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Suffit-il d'avoir des opinions pour penser ?

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« • Introduction — Premier temps : l'enjeu.

Le rôle des opinions dans la conduite de l'existence. — Deuxième temps : situer la question.

Comment se forment les opinions ? Ne faut-il pas viser une certaine exigence avant d'adopter telle ou telle opinion ? — Troisième temps : présenter explicitement la question.

Est-il nécessaire de penser pour avoir des opinions ? • Développement (chaque partie du développement est numérotée : D1, D2, D3, D4). — D1.

Explicitation du sujet et mise au point de la démarche de réflexion. 1.

Analyse — avoir # se faire => 2 types de rapports à l'opinion. — nécessaire : au regard de quoi ? en vue de quoi ? (Qualifier le type d'exigence auquel il est fait allusion).

Ce qui ne peut pas ne pas être (pas d'opinion sans pensée ?). — penser : « dialogue avec soi-même, examiner, etc.

» (cf.

Platon), activité réflexive (opposée ici en simple donné des opinions « toutes fortes ») entendue comme préalable au jugement énoncé. — opinion : énoncé d'un jugement.

« Fait de tenir quelque chose pour vrai » (cf.

Kant). 2.

Signification d'ensemble du sujet. On s'interroge sur l'origine des opinions.

L'hypothèse envisagée est celle de la formation d'opinions ne mettant pas en jeu l'activité de la pensée, du moins en une première acception de l'expression « est-il nécessaire ». En une seconde acception, si l'on admet l'existence de telles opinions, ne faut-il pas envisager le rôle de la pensée dans la formation d'opinions qui répondront à une certaine exigence (de vérité, de rigueur, etc...) ? 3.

Démarche de réflexion. (D2) Comment rendre compte de l'existence d'opinions qui ne résultent pas de la pensée ? (D3) Quelle exigence conduit à soumettre à la pensée la formation des opinions ? (D4) L'enjeu de la question : comment concevoir la pensée comme autonomie du jugement ? — D2.

Comment rendre compte de l'existence d'opinions qui ne résultent pas de la pensée ? Il s'agit de réfléchir, notamment, sur les facteurs de conditionnement dont relève l'existence d'opinions non réfléchies.

Quelques points de repère pour l'étude de ce problème.

Descartes : l'enfance, « âge des préjugés » (soumission au témoignage des sens, à l'autorité des précepteurs, aux impressions d'un vécu singulier). Marx : le rôle des idées dominantes, des valeurs idéologiques véhiculées par la conscience collective et l'éducation.

Freud : résistances et valorisations inconscientes liées à la biographie personnelle, aux culpabilisations, etc. Thème de synthèse : l'ignorance déguisée en savoir ; le préjugé aveugle à sa propre cause.

« Ignorance non consciente d'elle-même.

» J'ai 'en moi des opinions qui sont autant de réponses à des questions que je ne me suis jamais posées... — D3.

Quelle exigence conduit à soumettre à la pensée la formation des opinions ? S'il appartient à chaque homme de conduire sa propre existence, ne lui faut-il pas être maître de ses opinions, opinions dont découlent les choix pratiques fondamentaux ? « Ose penser par toi-même » (Kant.

Idéal des Lumières). Aux antipodes du principe d'autorité (admettre une opinion parce qu'elle est établie, ou officielle), le principe de raison donne à la pensée, comme activité de relation, d'examen, et de dialogue avec soi (cf.

Platon, Descartes, Hamilton, Lo- cke, Hume, Pascal) le rôle fondamental dans la formation des opinions. Cette pensée en acte sera d'abord rupture avec ce qui se donne pour vrai (le vraisemblable, le familier) et prend généralement la forme du savoir (cf.

les contrefaçons de savoir, les illusions, dont parle Socrate) —> l'ignorance consciente d'elle-même est en ce sens le premier point marqué par la pensée (cf. Apologie de Socrate et Ménon, de Platon, cf.

aussi la critique de l'opinion non maîtrisée). — D4.

Comment concevoir la pensée comme autonomie du jugement ? Il s'agit donc, pour chacun, d'exercer sa pensée pour se faire des opinions, et non plus reprendre à son compte des opinions toutes faites. Pour cela, une attitude critique pour se délivrer de l'emprise des préjugés est requise : le doute, d'abord existentiel (on m'a déçu sur un point) devient méthodique (provisoirement, je n'admets rien pour vrai que je ne le connaisse comme tel.

Cf.

Descartes : premier précepte de la méthode) voire systématique et hyperbolique (l'esprit, trop accoutumé au préjugé, doit en saper radicalement l'ascendant et la ténacité) : on doute même de ce qui semble le plus évident, et l'on va même jusqu'à imaginer un dieu trompeur qui se jouerait de nous (illusion - illudere.

Et si le monde n'était qu'une vaste illusion ?). A cette attitude critique s'opposent bien des obstacles : la facilité du « prêt à penser », les intérêts affectifs, les illusions qui réconfortent, les généralisations abusives, etc.

Il faut rompre avec l'opinion toute faite (cf.

Bachelard) et peut-être même avec le simple culte de l'opinion (philo-doxa) dont parle Platon.

« J'ai ma petite opinion...

Ah oui ! mais d'où la tiens-tu ? » Il ne s'agit pas « d'avoir des opinions », mais de s'affranchir de la contingence propre au domaine épars de l'opinion (cf.

la différence entre opinion droite et connaissance discursive ou science au sens général : Platon, Ménon, XXXIX, éd.

Garnier Flammarion).

Si l'opinion doit se soumettre à la pensée et, en fin de compte, dériver d'elle, c'est que, sans cela, elle ne saurait rendre raison de ce qui la fonde.

Le principe de son existence lui resterait extérieur.

Le jugement autonome, au contraire, a en lui-même, le principe de son existence.

Une opinion peut dériver de motifs subjectifs ; mais pour être réellement fondée, elle doit reposer sur des raisons, clairement saisissables et formulables : la pensée discursive, mûe par une exigence de vérité, conditionne l'autonomie du jugement, la maîtrise des opinions. • Conclusion – Bilan On ne peut contester l'existence d'opinions « toutes faites », qui n'ont pas été produites par la pensée.

Celles-ci, assimilables aux préjugés, tendent à normer l'existence, bref, à l'assujettir.

Une double exigence nous est apparue : s'en délivrer, et leur substituer l'activité rationnelle de la pensée.

Seule en effet une telle activité permet aux hommes d'être « majeurs », selon le mot de Kant, c'est-à-dire d'exercer leur jugement de façon autonome. – Ouverture Il reste que l'emprise des conditions de vie, mais aussi des formes de conditionnement idéologique, compromet trop souvent la possibilité d'une telle autonomie de jugement.

Ne faudrait-il pas dès lors solidariser la perspective éducative (faire en sorte que chacun puisse accéder à l'exercice de la pensée rationnelle) d'une lutte contre l'injustice et les multiples formes d'obscurantisme qui l'accompagnent ?. »

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