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Que pensez-vous de l'âme des bêtes?

Extrait du document

« A.

Préparation.

— En jetant sur ce sujet un simple coup d'oeil, je remarque que l'on me demande : que pensezvous? On fait donc appel à mon jugement, on me convie à dire et à justifier une opinion.

Je répondrai à la question dans l'esprit même où elle est posée, c'est-à-dire de la façon la plus personnelle qu'il me sera possible. Mais, par-dessus tout, je rassemblerai mes souvenirs, je ferai appel à tout ce qu'ont pu laisser dans ma mémoire les observations que, comme tout le monde, j'ai faites sur les animaux.

Je me pose cette question : Quelles manifestations de conscience ai-je remarquées chez les bêtes de toute espèce que j'ai vues et pu observer? Je note indistinctement tous tes faits à mesure qu'ils se présentent à ma pensée; me réservant de les classer quand je ferai le plan. B.

Composition.

— La division du sujet m'est imposée par la classification des phénomènes psychologiques.

Je devrai étudier successivement les manifestations de la sensibilité, de l'intelligence et de l'activité animales.

Dans chaque section, il y aura lieu de faire les subdivisions que les psychologues ont reconnues nécessaires, savoir : sensibilité physique et morale; intelligence intuitive, discursive, raison; activité automatique et volontaire; enfin : personnalité.

La conclusion, résumé de toutes ces parties, présentera le tableau des facultés et opérations des animaux. Introduction.

Les inductions les plus légitimes nous permettent d'affirmer, contrairement à l'opinion des cartésiens, que l'animal est conscient. 1.

Sensibilité animale.

A.

Physique, les sens.

B.

Morale, les sentiments. 2.

Intelligence animale.

A.

Intuitive, perceptions, associations (très puissantes, y insister), mémoire, images, rêves.

B.

Discursive.

Peu de traces; abstraction tout au plus élémentaire; généralisation remplacée par images composites; rudiments de raisonnements chez les animaux les plus élevés.

C.

Raison pure; question controversée; à parler sans parti pris, il est difficile de constater chez les animaux l'existence des deux notions corrélatives de contingence et nécessité. 3.

Activité animale.

A.

Automatique, très développée : instincts, habitudes (Insister).

B.

Volontaire, comme pour la raison, difficile à établir. Conclusion.

Prédominance de l'automatisme.

Il ne semble pas que l'animal possède une puissance de synthèse psychique suffisante pour s'élever jusqu'à la notion de personnalité. C.

Développement.

— Citer brièvement et avec le plus de précision possible, les faits sur lesquels on s'appuie. Éviter le danger, imminent dans cette dissertation, de conter des anecdotes et de faire de la littérature à propos de l'esprit des bêtes; ne pas composer des scènes, des tableaux de genre; oublier, s'il se peut, qu'on connaît les fables de La Fontaine.

Ne pas donner dans le genre sentimental, surtout ne pas raconter l'histoire du chien qui va mourir sur la tombe de son maître.

Être simple, sobre, précis. Enfin, interpréter les faits en toute liberté, et, ainsi que le comporte la question, dire ce que l'on pense, en le fondant sur ce que l'on sait. DOCUMENT Enfin il n'y a aucune de nos actions extérieures qui puisse assurer ceux qui les examinent que notre corps n'est pas seulement une machine qui se remue de soi-même, mais qu'il y a aussi en lui une âme qui a des pensées, excepté les paroles, ou autres signes faits à propos des sujets qui se présentent, sans se rapporter à aucune passion.

Je dis les paroles, ou autres signes, parce que les muets se servent de signes en mêmes façon que nous de la voix ; et que ces signes soient à propos, pour exclure celui des fous, qui ne laisse pas d'être à propos des sujets qui se présentent, bien qu'il ne suive pas la raison ; et j'ajoute que ces paroles ou signes ne se doivent rapporter à aucune passion, pour exclure non seulement les cris de joie ou de tristesse, et semblables, mais aussi tout ce qui peut être enseigné par artifice aux animaux ; car si on apprend à une pie à dire bonjour à sa maîtresse, lorsqu'elle la voit arriver, ce ne peut être qu'en faisant de la prolation de cette parole devienne le mouvement de quelqu'une de ses passions ; à savoir, ce sera un mouvement de l'espérance qu'elle a de manger, si l'on a toujours accoutumé de lui donner quelque friandise lorsqu'elle l'a dit ; et ainsi toutes les choses qu'on fait faire aux chiens, aux chevaux et aux singes, ne sont que des mouvements de leur crainte de leur espérance, ou de leur joie, en sorte qu'ils les peuvent faire sans aucune pensée.

Or il est, ce me semble, fort remarquable que la parole, étant ainsi définie, ne convient qu'à l'homme seul.

Car, bien que Montaigne et Charron aient dit qu'il y a plus de différence d'homme à homme, que d'homme à bête, il ne s'est toutefois jamais trouvé aucune bête si parfaite, qu'elle ait usé de quelque signe, pour faire entendre à d'autres animaux quelque chose qui n'eût point de rapport à ses passions ; et il n'y a point d'homme si imparfait, qu'il n'en use ; en sorte que ceux qui sont sourds et muets, inventent des signes particuliers, par lesquels ils expriment leurs pensées.

Ce qui me semble un très fort argument pour prouver que ce qui fait que les bêtes ne parlent point comme nous, est qu'elles n'ont aucune pensée, et non point que les organes leur manquent.

Et on ne peut dire qu'elles parlent entre elles, mais que nous ne les entendons pas ; car comme les chiens et quelques autres animaux nous expriment leur passion, ils nous exprimeraient aussi bien leurs pensées, s'ils en avaient...Je sais bien que les bêtes font beaucoup de choses mieux que nous, mais je ne m'en étonne pas; car cela même sert à prouver qu'elles agissent naturellement. »

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