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Qu'est-ce que comprendre une oeuvre d'art ?

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« La fréquentation des musées, où sont exposées ce qu'on appelle des « oeuvres d'art », est devenue courante dans les sociétés contemporaines.

Pourtant, l'oeuvre d'art, qui se veut inutile selon l'école de « l'art classique » et qui se définit en opposition avec l'objet technique, dont l‘intérêt est évident, est difficile à appréhender.

Pourtant, ces choses qui se veulent inutiles sont plus volontiers par la plupart des gens que les objets techniques et sont admirées par nombre d'individus.

L'unicité des oeuvres d'art est appréciée et tout objet en constituant une simple reproduction est systématiquement dévalué dans la mesure où il s'agit alors d'un objet de consommation, ce qui est en contradiction avec l'idée d'inutilité.

Pourtant, l'art contemporain revendique la qualité d'oeuvres d'art pour des objets qui semblent incongrus et qui sont le fruit de la reproductibilité, pensons à « l'Urinoir » de Duchamp, exposé dans un salon puis dans un musée.

On peut alors se demander comment définir une oeuvre d'art et quelle est sa nature.

L'oeuvre d'art peut être définie à partir de « l'activité créatrice » qui le manifeste, comme le fait Kant [1]. Pour ce dernier l'oeuvre d'art est spécifiquement humaine, elle ne peut pas être un produit de la nature.

L'oeuvre d'art n'apparaît qu'en surplus par rapport aux nécessités naturelles, elle serait le fruit de l'usage du libre arbitre de l'homme : « on se plaît à nommer une oeuvre d'art le produit des abeilles (les gâteaux de cire régulièrement construits) mais ce n'est qu'en raison d'une analogie avec l'art, en effet dès que l'on songe que les abeilles ne fondent leur travail sur aucune réflexion proprement rationnelle, on déclare aussitôt qu'il s'agit d'un produit de leur nature (de l'instinct), et c'est seulement à leur créateur qu'on l'attribue en tant qu'art ».

L'oeuvre d'art est donc issue d'une volonté consciente ayant une finalité particulière, mais n'importe quelle production humaine n'est pas une oeuvre d'art, n'est nommé oeuvre d'art que ce qui n'a pas d'utilité technique.

Enfin, selon Kant, l'art est la manifestation d'une liberté de faire de l'inutile qui apparente l'activité créatrice à un jeu.

Au sens classique du terme, l'oeuvre d'art est donc idéalisée, placée hors et au dessus des objets utilitaires courants, l'oeuvre d'art, en ce sens, est une « manifestation de l'esprit », comme le pense Hegel[2] : « le côté sensible de l'oeuvre d'art n'existe et ne doit exister que pour l'esprit.

» C'est dans l'art que l'esprit se manifesterait, dans ce qui est « en-soi » et « pour-soi », tandis que dans la nature, il n'existerait que des objets de consommation, c'est pourquoi, pour faire de l'art, l'homme devrait mettre de côté tout désir : « Envers l'art, l'homme ne se comporte pas selon son désir...Les oeuvres d'art occupent un tout autre plan, puisqu'elles sont au service de l'esprit et ne sont là que pour le satisfaire.

» L'artiste, en ce sens, recherche le « spirituel dans l'art », c'est d'ailleurs le titre d'un livre du peintre Kandinsky.

Pourtant, l'art contemporain s'est émancipé de cette définition classique et a érigé au rang d'oeuvres d'art des objets de consommations courante.

C'est pourquoi il est difficile aujourd'hui de comprendre le sens véhiculé par les oeuvres d'art ; une définition appropriée fournissant des clés d'interprétation étant nécessaire.

Qu'est-ce qu'une oeuvre d'art aujourd'hui, comment a-t-elle été redéfinie ? Comment donner du sens à une oeuvre d'art ? I. Peut-on définir l'art et le comprendre selon des critères esthétiques ? Le sens de l'oeuvre réside-t-il dans sa beauté ? Cette idée concorderait avec la notion classique de « beaux arts ».

Platon[3] soutient qu'il existe un « Beau » universel qui donne sa beauté aux choses et dont l'art serait le meilleur moyen de s'approcher : « Une réalité qui n'est pas soumise au changement, qui ne naît ni ne périt, qui ne croît ni ne décroît, une réalité qui n'est pas belle par un côté et laide par un autre, belle sous un certain rapport et laide sous un autre, belle ici et laide ailleurs, belle pour certains et laide pour d'autres.

Et cette beauté ne lui apparaîtra pas davantage comme un visage, comme des mains ou comme quoi que ce soit d'autre qui ressortisse au corps, ni même comme un discours ou comme une connaissance certaine; elle ne sera pas non plus, je suppose, située dans un être différent d'elle-même, par exemple dans un vivant, dans la terre ou dans le ciel, ou dans n'importe quoi d'autre.

Non, elle lui apparaîtra en elle-même et pour elle même, perpétuellement unie à elle-même dans l'unicité de son aspect, alors que toutes les autres choses qui sont belles participent de cette Beauté d'une manière telle que ni leur naissance ni leur mort ne l'accroît ni ne la diminue en rien, et ne produit aucun effet sur elle ». II. Serait-ce la nature d'un discours tenu à propos d'un objet qui constitue son sens et sa qualité d'oeuvre d'art ? L'art contemporain a intégré l'objet technique, utile, fonctionnel, l'objet reproduit en nombreux exemplaires identiques, il a intégré l'objet et a dé-sublimé l'art dans le même mouvement.

Or, l'objet utile n'est pas nécessairement beau, loin s'en faut ; il peut pourtant constituer une oeuvre d'art.

Pour qu'un artiste érige un objet au rang d'oeuvre d'art, aujourd'hui, il suffit qu'il y attache un concept original.

L'artiste devient alors le créateur d'un concept ayant un quelconque support matériel.

L'originalité et la subjectivité du critique d'art sont devenus les critères d'« admirabilité » de l'oeuvre d'art.

Par exemple : l'oeuvre d'art en est une et a du sens dans la mesure où elle est chère et/ou originale.

De l'idéalisme, nous sommes passés à un dangereux relativisme. III. L'oeuvre d'art acquiert un sens dans la mesure où elle est l'expression d'une expérience vitale, l'oeuvre d'art est le témoignage pertinent d'un vécu.

Elle représente le vécu affectif de l'artiste, prenons l'exemple du ressenti de Kandinsky face au tableau La Vieille Ville de Rothenburg-obder-Tauber : « Dans ce tableau encore, écrit Kandinsky, j'étais à vrai dire en quête d'une certaine heure qui était et qui reste la plus belle heure du jour à Moscou.

Le soleil est déjà bas et a atteint sa plus grande force celle qu'il a cherchée tout le jour, à laquelle il a aspiré tout le jour.

Ce spectacle n'est pas de longue durée : encore quelques minutes et la lumière du soleil deviendra rougeâtre d'effort, toujours. »

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