Saint Augustin
Extrait du document
C'est en toi, mon
esprit, que je mesure le temps. Ne me fais pas d'objection : c'est un
fait. Ne m'objecte pas le flot désordonné de tes impressions. C'est
en toi, dis-je, que je mesure le temps. L'impression que produisent en
toi les choses qui passent persiste quand elles ont passé : c'est elle
que je mesure, elle qui est présente, et non les choses qui l'ont
produite et qui ont passé. C'est elle que je mesure quand je mesure le
temps. Donc ou bien le temps est cela même, ou bien je ne mesure pas le
temps.
[...] Sans le secours de la voix ni des lèvres, nous nous
débitons en pensée des poèmes, des vers, des discours, et nous évaluons
l'étendue de leur déroulement, de leur durée, les uns par rapport aux
autres, exactement comme si nous les récitions à haute voix. Si
quelqu'un veut prononcer un son prolongé et en déterminer à l'avance,
dans son esprit, la longueur, il prend en silence la mesure de cette
durée, et la confiant à sa mémoire, il commence à proférer ce son qui
retentit jusqu'à ce qu'il atteigne le terme fixé. Que dis-je, il
retentit? Il a retenti et il retentira : car ce qui de ce son s'est
écoulé a retenti ; ce qui reste retentira, de la sorte il s'accomplit,
l'attention présente faisant passer l'avenir dans le passé, et le
passé s'enrichissant de ce que perd l'avenir, jusqu'à ce que par
l'épuisement de l'avenir, tout ne soit plus que passé.
Saint
Augustin
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