Qu'est-ce que faire une expérience ?
Extrait du document
«
Introduction
Souligner l'ambiguïté de l'expression proposée: on peut y entendre « expérience» dans le sens scientifique aussi bien
que dans le sens ordinaire, par référence à l'expérience qui s'acquiert peu à peu au cours de l'existence.
Obligation
de traiter les deux aspects, c'est-à-dire de montrer leurs points éventuellement communs ou opposés (ce qui
implique la question de la continuité ou discontinuité de la science par rapport aux relations quotidiennes que nous
avons avec le monde).
I.
L'expérience scientifique
— S'appuyer sur son analyse classique (C.
Bernard).
— Schéma:
• observation (non innocente);
• formulation d'une hypothèse;
• montage expérimental vérifiant ou infirmant l'hypothèse.
— Insister sur le caractère «artificiel» du phénomène, reconstruit en laboratoire aux fins de l'expérience.
— Aboutissement: la loi, qui donne une connaissance universelle par principe (déterminisme).
II.
L'expérience quotidienne
— Elle est directe (ni matériel, ni laboratoire).
— Elle est singulière (c'est toujours un sujet particulier qui la fait).
— Elle est interprétée par un sujet (dès lors un autre sujet pourra en contester le sens).
— Qu'en déduit-on? un «savoir» empirique qui se prétend utilisable dans la vie quotidienne.
Elle révèle donc au sujet
des «valeurs», alors que l'expérience scientifique s'en tient aux phénomènes et aux lois.
III.
Faire: actif ou passif?
— Faire une expérience scientifique, c'est déployer une activité de questionnement à l'égard du monde: la nature ne
répond qu'aux questions qu'on lui pose (cf.
Kant).
L'esprit dans ce cas est bien actif; il s'appuie sur les
connaissances acquises et vise l'enrichissement du savoir; souci de l'universel (la loi).
— «Faire une expérience» ou « savoir par expérience » au sens non scientifique, cela sous-entend au contraire que
c'est le monde lui-même qui a fourni un enseignement: l'esprit est passif.
Intervention de l'affectivité: l'expérience quotidienne peut être «heureuse» ou «malheureuse».
Attention au
particulier, souci du détail «révélateur» ou singulier.
— Je peux toutefois récupérer dans le quotidien une certaine activité quand je fais volontairement une expérience
ayant pour but d'éprouver mes limites (faire l'expérience volontaire de la résistance physique, de la douleur...).
Mais
cette activité reste incapable de retrouver la généralité ou l'universalité: elle est toujours propre à un sujet et sera
différente pour un autre (on pourrait utiliser, à titre de modèle, la différence entre la psychologie d'introspection —
où je prétends faire, sinon une expérience, du moins une observation sur moi-même —, telle que Comte la critique,
et la psychologie expérimentale, qui suppose des protocoles objectifs et surtout, une différenciation radicale entre
observateur — le psychologue — et observé).
Conclusion
Il n'y a pas de continuité entre l'expérience quotidienne et l'expérience scientifique (pas davantage entre perception
normale et approche scientifique du monde).
Dans le premier cas, intérêt pour le qualitatif, les valeurs,
l'enrichissement personnel.
Dans le second, prédominance du quantitatif, des faits reconstruits et d'un savoir
«anonyme».
La science doit donc commencer par une rupture à l'égard des «savoirs» antérieurement constitués par
l'expérience quotidienne ou empirique..
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Kant: Nul ne peut faire l'expérience de la mort
- « L'idée de cause et d'effet est dérivée de l'expérience qui, nous présentant certains objets constamment unis, produit en nous une telle habitude de les envisager dans cette relation, que nous ne pouvons plus sans nous faire sensiblement violence les en
- Qu'est-ce que faire une expérience ?
- Peut-on faire l'expérience de la liberté ?
- l'homme moderne peut-il et doit-il faire l'expérience du sacré ?