet: LIMITE (n.

f.) 1.

— Ce qui sépare deux portions d'espace ; par anal., ce qui borne une étendue, un temps, une fonction.

2.

— Extension extrême d'une étendue, d'une faculté, sans que pour autant on ait à concevoir quelque chose qui lui serve de borne ; en ce sens, KANT oppose limite à borne.

3.

— (Math.) Un nombre A est la limite d'une série croissante S, si, quel que soit ∑ aussi petit que l'on veut, il existe toujours un nombre B appartenant à s, tel que A - B < ∑. DÉSIR : Tension vers un objet que l'on se représente comme source possible de satisfaction ou de plaisir.

Comme objet, c'est ce à quoi nous aspirons; comme acte, c'est cette aspiration même. Le désir se distingue de la volonté, qui n'est pas un simple mouvement mais une organisation réfléchie de moyens en vue d'une fin.

Le désir peut aller sans ou contre la volonté (un désir, par exemple, que je sais interdit et que je ne veux pas réaliser); la volonté peut aller sans le désir (la volonté d'ingurgiter un médicament quand, pourtant, je ne le désire pas). Finalement, on peut dire que vouloir, c'est désirer au point d'agir effectivement pour atteindre ce qu'on désire.

Ce qu'on veut, c'est toujours ce qu'on fait, de même que ce qu'on fait, c'est toujours ce qu'on veut.

On peut finalement considérer la volonté comme une espèce de désir, c'est-à-dire comme le désir dont la satisfaction dépend de nous. Problématique : Le désir semble s'apparenter à la démesure tant dans l'expérience que nous en faisons que dans les actions potentiellement immorales auxquelles il nous porte.

La réflexion doit s'attacher à décrire cette expérience du désir : dans un cas, selon l'idée traditionnelle, c'est l'âme qui donne au corps une mesure qui lui fait défaut ; dans l'autre cas, au contraire, le désir sera compris comme naturellement borné.

Mais ce débat sur la nature du désir ne doit pas masquer l'enjeu moral et politique de la question, c'est-à-dire la problématique du règlement du désir par la loi : ce n'est ni le corps ni l'âme qu'il faut incriminer, mais la liberté qu'il faut faire prévaloir en l'homme. Axes de réflexion : I.

Le désir est par lui-même illimité. Cette perspective se fonde sur une opposition radicale entre, d'une part, une instance corporelle qui nous sollicite sans cesse et d'une manière extrêmement forte, et, d'autre part, une instance spirituelle (l'âme) dont le rôle est de poser la mesure de ce que nous devons faire. La philosophie platonicienne développe cette opposition en termes de corps et d'âme.

L'âme désirante est l'esclave d'un corps qui l'entraîne à sa démesure car celui-ci est insatiable.

Il y a là un danger moral et théorique, et le rôle de la philosophie est de nous détourner autant qu'il est possible du corps pour atteindre la connaissance et la tempérance. La thématique chrétienne de la chair radicalise cette opposition en voyant l'homme comme une créature misérable, malade, scindée entre le péché, c'est-à-dire la somme de ses insatiables appétits, et l'amour de son âme pour Dieu (saint Augustin). Dans les deux cas, l'âme se trouve en conflit avec des désirs corporels qu'elle doit surmonter ou régler, mais en même temps, cette instance désirante (le corps) lui échappe radicalement. II.

Le désir est naturellement limité. Le désir est au contraire le mouvement qui nous indique ce qui est bon pour nous, à condition qu'il reste dans les limites que lui a assignées la nature.

Dans ce cas, ce n'est pas le corps qui donne sa démesure au désir, mais bien l'âme qui a « les yeux plus grands que le ventre ». C'est ce que montre le thème cartésien de « l'institution de la nature ».

Le désir est un sentiment, donc l'expression de l'union de l'âme et du corps, établie par Dieu pour notre conservation.

Si certains désirs sont dangereux, c'est seulement parce que l'âme imagine certains biens plus grands qu'ils ne sont en réalité.

C'est donc l'âme seule, et sa volonté infinie, qui se fourvoient, et non le corps.

Épicure constate que le plaisir, recherché par tous, est l'élément essentiel de la vie heureuse.

Conforme à la nature humaine, il procure un critère parfait de tous les choix que nous avons à faire.

Il réside dans la sensation qui, nous mettant en rapport avec le monde, est la règle qui nous fait choisir ou exclure.

Ce bien est inné et personnel, puisque chacun est juge de ce qui lui convient : c'est de notre propre point de vue sensible que nous jugeons de ce qui est pour nous un plaisir ou une douleur.

Ainsi, nous ne recherchons pas les plaisirs qui engendrent de l'ennui, et l'on peut préférer endurer certaines douleurs si elles sont le moyen d'accéder à un plus grand plaisir.

L'épicurisme n'est pas une philosophie simpliste qui recherche le plaisir à tout prix et fuit la douleur ; elle repose sur un principe de détermination, qui est la sensation, critère complexe d'estimation des valeurs, puisqu'il aboutit à un paradoxe : "Nous en usons parfois avec le bien comme s'il était le mal, et avec le mal comme s'il était le bien", (Épicure). On retrouve ici la tradition épicurienne, pour qui la démesure est à imputer à l'âme et non au corps.

Par nature, le désir est borné, tandis que les « désirs vains » de l'âme sont illimités.

Il faut donc s'en tenir aux limites naturelles du désir physique (élimination de la douleur) pour atteindre l'ataraxie. Le problème de cette conception qui réhabilite le corps est qu'elle risque de réduire la moralité à une économie du désir, donc à une forme de calcul. Comment concilier cette réhabilitation avec l'enseignement de l'ascétisme, selon lequel le désir est potentiellement dangereux d'un point de vue moral ? III.

La loi doit constituer la limite du désir. Il s'agit donc de montrer que l'enjeu politique et moral de la question ne se résout ni dans l'espérance en la grâce, ni dans la confiance en notre nature corporelle, mais dans l'usage de la liberté éventuellement contre nos désirs, ce qui établit la nécessité d'un règlement tout en refusant de diaboliser ou de mépriser le corps. D'un point de vue politique, on peut rappeler que pour Hobbes, seule la loi est en mesure de donner un coup d'arrêt aux désirs insatiables des hommes.

Il y a une limite au désir, qui n'est pas naturelle mais établie par le souverain dans l'intérêt de tous. Cependant, cette conception s'appuie largement sur la crainte du châtiment, donc encore sur un mobile sensible.

Or, selon Kant, c'est précisément la priorité donnée au « mobile pathologique » sur le « motif rationnel » qui fait du désir un danger moral.

La limite à faire valoir contre le désir ne doit pas être « la peur du gendarme », c'est-à-dire encore un autre mobile : elle doit être la loi morale, qui est le fait de la liberté entendue comme autonomie, c'est-à-dire comme faculté de se donner à soi-même sa loi.

Le désir, qui n'est pas naturellement borné, doit donc, sans faire l'objet d'une diabolisation, être limité par l'usage de la liberté lorsqu'il se trouve être contraire à la moralité.

C ar par la raison pratique qui est universelle, nous nous donnons nous-mêmes la loi morale : ne pas y répondre, c'est nier sa propre liberté et devenir l'esclave de ses passions.. »

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