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Peut-on connaître le vivant ?

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« [Introduction] Qu'est-ce que le vivant ? C'est d'abord la philosophie qui a tenté, depuis Aristote, de répondre à la question.

Depuis le XIX siècle, la biologie, en tant que science, a pris la relève, laissant espérer une authentique connaissance scientifique.

Mais les conditions de celle-ci sont-elles compatibles avec le vivant ? Après tout, il y a d'autres connaissances, pour l'homme, que la connaissance scientifique ; et si cette dernière est amenée à dénaturer le vivant pour le connaître, on peut recourir à des voies différentes. [I — Vitalisme et mécanisme] [A.

L'âme aristotélicienne] Qu'est-ce qui produit la spécificité du vivant ? En quoi l'animal vivant est-il différent de la matière brute ? Aristote croit pouvoir affirmer que c'est en raison de la présence de l'âme.

Si on ne tient pas compte de cette dernière, c'est-à-dire si l'on examine uniquement la forme extérieure d'un corps et sa structure, on en vient selon lui à confondre un homme vivant et un homme mort, puisque leurs formes sont bien semblables.

Ainsi le naturaliste doit-il connaître la nature de l'âme, et, dans l'étude de la nature, il faut insister davantage sur l'âme que sur la matière.

N'envisager que la matière, c'est ne voir que des effets sans cause, être comme un menuisier qui détaillerait ses gestes sans évoquer l'idée ou le projet qui dirige sa fabrication d'un lit. [B.

L'animal-machine] Affirmer de la sorte la présence de l'âme dans tout vivant n'est-il pas excessif ? Car le christianisme donne au mot « âme » un sens particulier.

Et Descartes, ne pouvant en reconnaître la présence dans les animaux, ne conçoit ces derniers que sur le modèle des machines, simplement plus complexes (puisqu'elles ont été créées par Dieu) que les machines élaborées par l'intelligence humaine.

Le seul vivant qui ne se ramène pas à une machine est l'être humain, précisément parce qu'il possède une double nature : corps et âme. [C.

La force formatrice] Réduire le vivant à un fonctionnement mécanique ne semble pas possible à Kant : il manque à une montre – considérée comme exemplaire de la machine – des qualités qui sont présentes dans le vivant : elle ne peut produire une autre montre (pas plus qu'un de ses rouages ne peut produire ou générer un autre rouage), elle est incapable de se réparer elle-même, ou d'améliorer son propre fonctionnement.

Ce qui oblige à distinguer la simple force motrice, bien présente dans la machine, de la force formatrice, qui est caractéristique des êtres organisés. La tentative cartésienne de connaître le vivant en l'intégrant dans le champ d'une discipline scientifique (la mécanique) est donc vaine : en fait, Descartes simplifie le vivant, le « dénature » en l'approchant à la façon d'un simple objet.

Toute tentative pour connaître le vivant par une méthode scientifique se retrouve-t-elle dans la même situation ? [II - Conditions de la connaissance scientifique] [A.

Les principes de l'expérimentation] En se précisant comme expérimentale, la science suppose que tout objet qu'elle entreprend de connaître est compatible avec l'expérimentation.

Celle-ci exige que le phénomène à étudier soit clairement isolable, mais aussi qu'il soit artificiellement (en laboratoire) reconstituable, pour que l'on puisse comparer ce qu'il devient lorsqu'on intervient sur sa cause supposée et le phénomène naturel.

Cf les quatre moments de l'expérience tels que les résume Claude Bernard (précisément un biologiste). [B.

Les difficultés de l'expérimentation en biologie] Cf.

Canguilhem : elles viennent de la spécificité, qui désigne le fait que l'expérience faite sur une espèce n'est pas généralisable à une autre sans de grandes précautions ; de l'individualisation des phénomènes, qui, même lorsqu'on expérimente sur des organismes animaux théoriquement semblables, risque d'aboutir à des artefacts ; de la totalité qui caractérise l'organisme comme intégrant toutes ses fonctions : on n'est jamais sûr, en isolant un phénomène, de ne pas modifier les autres ; de l'irréversibilité de la vie, qui fait que ce que l'on « découvre » peut ne concerner qu'un moment du développement de l'organisme (cf.

Claude Bernard : aucun animal n'est comparable à lui-même selon les moments où on l'examine). [C.

La réduction au physico-chimique] En étudiant le vivant d'un point de vue expérimental, on ne peut y rencontrer qu'un déterminisme physico-chimique : on n'agit en effet que sur la matière des corps.

En affirmant qu'un phénomène vital obéit, comme tout autre phénomène de la nature, à un déterminisme strict (affirmation qui conditionne le caractère scientifique de la biologie), on est obligé de concevoir ce déterminisme comme rigoureusement physico-chimique. Dès lors, on semble bien échouer à connaître le vivant en lui-même, dans ce qu'il a de particulier relativement à. »

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