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Qu'admire-t-on dans une oeuvre d'art ?

Extrait du document

« On admire dans une œuvre d'art ce qui la différencie des objets ordinaires, par là il y a un ensemble de procédés, de techniques qui ne retrouvent nulle part ailleurs.

On admire la parfaite maîtrise technique de l'artiste, son savoir-faire, ses capacités créatrices.

On admire la beauté de l'œuvre, on y admire l'expression de la subjectivité de l'artiste, et aussi la sacralité qui peut se dégager d'une œuvre d'art, sacralité qui peut être d'ordre religieuse ou profane. On peut admirer en elle son grand âge, ce qu'elle représente pour un ensemble de personnes d'un point de vue historique ou social.

Il y a une intrication de raisons internes et externes à l'œuvre qui nous pousse à l'admirer.

Face à un pur sentiment face à une œuvre, il s'agit de trouver des raisons rationnelles et légitimes à l'admiration. 1) L'œuvre d'art inspire l'admiration car elle a une certaine sacralité. On ne peut ramener tout le sacré à l'être en tant que tel.

L'expression de l'intelligible dans le sensible ne peut suffire à faire de l'œuvre d'art quelque chose de sacré.

Heidegger pense que l'œuvre d'art est dévoilement de la vérité de la chose.

L'œuvre installe un monde, ce n'est pas elle qui est installée.

L'œuvre rayonne, elle a une aura.

Ce qui enlève le sacré de l'œuvre d'art, c'est « l'ici et le maintenant » de la véritable présence de l'œuvre d'art.

Il se fait souvent un silence quasi religieux face à une œuvre d'art digne de ce nom.

A l'exemple du romantisme qui a voulu rénover le sentiment religieux, la peinture de C aspar David Friedrich, Le retable de Tetschen, peinture de paysage représentant un C hrist sur une montagne éclairée par le soleil Une œuvre d'art ne mérite pas un discours mais une prière car la contemplation d'une peinture élève notre âme vers Dieu.

La contemplation esthétique est une expérience intime d'union avec l'esprit du C réateur.

Cette pensée qu'on pourrait appliquée au Retable exprime ce désir d'union de la nature, de l'art et de la religion en vue d'une certaine totalité.

On admire donc dans l'œuvre d'art cette capacité de l'artiste à exprimer la sacralité, à exprimer le divin, et la puissance spirituelle qui se dégage des œuvres d'art par le simple emploi de techniques pourtant purement matérielles. Heidegger: Le rapport de l'art et de la vérité Heidegger a posé la question de l'origine de l'oeuvre d'art : celle-ci est avant tout une chose.

Une peinture est avant tout un tableau, présenté d'exposition en exposition, ou siégeant dans un musée.

Mais Heidegger distingue trois types de choses : la chose naturelle, l'outil (défini par son utilité) et l'oeuvre.

A ristote a montré qu'une chose se compose d'une matière (hylè) qui reçoit une forme (morphé, eidos).

Par sa matière, l'oeuvre d'art est donc une chose comme toutes les autres.

Cependant, dans un objet utilitaire, la forme de la chose détermine le choix de sa matière : ainsi, pour fabriquer une enclume, on choisira un acier dur, capable de supporter les chocs et la chaleur.

Or on interprète en général les choses naturelles et les oeuvres d'art à partir de la fabrication des outils, par anthropomorphisme.

L'homme se définissant comme fabricateur d'outils, il étend cette pratique et son processus à l'ensemble de l'étant, soit à la totalité des choses, de la même manière que l'on conçoit Dieu comme un créateur ex-nihilo, qui aurait tiré le monde du néant pour lui donner l'être par son travail.

Or, l'artiste ne fabrique pas des oeuvres d'art comme l'artisan fabrique des outils.

L'oeuvre d'art révèle la vérité des choses qu'elle représente.

Bien loin d'être une imitation, elle dévoile l'essence de l'être qu'elle produit au sens non technique du terme : une production (poiesis) qui trouve sa propre finalité en elle-même, qui dévoile ou laisse apparaître ce qui était caché, latent.

"C'est poétiquement que l'homme habite cette terre [...] et ce qui demeure est instauré par les poètes." 2) On admire l'importance de certaines œuvres pour le lien social. En reprenant les catégories d'A loïs Riegl dans Le culte moderne des monuments, il existe trois valeur que l'on peut accordé à l'œuvre d'art : la valeur de remémoration qui est intentionnelle (c'est-à-dire, que c'est une œuvre qui commémore en particulier un événement historique), la valeur historique qui témoigne d'une époque passée (une œuvre qui symbolise particulièrement une époque qui a disparu).

Enfin la valeur d'ancienneté qui se traduit par une certaine patine et usure qui parle à l'homme d'une manière universelle.

La valeur d'ancienneté a un rapport avec l'existence de chacun et offre la possibilité de fonder un rapport affectif au monde.

C e rapport existentiel se perd avec le cinéma et la photographie.

Les dimensions du souvenir et de la durée se trouvent perdues par cette technique.

L'homme doit donc retrouver cette dimension du passé et sa valeur cultuelle.

Benjamin souhaite regagner ce rapport poétique au passé et redonner à la matière son aspect magique.

Le passé ne peut se retrouver que dans l'objet vieilli, qui a subi les épreuves du temps.

Ce passé à dimension existentielle doit se perpétuer d'une manière quasi-corporelle dans l'homme.

Les valeurs qu'évoque l'historien de l'art allemand sont la traduction même de ce qu'est l'admiration, ces valeurs en sont le contenu, on admire donc la persistance d'une époque révolue dans une œuvre d'art, sa patine, son pouvoir de rassembler les peuples et les individus. 3) Des facteurs d'admiration externes à l'œuvre d'art. L'œuvre, c'est cet objet qui s'offre à vous, achevé, massif, durable ; même à l'état de ruine ou de fragment, cet objet est encore une œuvre, et la patine du temps, la sédimentation sur lui des regards et des lectures lui donnent André Malraux l'a bien montré une présence encore plus impérieuse, plus émouvante, plus vénérable L'œuvre d'art authentique, c'est celle qui est reconnue comme telle, et qui mérite à son créateur d'être reconnu comme artiste.

Reconnus, l'un et l'autre, par l'opinion générale, elle-même orientée par le jugement de ceux qu'A ristote appelait les experts, que la sociologie contemporaine désigne, dans le champ culturel, comme instance légitime de légitimation (P.

Bourdieu).

Il faudra du temps pour que ce jugement soit contesté en dehors même du champ culturel, et autrement que dans les disputes académiques auxquelles se complaisent les instances légitimantes.

On restera donc pour le moment dans l'optique de la tradition : cette œuvre, si le consensus la consacre et la porte à travers l'histoire, c'est qu'elle est exemplairement une œuvre.

On se demandera pourquoi une œuvre est reconnue comme œuvre d'art, et parfois même donnée en exemple.

Sans doute parce qu'elle a subi victorieusement l'épreuve de la critique : elle satisfait aux normes qui prévalent, et qui constituent les critères de la beauté, car l'idée de beauté est encore une idée normative.

C es règles, ce sont les experts – académiciens, chefs d'école, princes – qui les instaurent du haut de leur fauteuil ou de leur trône.

Mais pas arbitrairement : ces experts qui orientent l'opinion du public sont eux-mêmes orientés par elle ; plus exactement, ils sont sensibles au système des valeurs qui règne dans leur société et qui spécifie sa vision du monde, son épistèmè et son éthos, autrement dit son idéologie.

C ar les valeurs esthétiques s'inscrivent dans un système plus large auquel elles s'accordent, surtout dans les sociétés où l'art est spontanément le moyen d'initier et d'intégrer l'individu à la culture.

Il se peut donc qu'on admire une œuvre d'art car elle a été reconnue comme telle, sans qu'on sache réellement pourquoi on le fait.

On admire parce que notre éducation culturelle nous dit d'admirer cette œuvre en particulier, le reste du discours qu'on porte sur elle ne serait qu'une justification secondaire.

Il est difficile de se forger sa propre opinion sur les œuvres d'art et de savoir pourquoi on l'admire sans entrer dans un discours culturel renseigné.

La construction social du sentiment esthétique rend difficile cette question. Conclusion. On admire dans l'œuvre d'art à la fois des aspects purement technique de l'artiste, son travail, sa créativité, mais l'essentiel reste du domaine spirituel et historique, on admire le fait qu'un objet ait résisté au temps qui passe, mais aussi pour des raisons social.

C ertaines œuvres d'art sont devenues de véritables attractions comme la Joconde au Louvre.

On admire presque l'admiration qui se fait autour de cet œuvre.

L'émulation sociale autour d'œuvre est y pour beaucoup dans l'admiration qu'on peut y porter.

P arfois l'œuvre même n' y est pour peu de chose.. »

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