Y-a-t-il des censures légitimes ?
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«
Sujet : Y a-t-il des censures légitimes ?
Discussion :
La question posée semble orienter une réponse d'ordre négatif, car la notion même de « censure » a une connotation péjorative.
C'est-à-dire que censurer, apparaît comme
l'obstacle même à la liberté.
Censurer est donc une forme de répression, qui donna lieu en mai 68 à la création d'un slogan très connu « il est interdit d'interdire ».
I.
Première partie : La Liberté
La liberté est le pouvoir de faire ou de ne pas faire.
C'est aussi l'absence de censure dans les multiples libertés, qui s'éprouvent dans différents domaines : l'expression et
l'agir.
Cela se traduit par les libertés politiques, les libertés religieuses, les libertés d'opinion, de création ; de manière plus concrète, les libertés à l'école, au travail, dans la
famille.
Il y a des libertés potentielles, des libertés conditionnelles et des libertés réelles.
Le philosophe indien Krishnamurti a fait de la liberté le thème de tout son
enseignement.
Il écrit : « La liberté ne peut se produire que d'une façon naturelle, non en la souhaitant, en la voulant, en aspirant à elle.
Elle ne se laisse pas atteindre non
plus à travers l'image que l'on s'en fait.
Pour la rencontrer, on doit apprendre à considérer la vie -qui est un vaste mouvement- sans la servitude du temps, car la liberté
demeure au-delà du champ de la conscience.
»
Dans le cadre de la vie sociale, il y a des libertés irresponsables (boire et prendre le volant) et des libertés responsables : faire ce que l'on veut dans la mesure où l'on
respecte la liberté des autres (écouter de la musique sans obliger les voisins à l'écouter).
La liberté n'est pas un droit égoïste, c'est un droit collectif.
L'exercice de la liberté
doit s'inscrire dans ce cadre, comme cela a été écrit dans la Déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen : « La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à
autrui.
» En ce sens, tout individu pris dans le tissu des relations sociales voit sa liberté prise en compte par un système d'obligations et de lois qui en conditionne
fortement l'épanouissement.
Il est sûr que l'on force quelqu'un à l'assujettissement et à la liberté, l'une découlant de l'autre.
II.
Deuxième partie : Définition du type de censure
Si nous ne sommes pas libres, c'est en quelque sorte que nous sommes esclaves de quelqu'un qui est, lui, libre.
Ainsi, il faut différencier : suis-je libre alors que je ne peux pas
faire ce que j'ai décidé à cause de quelqu'un ou à cause de quelque chose.
La censure est-elle un obstacle matériel et par conséquent, commun à tous, ou alors découle-t-elle
d'une volonté de puissance de quelqu'un sur moi ?
Cependant il ne faut pas confondre une liberté d'action avec une frénésie d'actions.
C'est pour cela que les lois sont nécessaires, car elles permettent de régir et de réguler
ces désirs, ces volontés.
Ainsi elles peuvent être considérées comme une forme de censure légitime, dans la mesure où elles permettent de mieux régir les liberté
individuelles.
Montesquieu : « Dans un État, c'est-à-dire dans une société où il y a des lois, la liberté ne peut consister qu'à pouvoir faire ce que l'on doit vouloir, et à n'être
point contraint de faire ce que l'on ne doit pas vouloir.
[...] La liberté est le droit de faire tout ce que les lois permettent : et, si un citoyen pouvait faire ce qu'elles
défendent, il n'aurait plus de liberté.
» Ainsi être libre c'est avant tout avoir des contraintes et des règles que l'on ne doit pas bafouer.
La liberté provient donc du fait que
l'on ne doit pas dépasser certaines lois.
Etre libre c'est aussi être juste.
III.
Troisième partie : la nécessité de la censure
Le principe de censure ne semble intervenir que de manière péjorative, en vue d'une répression, en vue d'un obstacle à la liberté de penser, et d'agir.
Mais d'une autre façon
n'est-elle pas nécessaire à l'expression même de la liberté ? C'est-à-dire que si la liberté n'avait pas de limite, si l'expression était sans borne, alors la liberté s'autodétruirait.
Platon prétend que : "L'excès de liberté ne peut tourner qu'en un excès de servitude, pour un particulier aussi bien que pour un État." Il faut qu'elle puisse
s'éprouver contre la censure afin d'être plus puissante.
Car c'est la censure qui semble engendrer la révolte, et c'est la révolte qui est l'expression de la liberté à son plus haut
degré.
"Là où il y a oppression, il y a révolte" dit un vieux dicton chinois.
André Gide applique l'idée à l'oeuvre d'art et son propos peut illustrer métaphoriquement le
nôtre : « L'oeuvre d'art classique raconte le triomphe de l'ordre et de la mesure sur le romantisme intérieur.
L'oeuvre est d'autant plus belle que la chose soumise était
d'abord plus révoltée.
» Incidences.
Conclusion :
L'inverse est évidemment vrai : un État qui développe abusivement la censure est un État répressif qui s'engage dans une logique sans fin.
La répression des actes et des
productions de l'esprit n'a pas de borne.
On peut penser aux grands autodafés, à la mise au feu des oeuvres considérées comme pensant mal sous le IIIème Reich, la limite
recule sans cesse puisque toujours il y a de nouveaux critères que l'on peut inventer qui partagent entre le bien et le mal, la pensée juste et la pensée fausse.
Or, ces valeurs
sont évidemment temporaires et aléatoires et ne correspondent qu'à l'idéologie d'un moment.
Plus la censure progresse, plus c'est mauvais signe quant à l'arbitraire
gouvernemental.
La liberté est donc à la fois appuyée sur la contrainte et la contrainte est synonyme de de privation de la liberté.
Le positif n'existe donc que dans un
équilibre savant entre les deux..
»
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