Sommes-nous libres de penser ?
Extrait du document
«
Etre libre de faire quelque chose signifie ne pas en être empêcher par une quelconque contrainte.
Le concept clef
que l'on rencontre dans la question de savoir si nous sommes libres de penser est celui de penser.
On peut définir
l'acte de penser comme celui de former des idées dans son esprit.
Penser semble être ce qu'il y a de plus familier à
l'homme, être qui est doué de cette capacité.
Etre cependant, on peut se demander si nous, hommes, sommes
libres de penser, c'est-à-dire si nous ne rencontrons pas d'obstacles nous contraignant à ne pas pouvoir former
d'idées dans notre esprit.
En effet, l'être humain est cet être hybride qui est à la fois un esprit et un corps, esprit
et corps qui sont toujours en mutuelle interaction.
Or, notre corps et les corps extérieurs peuvent nous empêcher
de penser.
Comment ? Pourquoi ? Il va s'agir de mesurer les capacités de notre esprit à pouvoir agir de manière
autonome.
I.
En quoi notre esprit se détermine-t-il lui-même ?
1- Qu'est-ce que penser ? L'acte est autonome et non contraint.
Textes de Descartes
Par le mot de penser, j'entends tout ce qui se fait en nous de telle sorte que nous l'apercevons immédiatement par
nous-mêmes.
(Cogitations nomine, intelligo illa omnia, quae nobis consciis in nobis fiunt, quatenus eorum in nobis
conscientia est); c'est pourquoi non seulement entendre, vouloir, imaginer, mais aussi sentir, est la même chose ici
que penser.
Car si je dis que je vois ou que je marche, et que j'infère de là que je suis; si j'entends parler de l'action
qui se fait avec mes yeux ou avec mes jambes, cette conclusion n'est pas tellement infaillible, que je n'aie quelque
sujet d'en douter, à cause qu'il peut se faire que je pense voir ou marcher, encore que je n'ouvre pas les yeux et
que je ne bouge pas de ma place; car cela m'arrive quelquefois en dormant, et le même pourrait peut-être m'arriver
encore que je n'eusse point de corps; au lieu que si j'entends parler seulement de l'action de ma pensée ou du
sentiment, c'est-à-dire de la connaissance qui est en moi, qui fait qu'il me semble que je vois ou que je marche,
cette même conclusion est si absolument vraie que je n'en puis douter à cause qu'elle se rapporte à l'âme, qui seule
a la faculté de sentir ou bien de penser en quelque autre façon que ce soit.
Ainsi, à cause que nos sens nous trompent quelquefois, je voulus supposer qu'il n'y avait aucune chose qui fût telle
qu'ils nous la font imaginer...
Je rejetais comme fausses toutes les raisons que j'avais prises auparavant pour
démonstrations...
et me résolus de feindre que toutes les choses qui m'étaient jamais entrées en l'esprit n'étaient
non plus vraies que les illusions de mes songes.
Mais, aussitôt après, je pris garde que, pendant que je voulais ainsi
penser que tout est faux, il fallait nécessairement que moi, qui le pensais, fusse quelque chose.
Et remarquant que
cette vérité : Je pense, donc je suis, était si ferme et si assurée que toutes les plus extravagantes suppositions des
sceptiques n'étaient pas capables de l'ébranler, je jugeai que je pouvais la recevoir sans scrupule pour le premier
principe de la philosophie que je cherchais.
2- Quel est le rapport de l'acte de penser aux sans ? Ces derniers n'empêchent-ils pas l'homme de penser ?
Texte de Leibniz
Il naît une question, si toutes les vérités dépendent de l'expérience, c'est-à-dire de l'induction et des exemples, ou
s'il y en a qui ont encore un autre fondement.
Car si quelques événements se peuvent prévoir avant toute épreuve
qu'on en ait faite, il est manifeste que nous y contribuons quelque chose du nôtre.
Les sens, quoique nécessaires
pour toutes nos connaissances actuelles, ne sont point suffisants pour nous les donner toutes, puisque les sens ne
donnent jamais que des exemples, c'est-à-dire des vérités particulières ou individuelles.
Or tous les exemples qui
confirment une vérité générale, de quelque nombre qu'ils soient, ne suffisent pas pour établir la nécessité universelle
de cette même vérité, car il ne suit point que ce qui est arrivé arrivera de même.
Par exemple les Grecs et les
Romains et tous les autres peuples ont toujours remarqué qu'avant le décours de 24 heures, le jour se change en
nuit, et la nuit en jour.
Mais on se serait trompé si l'on avait cru que la même règle s'observe partout ailleurs,
puisque depuis on a expérimenté le contraire dans le séjour de Nova Zembla .
Et celui-là se tromperait encore qui
croirait que, dans nos climats du moins, c'est une vérité nécessaire et éternelle qui durera toujours, puisqu'on doit
juger que la terre et le soleil même n'existent pas nécessairement, et qu'il y aura peut-être un temps où ce bel astre
ne sera plus, au moins dans la présente forme, ni tout son système.
D'où il paraît que les vérités nécessaires, telles
qu'on les trouve dans les mathématiques pures et particulièrement dans l'arithmétique et dans la géométrie, doivent
avoir des principes dont la preuve ne dépende point des exemples, ni par conséquent du témoignage des sens,
quoique sans les sens on ne se serait jamais avisé d'y penser.
C'est ce qu'il faut bien distinguer, et c'est ce
qu'Euclide a si bien compris, qu'il démontre souvent par la raison ce qui se voit assez par l'expérience et les images
sensibles
Transition
L'acte de penser se détermine par lui-même.
Il reste que c'est bien un homme qui pense, et que l'homme est
toujours et corps et esprit.
II- Quelle est l'influence du/des corps sur la faculté de penser ?
1- Sommes-nous libres de penser si notre corps nous conditionne ?.
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- On dit souvent pour expliquer, ou même excuser, un comportement humain : « c'est naturel ? ». Quel est le sens de cette expression ? Que faut-il en penser ?
- Serions nous plus libres sans Etat ?
- Baruch Spinoza: Sommes-nous libres ou déterminés ?
- Jean-Paul Satre: Sommes-nous condamnés à être libres ?
- Connaître et penser chez Kant