Aide en Philo

Peut-on exercer sa liberté sans prendre de risque ?

Extrait du document

« Il peut arriver que la liberté se fonde sur l'ignorance, faisant ainsi l'économie du savoir.

À travers le risque qu'elle implique, l'épreuve du doute et la notion de responsabilité qui en semblent indissociables, la liberté peut aussi représenter un fardeau dans l'existence.

Le jeu est un bon exemple de la liberté qui s'exprime au travers de la prise de risque. L'examen de la question de la liberté (et non des libertés, ce qui, nous le verrons, a son importance) et des risques éventuels qu'elle implique est l'une des plus importantes aux yeux de l'homme, car elle définit une ligne de conduite et un véritable choix.

Savoir si l'on peut être libre sans risque c'est, du même coup, examiner les conditions déterminantes de la liberté et voir en quoi la philosophie peut nous aider à y accéder.

D'autre part, cette question nous pousse à nous interroger pour savoir si la liberté au sein d'une société donnée peut constituer un danger non seulement pour l'homme mais aussi pour l'ordre social. Nous pouvons, dans un premier temps, remarquer combien le fait de parler d'une liberté est important. En effet, délayer la liberté dans une multitude de libertés comme nos sociétés contemporaines ont trop tendance à le faire, c'est, par là même, renoncer à toute liberté.

Car si tout est liberté, partout, plus rien ne l'est. Certes, la liberté se manifeste sous différentes formes, mais elle reste cohérente et ne s'éparpille pas au vent de l'idéologie dominante. Il nous faut maintenant, avant tout, examiner à quelles conditions la liberté peut apparaître. Il nous semble que la condition première et indispensable de l'acquisition de la liberté par un individu requiert qu'il soit un sujet conscient.

En outre, il faut que cette conscience se manifeste à travers une conscience de son rapport vécu à l'histoire, de telle sorte qu'il lui fasse apparaître les conditions inadéquates de celui-ci, et qu'il le détermine à agir. C'est pourquoi il nous semble important de souligner que la liberté ne se manifeste qu'à travers l'action et qu'elle consiste, à l'instar des sciences, à avoir prise sur le réel et à modifier l'ordre du réel. En ce sens la liberté se constitue toujours contre quelque chose ou quelqu'un et, à l'image du progrès, n'est possible qu'en déjouant des pièges et en abattant des obstacles. C'est pourquoi nous pouvons définir dans un premier temps la liberté comme la conscience d'un rapport vécu inadéquat à l'histoire et, par conséquent, la détermination à agir afin de modifier l'ordre du réel insatisfaisant. Voyons en quoi elle peut comporter certains risques. Il nous semble tout d'abord important de souligner que cette question s'est en premier lieu posée à Platon à travers La République. Il s'est interrogé sur la possibilité d'établir une cité idéale garantissant à chacun la liberté et l'ordre social. La première remarque que nous inspire sa conception est que Platon, comme plus tard Hobbes, Locke, Hume, Rousseau, insiste sur le fait que la liberté se contracte, qu'elle est établie par un contrat social accepté par les différentes parties en présence. D'autre part, de la république platonicienne, il nous semble important de retenir que la cité s'est établie afin d'assurer la protection d'un petit nombre d'individus, protection aussi bien militaire que sociale.

La question de la liberté y est alors en plein coeur, en ce sens que chacun s'est résolu à renoncer à sa liberté individuelle pour se soumettre à celle imposée par le groupe. C'est pourquoi la cité idéale proposée par Platon inhibe toute initiative personnelle, toute liberté individuelle. Ou bien le sujet se soumet aux « lois » (qui n'ont rien de juridique) de la cité et accepte la liberté proposée, c'està-dire la garantie de ses « droits », auquel cas il ne « prend aucun risque », ou bien il se détermine à agir en voulant assumer sa liberté personnelle, auquel cas il s'expose à de violentes représailles et à de grands risques, allant de l'exil à la mort. C'est donc en ces termes que la question de la liberté est posée chez Platon. Il en est de même avec Hobbes.

L'auteur du Léviathan montre que la question de la liberté se pose sous la forme d'un contrat social accepté par les différentes parties en présence et garanti par un troisième homme, le prince. La question de la liberté revêt ici une forme purement militaire, en ce sens que la cité alors établie se doit d'assumer la défense du citoyen contre l'envahisseur (« Homo homini lupus »).

Les citoyens s'engageant, en contrepartie, à respecter la liberté accordée par le prince, c'est-à-dire la seule liberté de vivre. Désirer alors assumer seul sa liberté, c'est s'exposer du même coup à un grand risque car, en prenant conscience de son rapport inadéquat vécu à l'histoire et en se déterminant à agir contre le prince, on se constitue ainsi contre l'État et on s'expose alors à la violence. Aussi la liberté revêt-elle deux formes antithétiques : ou bien l'acceptation de l'ordre établi et la soumission au « souverain », ou bien la volonté de se soustraire à l'ordre social et, dans ce cas, c'est s'attirer les foudres du souverain et s'exposer à la tyrannie. Cette idée de l'établissement d'un ordre social garantissant la liberté (donc en fait les « droits ») de chacun pourvu qu'il contracte, hante le XVIIIe siècle et en particulier l'oeuvre de Rousseau dans laquelle cette question est posée et analysée avec beaucoup plus de profondeur que précédemment.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles