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Travaille-t-on seulement pas intérêt ?

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« PREMIERE CORRECTION Analyse du sujet et dégagement de la problématique ● La particularité du sujet tient à sa formulation restrictive : ne...que...

Celle-ci énonce un partage dans les fins attribuées au travail par les hommes.

Un premier ensemble de fins possibles est présupposé, et regroupé sous la notion d'intérêt.

Arrêtons-nous sur cette présupposition, et sur l'évidence qui la fonde : si on travaille, c'est surtout, ou le plus souvent, par intérêt.

Ainsi, le premier mouvement de la question pose une co-appartenance essentielle entre le travail et l'intérêt.

En première approche, nous pouvons la penser comme fin, cause, raison d'être.

Le second mouvement de la question interroge les limites de cette coappartenance : le travail appartiendrait-il aussi, par ailleurs, à une autre sphère, à une région qui exclurait l'idée même d'intérêt? L'identité de cette région est laissée ouverte, toute hypothèse est envisageable : le plaisir, le devoir, etc... Mais on voit d'emblée combien ce partage est problématique : si l'on travaille par plaisir, ou par devoir, notre travail est-il si exempt d'intérêt? Ce que la question montre, c'est toute l'ambiguïté de la notion d'intérêt. Notre première tâche consistera donc à la définir, c'est-à-dire aussi bien à en saisir l'unité, qu'à en cerner l'équivoque. ● Le terme d'intérêt vient du verbe impersonnel latin interesse, qui signifie « il importe ».

Il signifie ainsi, d'une manière très générale, ce qui importe réellement à un agent déterminé, ce qui lui est avantageux. Remarquons tout d'abord que cet intérêt peut être connu de l'agent ou non : on peut se tromper, et avoir intérêt à agir d'une manière qui nous semble désastreuse.

L'intérêt peut ensuite être collectif ou individuel; cette distinction évoque en particulier le domaine politique, où il ne faut pas confondre intérêt général (ensemble des intérêts communs d'une société) et intérêt public (ensemble des intérêts de cette société en tant que telle).

On voit par là qu'il faut aussi distinguer l'intérêt de nature (humaine, politique, etc...) de l'intérêt contingent particulier (dans une affaire par exemple). Mais le terme d'intérêt possède une seconde orientation de sens, subjective : elle désigne la caractère de ce qui provoque une activité mentale agréable, une attention spontanée.

Si le sens précédent est plus directement orienté sur la question de l'activité humaine, et en particulier du travail, le sens subjectif peut aussi nous fournir une fin plausible pour le travail, notamment en ce qui concerne le travail intellectuel. Ainsi, nous avons observé plusieurs tensions au sein de la notion d'intérêt.

Tout d'abord entre un sens objectif et un sens subjectif; ensuite, au sein même du sens objectif, entre des couples de compréhensions contraires (particulier / collectif, etc..) La dissertation doit donc examiner si ce champ dispersé de l'intérêt possède des liens essentiels avec la notion de travail, et s'il suffit à en rendre compte.

Il nous faut donc à présent considérer la notion de travail. ● Il désigne une activité humaine, spontanée ou contrainte, par laquelle un objet, un autre sujet (enseignement, par exemple) ou le sujet même qui travaille sont transformés.

On peut distinguer le travail de la nature du travail industriel, centré sur la production d'objets, du travail intellectuel.

Nous observons donc aussi, au sujet du travail, une dispersion : cette activité peut être entièrement extérieure à son sujet (labourer un champ) ou au contraire le prendre lui même pour objet (travail de déclinaisons, travail de gammes, ...).

Il est important de noter que le travail est une notion moderne : il n'y a pas de terme grec ou latin pour le désigner : il existait plusieurs termes par activités, ou par groupes d'activité.

Ce qu'il y a de plus notable, est que les termes les plus proches de la notion moderne de travail désignent de manière restreinte l'activité des esclaves; la philosophie, la politique, activités nobles s'opposent pour le grec au travail imposé par les besoins physiques.

Ceci nous invite à considérer de manière centrale la dimension économique et politique du travail : nos sociétés reposent entièrement sur lui, et la manière dont cette radicalité du travail est pensée en change le contenu selon les systèmes sociopolitiques. Nous avons ainsi obtenu plusieurs points d'accroche pour questionner le travail, plusieurs sphères qui le définissent.

Tout d'abord, la sphère de l'effort, en tant qu'elle s'oppose au loisir.

Ceci nous indique un certain rapport des moyens et des fins : le loisir étant ce qui et recherché pour lui-même, le travail en vue d'une fin que lui seul rend possible.

Ensuite, le nécessité.

Notre condition nous impose, pour survivre, certaines activités indispensables, mais que d'autres hommes peuvent mener à notre place.

Nous voyons d'emblée que le troisième aspect du travail, sa relativité à des conditions historiques, découle du second : il est nécessaire qu'un travail soit fourni pour chacun, mais non que chacun le fournisse.

Nous retrouvons aussi ainsi le premier aspect du travail : peut-on identifier le loisir à l'activité de ceux qui ne fournissent pas pour eux-mêmes le travail nécessaire? Le terme de travail est-il employé proprement lorsqu'on dit, par exemple, qu'un rentier travaille ses gammes? ● Nous pouvons à présent élaborer la problématique.

Ce qui, pour penser l'unité du travail, pose problème, n'est pas sans rapport avec l'ambiguïté, exposée plus haut, de la notion d'intérêt.

Cette dernière consiste, rappelons-le, dans la tension entre un intérêt objectif, c'est-à-dire lié nécessairement à la nature, le statut, ou les conditions de vie de l'agent, et un intérêt subjectif, un goût issu spontanément de lui.

Il faut cependant faire attention à ne pas présupposer des rapports qui pourraient sembler évidents, par exemple. »

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