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Puis-je échanger ce qu'il ne m'appartient pas ?

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« Ce qu'il ne m'appartient pas, c'est dont je ne suis pas le propriétaire.

Quand quelque chose appartient à quelqu'un, elle est sa propriété.

Du point de vue métaphysique, la propriété est le propre de, au sens de qualité principale ou d'essence.

En un troisième sens, appartenir à revient à faire partie d'un ensemble.

Dès lors, échanger ce qu'il ne m'appartient ne se limite plus à un sens purement matériel, matérialiste.

Échanger, c'est donner une chose et en recevoir une autre en contrepartie.

L'échange implique donc une certaine réciprocité. Problème : Échanger ce qu'il ne m'appartient pas, cela revient-il à un simple rapport entre deux personnes échangeant des biens, ou au contraire, ce qui est en jeu dans l'échange de ce qu'il ne m'appartient pas est-il hautement politique et éthique ? En d'autres termes, l'échange de ce qu'il ne m'appartient pas, cela relève-t-il de la sphère privée ou publique ? 1 – Positionnement du problème (le point de vue individuel) - Qu'est-ce qui m'appartient ? Du point de vue métaphysique, cinq éléments intègrent l'essence de l'homme.

Ils sont donc la propriété (au double sens du terme : le propre de / ce qui lui appartient) de l'homme. * Le cogito et le fait d'avoir des pensées diverses.

Descartes démontre dans la seconde méditation que seul le moi pensant demeure après avoir appliqué le doute méthodique.

Moi pensant qui est simultanément une existence.

D'où la possibilité d'avoir des pensées divers. * L'exigence d'avoir un corps.

Le cogito implique qu'il ne saurait d'existence sans corps.

Le corps est la demeure du moi en tant qu'il me rend présent au présent. * Toutes mes perceptions changeantes.

Dans la mesure où le moi pensant vit dans le monde sensible, il perçoit une infinité de données différentes.

De même, si je regarde un objet sous différents angles, je le perçois toujours différemment.

Toutes ces données sont mes perceptions changeantes. * Le monde entier comme perçu.

Je perçois le monde en tant qu'il se donne à moi de manière fragmenté : il ne se donne jamais entièrement à moi mais le peu que j'en perçois constitue tout le monde.

De plus, le monde s'offre à moi dans le langage, dans une certaine langue donnée.

Je ne perçois jamais entièrement le monde mais par le langage et la perception, la partie englobe le tout. * La liberté.

Selon Rousseau, ce qui distingue l'homme de l'animal, c'est la liberté.

C'est elle qui fait entrer l'homme dans la métaphysique et dans la sphère du symbolique.

La liberté est ce cas limites où elle est la propriété de l'homme en tant que qualité principale et elle fait partie intégrante de son essence.

Qualité et essence sont confondues. Ce qui m'appartient est donc ce dont je peux disposer librement. - Qu'est-ce qui ne m'appartient pas ? Ce qui ne m'appartient pas est ce dont je ne peux disposer librement : autrui et ses pensées, autrui et sa vie.

Comme l'écrit Sartre, une manière perverse de contrôler autrui est de l'objectiver et le considérer comme un objet.

Mais ce mécanisme n'intervient qu'une fois que l'on a compris qu'autrui ne m'appartient pas. Pour ce qui est de l'ordre de l'impalpable, les Idées, les formes a priori de la pensée (le temps et l'espace), l'art, autrement dit, le monde intelligible et tous les ponts qui nous amènent n'appartiennent pas à l'homme en propre.

Le transcendant ne m'appartient pas car il ne dépend pas de moi. 2 – Ce qui ne m'appartient pas est-il échangeable ? - Pouvons-nous ne vivre qu'avec ce qui nous appartient ? Dans la tradition épicurienne, vivre avec qui nous appartient, c'est vivre avec ce que l'on a : les légumes et les fruits de son jardin, le plaisir de penser et de discuter avec ses amis. Mais si nous ne vivons, littéralement, qu'avec ce qui nous appartient, nous nous condamnons alors au solipsisme le plus radical, un état de solitude où seul le moi pensant se pose comme unique réalité et tout autre réalité est mise en suspens voire dissoute.

Seul l'animal vit avec ce qui lui appartient.

Les Cyniques, du grec qui signifie chien, vivent comme des animaux.

Diogène vit dans un tonneau, s'habille avec un manteau grossier et marche pieds nus.

Mais Diogène est sans doute le seul philosophe à n'avoir vécu aussi radicalement qu'avec ce qui lui appartenait. - Qu'est-ce que la politique ? Quelle valeur a ce qu'il ne m'appartient pas ? Nous ne vivons jamais qu'avec ce qui nous appartient.

Nous vivons au contraire la plupart du temps qu'avec ce qui ne nous appartient pas.

Ce qui n'exclue pas l'usage de la force et la pratique du droit du plus fort.

Tel est le point de départ de la critique rousseauiste : nous sommes tous aliénés à nous-mêmes, nous vivons tellement avec ce qui ne nous appartient pas que nous en avons oublié jusqu'à notre propre identité, notre essence propre.

L'Etat devra donc régir ce qui ne m'appartient pas afin d'assurer la sécurité de chacun et la liberté de tous.

Un échange se met en place. 3 – Conséquences éthico politiques. - Le collectif, garant de l'individuel.

Le contrat social.

Rousseau propose à tous les citoyens un échange : afin que sa propre liberté soit garantie, il sera nécessaire d'échanger ses droits naturels contre la liberté que nous procurera la société politique.

Tels sont les termes du pacte social.

Rousseau propose donc d'échanger ce qui ne m'appartient pas (mes droits naturels et l'usage de la force), contre ce qui m'appartient de droit : ma liberté.

À l'essence métaphysique de l'homme qu'est la liberté, Rousseau lui adjoint la liberté en tant que propriété politique. - L'individuel, garant du collectif.

La pensée de la liberté politique telle que la conçoit Rousseau est renforcée par la pensée de l'éthique.

Lévinas fait de l'éthique le lieu même d'un échange et de la responsabilité.

Le Visage d'Autrui me prescrit de me porter responsable pour l'Autre et tous les Autres de l'humanité.

La responsabilité de l'Autre m'incombe comme responsabilité de l'humanité tout entière.

Il y a bien échange, non pas au sens de donner pour recevoir une contrepartie, mais au sens d'une réciprocité.

Je suis responsable d'autrui comme autrui est responsable pour moi. Autrui ne m'appartient pourtant pas, mais la responsabilité d'autrui, elle, m'appartient. Conclusion Ce qui se joue ici, c'est la portée politique et éthique de la question car elle ne réduit pas le sujet au cogito ni à un simple corps.

Elle ouvre au contraire le moi à autrui.

Elle adjoint au cogito non pas le solipsisme mais l'altruisme.

Se porter garant pour autrui, même si je ne le connais pas, c'est assumer la responsabilité d'autrui et de tous les autres.. »

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