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Qu'est-ce que les composantes d'un portrait ?

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« Le portrait est un genre pictural et littéraire qui a ses codes et qui a évolué au travers du temps.

On demande généralement à un portrait de ressembler à son modèle, qu'il reflète sa personnalité, son caractère.

Le portrait a le souci du détail, de la petite différence qui particularise un être.

Aussi, il peut paraître impossible d'arriver à un portrait définitif d'une personne, de capter l'essence même d'une personne, son âme.

Cet art du portrait a connu ses heures de gloire dans l'histoire, mais l'art contemporain a mis à mal cette volonté de rendre à tout prix la vérité d'une personne au travers d'un portrait. 1) Ce qu'on attend habituellement d'un portrait. Il faut que le portrait ressemble au modèle (on retrouve cette loi dans le théâtre de Molière, qui oppose aux « portraits faits à plaisir » de la tragédie les portraits fidèles de la comédie), mais ce n'est pas tout d'y faire reconnaître le modèle, il faut encore y faire reconnaître la « manière du peintre ».

On voit alors se fixer les caractéristiques qui seront celles du portrait dans les siècles suivants : « Comme autant de coups successifs de crayons, des énoncés parallèles cernent et définissent une image qui, comme celle du peintre, est statique et intemporelle » (J.D.

Lafond).

Technique accumulative donc et fixité : par une addition de traits physiques et moraux, on pense « épuiser » un objet, atteindre une essence soustraite au temps.

On pourra rattacher cette ambition à la nature essentialiste de l'esthétique classique. 2) les fonctions du portrait à travers l'histoire. Malgré la différence du contexte social, certaines fonctions du portrait restent constantes.

Celles notamment qui, sous des formes très diverses, rattachent cette branche particulière de l'art à l'idée de la mort et de la survie.

Qu'il s'agisse d'efficacité réelle ou de transmission d'un souvenir, de moyen de parvenir sans perte d'identité à la vie d'un monde ultraterrestre ou du simple désir de léguer ses traits à la postérité, la pensée de la survie et de la conjuration de l'état éphémère préside toujours à l'exécution d'un portrait.

Par ailleurs, le plaisir de contempler ses traits tels qu'ils apparaissent à l'autre a, de tout temps, constitué un puissant facteur de succès pour ce genre d'art, un des plus stables de l'histoire du monde.

Dans l'ancienne Égypte, la représentation de l'individu est également liée aux croyances religieuses.

La conception que l'on s'y fait des rapports entre le monde visible et le monde transcendant commande en premier lieu celle de la nature du pharaon, et celle-ci dicte, à son tour, le comportement du commun des mortels dans lequel le recours à l'image personnelle joue un rôle très actif.

L'une des grandes fonctions du portrait, celle qui réglait l'obsédante question de la survie individuelle après la mort, se trouva donc annulée dans tous les pays d'Orient et d'Occident qui s'étaient ralliés à la doctrine chrétienne.

À la fin du premier quart du XVe siècle, le portrait s'érige en genre indépendant.

Moins évolutifs, et ayant marqué le pas au XVe siècle, après avoir été les premiers à exploiter un genre, les Français retrouvent, avec les Clouet et leur école, la version du portrait pur, fait pour l'analyse et la fixation des traits du visage, dans lequel se reconnaît avec enchantement par une manière de jeu collectif toute une société de cour.

Le portrait d'apparat, réservé encore au XVIe siècle à l'art de la cour, est accueilli avec empressement par la noblesse de robe et la grande bourgeoisie dont le rôle ne cesse de grandir en France comme en Angleterre.

Ces classes entendent, à leur tour, bénéficier du plaisir que procure la transmission à la postérité de ses traits sous l'aspect le plus avantageux.

Le portrait, qui s'était vidé de toute substance sous l'action stérilisante de l'apparat formel, conquit un nouveau domaine, celui de l'analyse psychologique.

Les meilleurs portraits de La Tour devaient être ceux dans lesquels le portraitiste, revenant à l'idée qui avait présidé à la naissance du portrait libre, ne traite que la seule tête du modèle, abandonnant accessoires et costumes, cadre et fond imagé.

La « ressemblance » elle-même, dont peu d'artistes se sont vraiment souciés dans le passé, acquiert dans le nouveau contexte formel une force plus convaincante.

Il n'en reste pas moins que l'objectif s'est déplacé.

Pour tous les novateurs, ces portraits ne sont plus qu'un prétexte, un support de l'imagination qui les aide à trouver et à affirmer par-delà l'expression individuelle du modèle, celle qui détermine leur propre attitude vis-à-vis du monde visible et de l'art.

La nature du portrait s'en trouve radicalement changée : la représentation du modèle n'a plus pour fin sa propre fixation ni la détermination de la place que tient le modèle dans la société reconnue comme donnée, mais la définition de la société elle-même telle que la conçoit l'artiste, ou bien la symbolisation des destins particuliers et universels, ou plus simplement l'analyse de la lumière ou du mouvement. 3) L'insaisissable portrait des êtres : la tentative difficile de trouver une permanence. Et pourtant le portrait classique est au XXe siècle totalement remis en question, ainsi que le montre l'œuvre de Proust. Décrivant ses personnages « comme occupant une place considérable [...] dans le Temps », le romancier ne peut plus donner d'eux que des images successives et contradictoires, non seulement parce que le modèle change sans cesse, mais aussi parce que le peintre et le point de vue changent également : il n'y a pas une Albertine, mais de multiples Albertine, il n'y a pas un visage d'Albertine, mais mille visages différents.

Les modèles de Van Gogh finissaient par ressembler aux « portraits » qu'il avait faits d'eux ; chez Proust, même après la mort d'un être, il n'est pas de lui d'image privilégiée et définitive : l'immobilisation, comme l'identité qu'elle implique, est impossible et illusoire.

La Bruyère, tout en recommandant au lecteur de ne pas perdre le titre de vue, s'abstient de définir le terme.

À travers les portraits de toutes longueurs et de toutes formes, à travers les maximes et réflexions dont le souple assemblage, conciliant l'ordre et la surprise, et le ton infiniment varié constituent le modèle, impossible à reproduire, du genre, les « mœurs de ce siècle » occupent une large place.

Mais, comme le prouvent un chapitre tel que « De l'homme » et cent observations de portée générale, il peint les caractères permanents de l'être humain, qui reçoivent des mœurs leur réalité objective.

S'il fixe leurs effets particuliers avec une acuité de vision, un sens du relief et du mouvement inégalables, c'est qu'à ses yeux l'éternel et l'éphémère s'éclairent réciproquement, et que l'un n'est à vrai dire ni connaissable ni communicable sans l'autre. Conclusion. On ne peut ici donner les composantes exactes d'un portrait, chaque artiste par son style peut réaliser différemment des portraits, chaque individu sera différent.

Il n'y aura pas de règles à ce titre, et aussi pour la raison qu'un portrait n'est jamais fini, qu'il est impossible de rendre compte de l'essence de l'âme d'une personne.. »

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