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Qu'est-ce qu'un signe ?

Extrait du document

« Observation.

— Les deux parties du sujet sont évidemment liées.

De la nature du signe dépendra son rôle dans l'activité intellectuelle. Position de la question.

Le signe est-il quelque chose d'extérieur à la pensée? ou bien en est-il intimement solidaire? Selon la réponse que nous donnerons à cette question, l'idée que nous pourrons nous faire de son rôle dans la vie intellectuelle sera différente. I.

Qu'est-ce qu'un signe? A.

— Les empiristes ont eu tendance, en général, à concevoir le lien entre signe et chose signifiée comme un lien purement empirique.

Un phénomène sensible est associé à un autre, non perçu actuellement ou non perceptible aux sens par sa nature même : le premier devient le signe du second.

Il y a donc là un rapport purement associatif : le signe nous « fait penser » à la chose qu'il signifie. B.

— Cette conception pourrait, à la rigueur, paraître suffisante pour certains signes naturels.

Par exemple, la fumée est pour nous le signe du feu, parce que l'expérience l'a associée à l'idée du feu, même si celui-ci n'est pas actuellement visible.

Encore convient-il de remarquer que, même en ce cas, il est nécessaire, pour qu'il y ait vraiment signe, que l'esprit ait saisi le rapport entre les deux phénomènes.

A plus forte raison en est-il ainsi des signes que nous instituons nous-mêmes, des signes artificiels ou conventionnels, et surtout des signes volontairement signifiants.

MAINE DE BIRAN observait que l'enfant « ne commence à avoir des signes » que lorsqu'il transforme ses cris ou ses réflexes en appels intentionnels, ce qui suppose qu'il a établi un rapport entre le signe émis et le résultat cherché, c'est-à-dire porté une sorte de jugement.

Ceci nous montre qu'à la base du signe il y a quelque chose de beaucoup plus essentiel : une fonction de signification, une « fonction symbolique » qui « n'est pas la simple somme de gestes déterminés », mais dont le rôle est d' « établir une liaison entre un geste quelconque, à titre de signifiant, et un objet, un acte ou une situation, à titre de signifié n (H.

WALLON).

Au vrai, c'est une fonction proprement intellectuelle. II.

Rôle des signes. Ceci va nous permettre de préciser le rôle des signes dans la vie intellectuelle. A.

— Si l'on adopte la conception empiriste et associationniste du signe, celui-ci apparaît comme extérieur à la pensée.

Ou bien il est l'expression, s'il est « bien fait », des analogies naturelles entre les choses, et la pensée ne fait alors que refléter ces analogies représentées par les signes.

C'est la thèse de CONDILLAC : « Une science bien traitée n'est qu'une langue bien faite.

» — Ou bien au contraire le signe est postérieur à la pensée.

Celle-ci se constitue d'elle-même sans avoir besoin du signe, et ce dernier vient après coup l'exprimer.

C'est la thèse classique. B.

— Or, toutes les études contemporaines sur les signes et le langage montrent qu'il y a là deux aspects d'une même erreur.

Comme nous l'avons montré dans la première partie, le signe lui-même ne peut se définir abstraction faite de la pensée, et la psychologie de l'enfant de même que la pathologie mentale ont établi que développement du langage et développement intellectuel sont rigoureusement corrélatifs.

Ainsi, comme l'a écrit H.

DELACROIX, « le signe est un instrument de la pensée, et non pas une enveloppe de la pensée toute faite...

Toute pensée construit des signes en même temps que des choses » . Le signe a, en particulier, un triple rôle dans la constitution de la pensée. 1° Comme l'avait bien vu CONDILLAC (quoiqu'il ait mal interprété ce rôle), le signe est instrument d'analyse et, par suite, il aide la pensée encore enveloppée et confuse à devenir pensée claire et distincte. 2° « Un signe est nécessaire pour donner de la stabilité à notre progrès intellectuel, pour fixer chaque pas de notre marche », à peu près comme une armée qui avance en pays conquis doit consolider ses progrès en y établissant des forteresses : u Les mots sont les forteresses de la pensée » (HAMILTON). 3° Enfin, étant instrument de communication, le signe oblige la pensée à se dépouiller de ce qu'elle a de purement subjectif et d'intransmissible : il l'aide à se rationaliser. Conclusion.

L'élaboration des signes est inséparable du travail même de la pensée, parce que le signe est déjà luimême le fruit d'un acte intellectuel.. »

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