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Rôle et valeur méthodologique du doute

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« INTRODUCTION.

— Le doute présente bien des formes : il y a le doute de l'esprit hésitant pour qui une affirmation catégorique constitue un engagement au-dessus de ses forces; celui du sceptique qui s'est établi par système dans une position de refus et qui prétend ne rien affirmer; chez le dilettante, cette position n'est qu'un jeu ou manière de se distinguer du commun...

Tout autre est le doute méthodique d'un DESCARTES OU d'un Claude BERNARD. C'est de ce doute dont nous allons déterminer le rôle et la valeur méthodologiques, c'est-à-dire comme méthode et comme moyen de parvenir à la vérité. I.

— RÔLE. Le doute dont nous parlons n'est pas le « mol oreiller » dont parle MONTAIGNE et sur lequel nous nous éterniserions volontiers.

Ce n'est qu'un moyen de parvenir a son contraire, la certitude.

Mais comment obtient-il ce résultat ? A.

Son rôle essentiel n'est pas un rôle positif et il diffère en cela des autres composantes de l'activité mentale : l'observation qui procure des faits éclairants; l'intuition avec ses vues prospectives ou rétrospectives dont la compréhension présente toutes sortes de degrés; la déduction qui tire du connu tout ce qui s'y trouve impliqué... Immédiatement, le doute ne fait pas connaître quelque chose de nouveau et ne procure pas de certitude : au contraire, il s'attaque aux certitudes qui tendent à s'établir. B.

En effet, le rôle essentiel du doute est négatif : écarter les explications ou les hypothèses qui manquent de fondement.

Le doute méthodique est le propre de l'esprit critique qui consiste dans le refus d'admettre les affirmations qui n'ont pas été soumises à un contrôle rigoureux. C.

Toutefois, le résultat final n'est pas uniquement négatif et nous pouvons reconnaître au doute un rôle secondaire qui est bien positif, c'est-à-dire qu'il contribue à établir vérité et certitude.

En effet, si, directement, il ne peut conduire qu'au rejet d'hypothèses dépourvues de valeur, il contribue par là même à dégager le champ des hypothèses possibles de celles qui s'avèrent erronées et, par éliminations successives, conduit, à l'hypothèse valable.

Ensuite, une idée que les essais méthodiques de mise en doute n'ébranlent pas se trouve par là même confirmée, devient de plus en plus probable ou même pratiquement certaine. II.

VALEUR. La valeur méthodologique du doute résulte de ce qui vient d'être dit sur son rôle. A.

Cette valeur n'est pas absolue — comme peut l'être celle de l'intuition ou de la déduction — et en divers sens : a) Tout d'abord, le doute ne suffit jamais, à lui seul, à procurer une connaissance valable; il ne vaut que comme auxiliaire. b) Ensuite, ce n'est jamais le doute qui a le dernier mot, mais la certitude de l'intuition sous ses diverses formes, y compris celles que comporte la pensée discursive; lorsque le doute n'est pas levé par tous les contrôles possibles il n'est plus douteux que l'affirmation mise en doute ne doit pas être retenue, et par là même on aboutit à une certaine forme de certitude. c) En lui-même enfin, à la différence de l'intuition qui se donne normalement comme valable, le doute ne fait que poser une question et se donne comme faisant lui-même question; il exige donc un contrôle, et c'est cette exigence de contrôle qui fait toute sa valeur. B.

Elle est relative, c'est-à-dire qu'elle dépend de la valeur des autres éléments du complexe dont ce doute fait partie : a) D'une façon générale, du savoir et de l'intelligence de celui qui doute : le doute de l'ignorant ou du sot est dépourvu de valeur. b) Dans chaque cas particulier, du degré d'évidence de ce qui est mis en doute : un doute qui s'attaquerait aux vérités les mieux établies, à la valeur de la raison...

constituerait pour la pensée un obstacle et non un moyen. C.

Mais, sous ces réserves, la valeur du doute ne saurait être mise elle-même en doute.

Dans la vie pratique, c'est pour n'avoir pas opportunément douté de nous-même ou des autres que nous nous trompons ou sommes trompés. De même, dans la recherche théorique, le doute est la précaution nécessaire contre l'erreur. CONCLUSION.

— L'esprit du philosophe et celui du savant doivent, devant des affirmations probables, garder un juste équilibre qui serait rompu par celui qui s'installerait dans le doute.

Mais, il n'y a pas d'équilibre sans doute méthodique.. »

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