Qu'est-ce que parler veut dire ?
Extrait du document
«
Analyse du sujet et dégagement de la problématique
●
La forme du sujet est très simple, et ne présente aucun piège.
Sa particularité est l'emploi de la locution
vouloir dire, par opposition à un verbe plus clair, comme signifier, par exemple.
Il faudra donc utiliser cette
indistinction pour donner de la richesse au questionnement.
Lorsqu'on se demande ce qu'un phrase, ou une
thèse, veulent dire, on demande leur signification, leur sens, on cherche à l'expliquer.
Lorsqu'on demande ce
qu'un acte, ou un phénomène, veulent dire, on questionne, tout aussi bien que son sens, sa valeur, ou
plutôt, en son sein, quel différentiel, en lui, permet l'évaluation.
Par exemple, si l'on demande ce que tel
geste, telle initiative veut dire on questionne aussi la valeur qui, comme geste, ou comme initiative, les
détermine.
Il y a des gestes inconsidérés, réflexes, et des gestes muris, lourds de sens.
Et c'est ce
différentiel qui les évalue comme geste ou initiative.
On pourrait donc penser à proposer, comme repère des
valeurs immanent à la notion de geste, les catégories opposées du réflexe et du geste intentionnel, par
exemple.
Ainsi, il faut bien comprendre ce qui est attendu de la dissertation : il faut, certes, déterminer le
sens, la signification du parler, mais aussi, à partir de là, déterminer ce que nous appellerons son repère de
valeur.
Il faut ensuite remarquer la consonance entre le verbe parler, comme tel, et le sens littéral des verbes
vouloir, dire.
Elle renforce le paradoxe naissant de la question elle-même : dès lors qu'on la pose, ne parle-ton pas déjà? N'a-t-on pas déjà voulu dire, quelque chose? Et par là-même, ne savons-nous pas précisément
déjà ce que parler veut dire? A première vue, le paradoxe se dissout dans ce que la question semble avoir de
facile à résoudre : poser la question serait déjà y répondre.
Mais il faut distinguer deux compréhensions
différentes.
Certes, à première vue, on peut parler sans posséder de concept déterminé du parler, c'est-àdire sans vraiment comprendre ce que parler veut dire.
Mais en revanche s'il on a pu, déjà, parler pour
questionner le parler, et su que pour poser la question il nous fallait parler, c'est qu'on possède déjà une précompréhension diffuse de ce que parler veut dire.
Nous pourrons donc retenir ceci que l'homme vit toujours
déjà dans une pré-compréhension du parler.
Dans la mesure où le sujet même de la dissertation est
déterminé par cette propriété, nous devrons en faire une ligne directrice dans notre recherche du repère de
valeur du parler.
●
Interrogeons à présent différentes figures du parler.
Ceci nous permettra de le distinguer de certains
verbes proches, ou de l'opposer aux verbes adéquats.
Ce qui frappe tout d'abord dans le parler, est qu'il constitue une prise de parole, c'est-à-dire un acte, à
chaque fois unique particulier, où une parole qui aurait pu ne jamais être est prise et dite.
Il y a une
dimension créatrice du parler qui l'oriente vers la subjectivité.
Cette orientation est double : elle considère
aussi bien ce qui, dans le sujet, parle et constitue la prise de parole unique, singulière, que la volonté même
du sujet, qui prend la parole.
Nous pouvons distinguer cette figure du dire, orienté au contraire vers
l'objectivité.
Dire est un verbe transitif : tout dire n'est tel que pour autant qu'il dit quelque chose, donc
quelque chose que d'autres pourraient aussi dire.
Bien entendu, ces deux aspects ne s'opposent pas, et se
présupposent même l'un l'autre.
Comment peut-on décrire cette coappartenance du parler et du dire? En
ceci que tout dire suppose un parler pour le dire, c'est-à-dire qu'il y a une antériorité logique du parler sur le
dire.
Il n'est pas négligeable que, d'une énonciation, ce soit le pôle subjectif qui l'a énoncée qui ait
l'antériorité, la primauté, et non ce qui en elle désigne le réel, la chose dite, ce que le parler veut dire.
Ne
serait-il pas plus immédiat de penser que, du parler, ce soit ce que le parler veut dire, sa fin, qui doive en
orienter la valeur et le sens? Que nous apprend sur la parole cette primauté?
La notion de langage sera aussi centrale.
On s'aperçoit que les seuls emplois du verbe parler où celui-ci est
transitif la concernent : parler une langue, un dialecte, un sabir...
Parler, c'est manier une langue, c'est-àdire un système signifiant.
Parler, c'est donc produire du sens à l'aide de règles.
Mais cette intuition devra
être remise en question.
A partir de quand peut-on dire que quelqu'un a parler? Un son inarticulé, une
onomatopée, sont-ils parlés? Dans ce cas, faut-il considérer le parler dans sa pure oralité? On parle
cependant de la parole d'un écrivain, par exemple.
Considéré depuis le pôle subjectif de sa genèse, le parler s'oppose ensuite immédiatement au silence.
Chaque
fois que l'on parle, c'est à la place d'un silence possible.
Bien entendu, il est possible de parler alors que
d'autres parlent déjà, pour leur couper la parole, peut-être, ou pour la dominer.
Mais dans ce cas, la parole
ne se distingue justement plus comme telle, elle se dissout dans le bruit.
Bien sûr, pour son compte, chacun
des participants au brouhaha aura parlé, mais chaque aucune parole n'en sera née, ne pourra être désignée.
Nous pouvons en déduire deux choses.
Tout d'abord, que si le parler s'oppose au silence, il a cependant un
intime besoin de lui : ce dernier est nécessaire à l'accomplissement du parler dans la parole.
Puis que le parler
peut être subjectivement sans être objectivement.
En d'autres termes, que le parler a pour fin de donner
naissance à la parole, mais qu'il est possible à un parler d'être stérile.
Remarquons à ce propos qu'il est possible de parler pour ne rien dire.
A la possible stérilité du parler, s'ajoute
donc un parler qui ne recherche rien d'autre que lui même.
Il faudra chercher aussi bien le sens de ce parler
que celui d'un parler solennel.
Un autre pôle que le pôle subjectif qui parle semble ici l'orienter tout aussi bien
: le destinataire, l'auditeur.
Si l'on parle pour ne rien dire, pour parler, c'est pour parler à, avec quelqu'un.
On
semble atteindre ici un fonds primaire du parler : il consiste simplement, ici, en l'emploi d'une langue.
D'autre.
»
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