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Peut-on considérer les êtres vivants comme des choses ?

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« Introduction : Bien définir les termes du sujet : - " Peut-on" : la question porte aussi bien sur la possibilité que sur la légitimité de l'entreprise. - " Considérer comme " : l'emploi de ce terme indique que le sujet nous invite à envisager la possibilité que les vivants soient des choses, par un examen critique et attentif, qui établirait ou non la possibilité d'une comparaison avec les vivants.

. - " Etres vivants" : le terme "être" invite à considérer le vivant sous son aspect le plus large possible (il ne s'agit pas de le réduire à la biologie, sinon on aurait parlé d'organisme vivant).

L'être vivant est définit en général comme ce qui s'oppose aux choses physiques et aux objets artificiels, c'est un individu doué d'une autonomie relative à l'égard de son milieu.

Il possède des caractéristiques remarquables, comme l'autoréparation, l'invariance reproductive, l'organisation, la croissance, l'autoconservation… - "Chose" : terme le plus général par lequel on désigne tout ce qui existe, tout ce qui a une existence individuelle et concrète, et qui constitue un système fixe de qualités et de propriétés.

C'est un objet, et en général on exclut les êtres vivants de la définition, parce qu'ils ne sont pas inertes. Construction de la problématique : Avant toute réflexion, la réponse à la question que pose le sujet semble être évidente : non, il n'est pas possible de considérer les vivants comme des choses.

Mais si la question se pose tout de même, c'est bien parce qu'il est possible, sous un certain point de vue de considérer les choses autrement, et l'évidence ne vaut pas comme critère de vérité, elle n'explique rien. Se pose donc non seulement la question de savoir s'il est possible, légitime, et dans quelle mesure les vivants peuvent être considérer comme des choses, mais aussi qu'est-ce que ceux-ci possèdent de plus et qui n'est pas réductible à l'inerte ? I/ Les choses ne sont pas "animées" : Au premier abord, ce qui semble distinguer le vivant de la chose, c'est que l'un possède le mouvement autonome, et l'autre non.

Même ce qui semble se mouvoir seul, comme les pendules ou les fontaines on au départ besoin de l'homme pour exister et tirer leur premier mouvement.

Les vivants à l'inverse peuvent être eux-mêmes à l'origine de leur mouvement. ∙ C 'est de cette manière qu'Aristote distingue les vivants de ceux qui n'en sont pas.

En effet, ces derniers se caractérisent par l'âme qui est le principe interne de leur mouvement, et donc de la vie "l'âme est, pour le corps vivant, cause et principe." De Anima, II, 4.

à L'âme est la forme du corps naturel potentiellement vivant, elle est ce qui l'amène à sa réalisation, à savoir la vie.

L'âme est donc le principe du vivant, car elle est le principe de son mouvement. ∙ Ainsi, tout ce qui est vivant possède une âme, c'est-à-dire un principe lui permettant le mouvement et donc la vie (ne pas confondre avec la conception chrétienne de l'âme).

Les plantes ont une âme nutritive, c'est ce qui leur permet de se nourrir seules, les animaux ont une âme sensitive, c'est ce qui leur permet de recevoir un mouvement et d'en être affecté, et les hommes ont une âme rationnelle. C 'est donc parce qu'ils ont une âme qui leur permet le mouvement de leur propre chef que les êtres vivants ne peuvent pas être considérés comme des choses. II/ Il n'existe que deux catégories, les êtres doués de raison et les choses : Mais si on appelle les choses les choses, c'est certainement parce que ceux qui les désignent ainsi s'en distinguent.

Or, seuls les êtres doués de conscience ou de raison peuvent s'en éloigner, prendre de la distance par rapport à elles, et les désigner comme telles. ∙ Dans Critique de la faculté de juger, Kant commence tout d'abord par distinguer les choses des vivants en insistant sur les qualités propres de ces derniers.

Selon lui, tous les phénomènes de la nature ne peuvent pas s'expliquer grâce à des lois, et deux montres ensemble n'en feront jamais une troisième, un rouage ne sera pas remplacé seul, alors que cela peut être attendu d'un vivant.

Il possède en effet une force formatrice, et non pas uniquement une force motrice.

C'est-à-dire qu'il n'a pas besoin d'une première impulsion pour se mouvoir, et qu'il se produit lui-même. ∙ Mais cette réflexion ne l'empêche pas, sur le plan moral, de faire des animaux et des végétaux, des choses.

Cf. les Fondements de la métaphysique des mœurs 2ème section : " Les êtres dont l'existence dépend proprement non de notre volonté mais de la nature n'ont toutefois, si ce sont des êtres privés de raison, qu'une valeur relative, comme moyens, et c'est pourquoi on les appelles des choses.

" à Les vivants qui n'ont pas de raison ne peuvent pas s'élever à la hauteur de l'universel, et on de ce fait moins de dignité que ceux qui le peuvent (cf.

les hommes).

Ce sont des êtres qui font uniquement partie du monde sensible, ils n'ont en eux aucune autre dimension, et c'est en ce sens que l'on peut considérer qu'ils font partie des choses du monde. III/ Les vivants sont avant tout des vivants : Si d'un point de vue purement technique les vivants ne peuvent pas être assimilé à des choses, il n'en va pas de même sur le plan moral et juridique, où ils sont considérés comme des choses.

Mais pourtant, ils sont tout de même traversés par la vie, et ce seul fait devrait pouvoir les éloigner à jamais du rang des choses. ∙ C'est ce qu'explique Bergson dans l'Evolution créatrice.

" Trop souvent on raisonne sur les choses de la vie comme sur les modalités de la matière brute " Le vivant ne se comporte pas comme de la matière, il est traversé par le germe de la vie, par la durée.

Pour les choses, il y a une réversibilité du temps, le changement n'est qu'un arrangement ou un dérangement de parties qui n'influence pas les parties en elles-mêmes.

Il est donc toujours possible de revenir à l'ordre précédent, ce qui n'est pas le cas pour les vivants. - Cette irréversibilité du temps et cette absence de répétition est due au fait que le vivant s'inscrit dans la durée.

Les moments ne se succèdent pas les uns les autres, ils laissent une trace dans le vivant, et ces traces s'ajoutent pour former à chaque fois quelque chose de nouveau.

La durée et son corrélat la vie implique donc sans cesse la création, le changement, la mobilité des formes.

" Durée signifie invention, création de formes, élaboration continue de l'absolument nouveau." EC , I. Si le vivant ne peut absolument pas être considéré comme une chose, c'est parce qu'il est traversé par la vie.

Mais cette dernière est si difficilement saisissable, que l'on en fait souvent abstraction et que c'est ainsi que l'on compare le vivat aux choses.

On tente de ramener l'inexplicable et l'inconnu au connu, mais on le déforme. Conclusion : Les êtres vivants ne peuvent donc pas être considérés comme des choses, il est certes plus facile de les expliquer et de les saisir comme tels, mais cela ne prend pas en compte leur caractéristique principale, la vie.. »

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