Aide en Philo

Peut on créer par habitude ?

Extrait du document

« Cette question sous-entend que l'art serait un processus routinier capable de faire émerger du nouveau et donc de la création artistique.

Or l'habitude et la création sont antinomiques, la création, c'est justement faire advenir dans la réalité une idée, une œuvre qui n'a pas de précédent.

L'artiste, en cela, a pour but la création, c'est-à-dire de faire advenir un regard inédit sur les choses, d'en montrer la beauté tout en rompant avec le quotidien et avec l'habitude.

Créer par habitude voudrait dire qu'on emploi des recettes toutes faites pour produire des œuvres.

La frontière entre la production artisanale et industrielle et l'art se retrouverait bien mince. 1) L'habitude comme source de création artistique. Si on comprend l'habitude comme un tradition, comme une coutume il va de soi que la production d'œuvre s'y trouve encourager.

On ne peut dénier l'existence d'un art primitif, d'un populaire qui est la matérialisation même des traditions.

Parfois elles n'ont pas évolué depuis des siècles, et ce qui fait la valeur de cet art à l'heure de l'industrialisation.

La parure de plumes du chef indien et la hache de silex de l'Australien, la pirogue du pêcheur mélanésien et la tente du cavalier turkmène ne sont plus tenues pour des trophées de guerre ou des curiosités d'explorateur, mais pour des œuvres valant en elles-mêmes et pour elles-mêmes, dignes d'être conservées et exposées au même titre que les produits les plus élaborés des civilisations exotiques.

Cet art est né de la pure répétition de rituel visant à la cohésion du groupe et à sa permanence dans le temps.

Ils sont le reflet de l'esprit d'un peuple.

C'est un art souvent anonyme, enseigné par la tradition orale.

C'est parfois l'isolement même de cet art par rapport aux grands changements qui fait sa force et son originalité.

L'art moderne aurait perdu cette humanité en devenant impersonnel, en ne se référant plus qu'à des codes géométriques. 2) L'art emploi d'autres procédés que la technique ou l'artisanat. Il s'agit de se demander si le travail opéré dans la création artistique peut ressembler à celui qui est réalisé dans le travail technique, est-ce que les mêmes procédés sont à l'œuvre, est-ce les mêmes matériaux ? Qu'est-ce qui différencie un tailleur de pierre d'un sculpteur ? Parfois le travail technique peut être inclus dans une œuvre d'art, ces mêmes tailleurs de pierre peuvent participer à la construction d'une cathédrale.

Les corps de métiers de l'artisanat peuvent participer ensemble à la construction d'un objet d'art.

Pour réaliser un meuble, il faut plusieurs corps de métier : marqueterie, ébénisterie, ferronnerie d'art etc.

Aussi les métiers techniques sont sollicités pour la création artistique.

On voit que la part de création peut apparaître diminuée à la vue de toutes les aides techniques. Bien sûr, cela apparaît comme une évidence dans l'architecture, les arts décoratifs, la sculpture, cela apparaît moins clair pour la peinture et complètement différent pour la littérature, la musique qui ne produisent pas quelque chose de matériel, qui ne font pas appel à des savoir-faire artisanaux.

On reconnaîtra l'art du reste des objets par les procédés qui ont été mis en place pour réaliser cet objet.

Il y a aura une création à l'origine de cet objet, une intention artistique visant à créer une émotion.

L'objet artistique sera bien souvent en dehors du circuit d'utilité des objets ordinaires.

On reconnaîtra une certaine facture, un savoir-faire, une certaine patine que ne possèdent pas les objets ordinaires.

L'art a une visée plus haute que la simple satisfaction des désirs, il a un but qui intéresse l'esprit.

Pour Hegel dans son Esthétique, L'art dégage la vérité des apparences et la doté d'une réalité plus haute crée par l'esprit lui-même.

L'objet existe pour lui-même.

La contemplation esthétique ne satisfait que des intérêts spirituels.

L'art est au milieu du sensible immédiat et de la pensée pure.. 2) Le regard artistique ou la suspension du jugement ordinaire. La phénoménologie est une méthode philosophique qui peut permettre de comprendre la manière dont un artiste regarde le monde qui l'entoure.

L' épochè phénoménologique a pour but de suspendre l'attitude naturelle de la vie de la conscience.

Il s'agit de mettre en parenthèse la thèse du monde pour accéder à son sens véritable.

Il ne s'agit pas de perdre le monde, mais de laisser concrètement de côté nos attitudes habituelles face à lui, nos croyances, préjugés, jugements scientifiques.

La conscience se place ainsi dans une attitude créatrice et non dans la limitation. Maurice Merleau-Ponty dans le Doute de Cézanne applique la phénoménologie à la création artistique.

Cézanne serait l'exemple d'une perception préréflexive, mais l'application du corps au monde sensible d'un contact direct avec les choses.

Il s'agit de chercher une représentation pure des choses qui mettrait au jour la structure du visible.

On parvient ainsi à l'architecture invisible du visible, à la révélation de l'essence des choses.

Mais n'est-ce pas là l'essence de l'art, de suspendre le regard habituel sur les choses ? N'est-ce pas le but de l'art de montrer l'intelligible dans le sensible. Conclusion. Si dans un contexte traditionnel, on comprend tout à fait qu'il faille que l'habitude régisse la création artistique comme dans l'Egypte ancienne, on ne peut accepter cette thèse dès que l'art s'émancipe du carcan traditionnel pour laisser place à la liberté de l'artiste.

Il ne faut pas non plus confondre l'habitude qui est du domaine de la routine avec le respect de canon artistique qui est parfois laissée à l'appréciation de l'artiste.

La création artistique réclame la rupture avec les modes de pensée habituelles, les gestes anodins pour ouvrir un espace inédit pour la conscience.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles