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Platon: La condamnation de l'art

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Ce texte capital concerne le problème de la mimèsis ; par la médiation de Socrate, Platon y soutient que l'art, apparence d'apparence, n'est très précisément, rien. Cette condamnation philosophique de l'art est ontologique : l'apparence est une illusion sans substance ou sans réalité, un néant ; elle est épistémologique : l'omniscience de l'imitateur qui prétend tout imiter ne repose sur aucune science ; elle est morale : « chacun ne peut pratiquer qu'un métier » (394 e) et prétendre les pratiquer tous est non seulement une duperie mais une « injustice » au sens platonicien : la Justice est la vertu hors pair qui maintient toute chose (hommes et puissances de l'âme) dans sa position propre, or, dans sa polytechnicité, l'imitation ouvre l'errance sans fin de la perte du propre ou de l'identité et, avec elle, le risque de la folie (cf. 396 b).

« Thème 90 Platon: La condamnation de l'art La philosophie de l'art commence avec Platon par une condamnation.

Il faut renvoyer les poètes hors des murs de la Cité.

Socrate rejette les discours écrits pour privilégier la parole, et la peinture n'est tenue que pour une imitation dégradée et inférieure d'une réalité par ailleurs déjà imitée des Idées.

Par ailleurs, poésie, peinture et musique ne sont pas sensées exprimer la beauté.

Si l'art est condamnable, c'est qu'il est fondé sur la mimêsis, l'imitation.

Les choses sont, et elles sont ce qu'elles sont par l'Idée qu'elles incarnent, qu'elles matérialisent.

L'Idée est l'essence ou l'être vrai de chaque chose. L'artisan fabrique des ustensiles en vue d'une Idée, il imite le modèle idéal pour en faire une chose.

Pour tout produire de la sorte, il suffirait de promener un miroir tout autour de nous pour restituer l'image exacte des choses.

La "production" artistique se dit poiein : rendre présent.

Le tableau est un miroir, il ne produit pas les choses dans leur être mais dans leur apparence.

L'artisan quant à lui ne produit pas non plus l'être véritable qui est l'Idée, mais un analogon.

Il y a donc trois degrés à considérer : l'Idée, vraie, naturelle, unique, immuable, parfaite et identique à soi ; les choses ou les objets fabriqués par l'artisan, demiourgos qui incarne l'Idée en de multiples exemplaires ; la peinture des choses qui les reproduit dans leur apparence.

L'artiste est donc plus éloigné de la vérité que l'artisan.

L'art est une imitation du réel, non pas en ce qu'il est, mais en ce qu'il apparaît.

Il n'est capable de produire que des simulacres ou des idoles. "Cet artisan dont je parle n'est pas seulement capable de faire toutes sortes de meubles, mais il produit encore tout ce qui pousse de la terre [...], tout ce qu'il y a dans le ciel, et tout ce qu'il y a sous la terre, dans l'Hadès.

Voilà un sophiste tout à fait merveilleux l [...] Si tu veux prendre un miroir et le présenter de tous côtés ; tu feras vite le soleil et les astres du ciel, la terre, toimême, et tous les êtres vivants, et les meubles, et les plantes, et tout ce dont nous parlions à l'instant. Oui mais ce seront des apparences et non des réalités [...] Mais tu me diras, je pense que ce que fait [le peintre, plus que tous les artisans] n'a point de réalité, n'est-ce pas ? et pourtant, d'une certaine manière, le peintre lui aussi fait un lit.

Ou bien non ? Si, répondit-il, du moins un lit apparent. Et le menuisier ? N'as-tu pas dit tout à l'heure qu'il ne faisait point la Forme (eidos), ou, d'après nous, ce qui est le lit, mais un lit particulier ? Je l'ai dit en effet. Or donc, s'il ne fait point ce qui est, il ne fait point l'objet réel, mais un objet qui ressemble à ce dernier, sans en avoir la réalité [...] Maintenant, considère ce point : lequel de ces deux buts se propose la peinture relativement à chaque objet : est-ce de représenter ce qui est tel qu'il est, ou ce qui paraît, tel qu'il paraît ? Estelle l'imitation de l'apparence ou de la réalité ? De l'apparence. L'imitation est donc loin du vrai, et si elle façonne tous les objets, c'est, semble-t-il, parce qu'elle ne touche qu'à une petite partie de chacun, laquelle n'est d'ailleurs qu'un simulacre (eidôlon )... Lorsque quelqu'un vient nous annoncer qu'il a trouvé un homme instruit de tous les métiers, qui connaît tout ce que chacun connaît dans sa partie [...], il faut lui répondre qu'il est un naïf, et qu'apparemment il a rencontré un charlatan et un imitateur.

" PLATON Ce texte capital concerne le problème de la mimèsis ; par la médiation de Socrate, Platon y soutient que l'art, apparence d'apparence, n'est très précisément, rien. Cette condamnation philosophique de l'art est ontologique : l'apparence est une illusion sans substance ou sans réalité, un néant ; elle est épistémologique : l'omniscience de l'imitateur qui prétend tout imiter ne repose sur aucune science ; elle est morale : « chacun ne peut pratiquer qu'un métier » (394 e) et prétendre les pratiquer tous est non seulement une duperie mais une « injustice » au sens platonicien : la Justice est la vertu hors pair qui maintient toute chose (hommes et puissances de l'âme) dans sa position propre, or, dans sa polytechnicité, l'imitation ouvre l'errance sans fin de la perte du propre ou de l'identité et, avec elle, le risque de la folie (cf.

396 b). En effet l'imitateur produit non pas simplement une image, une icône (eikôn) qui respecte les proportions de son modèle (comme l'art égyptien, dont parle Platon dans Les Lois, qui utilisait le procédé de la mise en carré) mais un fantôme (phantasma), un simulacre (eidolon) ou une « idole » qui se substitue au modèle et le fait oublier.

C'est ce que font ces imitateurs que sont les peintres réalistes, les seuls que Platon condamne : ce sont des « skiagraphes », des peintres d'ombres (skiai) qui utilisent le raccourci, le modelé et la perspective.

Comme Zeuxis qui avec ses raisins en peinture trompait les pigeons, et tous les peintres décadents qu'allait connaître la Grèce hellénistique, ce sont des experts en trompe l'oeil.

Dans Le Sophiste Platon opposera à l'art de la copie (eikastique), l'art du simulacre (phantastique) qui produit des simulacres trompeurs analogues à ceux que produisent les « montreurs de marionnettes » (c'est-à-dire les. »

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