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Qui pense quand je dis "je pense" ?

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« Introduction On s'accorde généralement à dire que la pensée n'est attribuable qu'à l'homme, qu'il est le seul à être conscient de lui-même dans ses dires et dans ses actes.

C'est un sujet conscient de lui-même qui s'affirme comme un « Moi » qui dit « je pense ».

Car on ne saurait imaginer qu'un autre « je » puisse penser à ma place.

La décision même de penser montre que je suis bien celui qui pense là à cet instant.

Ainsi penser est la faculté d'un esprit sain qui sait qu'il est le sujet de sa pensée.

Il n'est pas un esprit « pathologique » (malade), comme le schizophrène, pour lequel ça pense à sa place au sein de sa conscience.

Dire « je pense » c'est en quelque sorte être maître de soi, montrer qu'on existe comme un être singulier, différent d'un autre.

Mais s'affirmer c'est toujours exprimer quelque chose qui vient de soi, et comment dès lors être sûr que ce qui vient de soi n'est pas plutôt l'œuvre d'un « autre » dans la conscience ? I.

L'affirmation du cogito (du « je pense ») a.

La promotion philosophique du moi commence avec Descartes, avec le « je pense, donc je suis » ( cogito ergo sum) des Méditations Métaphysiques.

Le cogito (« je pense ») est premier dans l'ordre du savoir, il permet de fonder des vérités.

Mais c'est par le doute sur soi-même et sur les choses qu'on se représente, que Descartes en vient à démontrer que la certitude indubitable qui surgit est le cogito.

C'est aussi un sujet libre qui pense, qui s'affirme comme un « Moi », un sujet capable de répondre de ses actes, capable de méditer sur soi.

La liberté de douter elle-même est l'épreuve de la liberté du cogito. b.

Kant critiquera Descartes d'avoir accordé l'existence au « je pense ».

Pour Descartes, un être qui pense est un être existant.

Et Kant refuse cela.

Pour Kant, le « je pense » n'est que ce qui « doit pouvoir accompagner toutes nos représentations » (Critique de la raison pure).

Le « Je pense » n'est qu'un moyen de rassembler les représentations dans un même sujet.

C'est le côté vide du « je pense » kantien. Cependant, dans son écrit intitulé Qu'est-ce que les lumières ? , Kant ordonne, selon la m a x i m e d e l'époque, de penser par soi-même (« Sapere aude »).

Ainsi tout homme a à s'éduquer dans la société, à se rendre libre en pensée sans pour autant enfreindre les lois instituées.

Comme l'a dit Rousseau, la liberté est l'obéissance aux lois qu'on s'est prescrit (Contrat social). II.

La pensée est toujours l'expérience d'un sujet a.

Dire « je pense » est possible grâce à un acte originaire.

C'est Fichte dans sa Doctrine de la science qui montrera que cet acte est le Moi qui se pose infiniment.

Tout savoir de quelque chose présuppose la position du Moi qui sait.

Mais le Moi fini, celui qui est conscient de lui-même, est toujours habité par ce Moi infini qui se pose lui-même et qui permet le Moi fini.

Le « je pense » fichtéen est en quelque sorte aussi un « je dois », en ceci que l'homme a le pouvoir de se réaliser lui-même.

Le Moi est tout (idéalisme subjectif) parce qu'il fait tout ; le « je pense » est dès lors potentiellement toute réalité. b.

Heidegger postulera au contraire que le sujet (le Dasein) est un être au monde.

C'est ce sujet seul capable d'interroger le monde, d'interroger l'être, qui a le pouvoir de sortir de ses chaînes du quotidien, et d'entrer dans une réflexion plus authentique sur l'existence. c.

Penser condamne ainsi l'auteur de ses pensées (le Moi qui pense) à se connaître lui-même.

C'est le terme « ipséité » (le soi-même) qui constitue la pleine connaissance de soi du sujet qui pense ; d'où l'expression antique inscrite sur le temple de Delphes : « Connais-toi toi-même ».

La certitude du cogito peut s'établir, comme l'a souligné Lévinas, à travers le visage nu de l'autre.

Car le visage de l'autre ramène à soi en tant qu'individu lié à une puissance supérieure, absolue.

Le visage de l'autre m'oblige dans la morale (ne pas tuer etc.).

C'est au final toujours un sujet au contact du monde qui pense, puisque le monde donne à penser. III.

Les eaux troubles du cogito a.

On a vu précédemment que le « je pense » confirme l'idée d'un sujet qui se pense lui-même. Aussi que le « je pense » pouvait avoir pour contenu des objets extérieurs d'ordre moral par exemple. Ce qui nous a permis d'établir pour le « je pense » un sujet conscient de lui-même et au contact d'un monde où d'autres « Moi » existent.

Penser signifie donc de prendre en compte qu'on n'est pas seul. Mais au regard de tout cela, comment savoir qu'on est vraiment à l'origine de nos pensées ? b.

Le fondateur de la psychanalyse, S.

Freud, montrera que « le moi n'est pas maître dans sa propre demeure ».

En effet, le « moi » n'est qu'un épiphénomène (un phénomène d e surface) qui exprime l'existence de quelque chose de plus enfoui dans le complexe psychique.

Et ce quelque chose, c'est l'inconscient.

L'inconscient a de l'influence sur la conscience.

Cette dernière croit être à la source de ses pensées, alors qu'en fait les causes de nos pensées proviennent de notre inconscient.

L'inconscient est une sorte de lieu en l'homme où viennent se loger des représentations que la conscience ne peut accepter.

Car la conscience se doit d'être en accord avec la réalité morale, et non d'affirmer ce qui est interdit en société.

Ce processus de « refoulement » (conserver hors de la conscience certaines choses) est naturel pour Freud, et permet aux hommes de vivre socialement, et non sous l'ordre des pulsions. La conscience (théorique et pratique) est toujours relativement commandée par ce côté sombre du psychique, et c'est pour cela qu'on peut tout aussi légitimement dire avec M.

Foucault que « ça pense en moi ». Conclusion On s'accorde à dire que la pensée nécessite un sujet comme support.

Ce sujet conscient de lui-même s'affirme dans le « je pense » comme sujet individuel et libre.

D'autre part, il montre sa singularité au regard d'autres consciences de soi.

Ceci fait, le sujet a à se prononcer dans sa vie quotidienne et à agir sans entraver la liberté d'autrui.

Du cogito simple doit survenir l'ipséité, c'est-à-dire que de la conscience de soi doit se former une connaissance de soi.

Mais on voit bien avec l'arrivée de la psychanalyse tous les soupçons qui pèsent sur le cogito, puisque celui-ci serait déterminé par une force inconsciente.

On peut pour conclure orienter le cogito sur deux plans : un plan social dans lequel l'individu doit exercer sa liberté sans contraindre l'autre, où le devoir moral caractérise le cogito civilisé.

Et un plan individuel où le sujet doit apprendre à se connaître lui-même en se penchants sur ses déterminations propres.

L'idéal serait sans doute de concilier ces deux plans pour une affirmation totale d'un cogito par lui-même en tant qu'il serait sujet de toutes ses déterminations.. »

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