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Peut-on concevoir une société sans mal ?

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« Le terme de société s'oppose à l'état naturel des rapports humains : elle correspond à l'organisation juridique de la société dans laquelle tous les rapports entre les individus sont définis et régis par la loi.

Dans la société civile, l'individu est défini comme un citoyen possédant des droits et des devoirs personnels prescrits par l'état. En parlant du « mal », nous parlons en vérité de deux réalités, de deux entités radicalement hétérogènes du point de vue de l'expérience qui en est faite.

En effet, dans ce terme, nous englobons deux types de maux : des maux subis et des maux commis à la fois.

Par maux soumis, nous désignons les maux dont nous faisons l'expérience, qui viennent nous heurter, nous affecter.

Mais par « mal », nous entendons également la souffrance tant morale que physique que nous commettons, et qui du point de vue d'autrui est un mal « subi ».

En dépit de cette dualité, il existe néanmoins une caractéristique commune de ces deux types de maux qui est la souffrance, puisque dans ces deux situations quelqu'un est affecté par cette dernière. Concevoir signifie d'abord former un concept, à savoir une représentation abstraite de quelque chose qui se traduit dans le langage.

Mais par delà ce sens restreint du terme, nous pouvons dire que concevoir, c'est aussi réaliser, faire aboutir une idée, réaliser quelque chose.

Ce sens est dérivé du terme vers lequel tend la conception intellectuelle, à savoir l'entrée dans le domaine du concret.

Il devient donc synonyme de « réaliser ».

Nous distinguerons donc au cours de ce travail entre une conception « intellectuelle » et une conception « réelle ». Si nous posons la question « Peut-on concevoir une société sans mal ? » nous demandons donc deux choses distinctes : d'une part, peut-on en former un concept, une représentation mentale ? ; d'autre part, peut-on la réaliser, la faire entrer dans le domaine de l'effectivité ? La question au centre de notre réflexion sera donc de déterminer s'il est possible de concevoir une société sans mal dans l'intellect aussi bien que dans les faits, et si la conception mentale d'une société sans mal est à même de faire disparaître ce dernier, en tout ou en partie, des sociétés bien réelles. I. a. Peut-on concevoir intellectuellement une société sans mal ? L'utopie, une conception intellectuelle d'une société sans mal A la question « peut-on concevoir une société sans mal ? » nous commencerons par répondre par l'affirmative.

En effet, tout un pan de l'histoire littéraire et philosophique s'est précisément attaché à concevoir une société idéale que l'on peut qualifier d'utopique.

En effet, l'Utopie de Thomas More est un exemple, en vérité le tout premier, de tentative pour concevoir une société où le mal aurait entièrement disparu.

Dans l'Utopie, c'est bien le mal, dans la dualité de ce terme, qui n'existe plus.

En effet, l'Utopie est non seulement à peu près dépourvue de maux commis, puisque la société décrite est régie harmonieusement et pourvue d'un très fort sentiment de fraternité entre ses membres.

Mais les maux subis y sont également absents, puisque toute description d'une société dans le monde idyllique de l'Utopie comprend une louange envers la santé et la bonne forme physique de ses habitants.

Si nous demandons « peut-on concevoir une société sans mal ? » la réponse semble déjà toute trouvée, puisque cette conception, intellectuelle, langagière, non incarnée dans les faits, existe dans les ouvrages appartenant au genre de l'Utopie inauguré par Thomas More. b. Le mal réapparait jusque dans les conceptions utopiques Cependant, est-il aussi certain qu'il le semble que le mal est absent des sociétés conçues par les ouvrages utopiques ? Le mal ne rôde-t-il pas derrière la prétendue harmonie sociale ? Dans Aline et Valcour, Sade montre bien que la société utopique de Tamoé est une société où rôde la tyrannie, car il n'y a aucun pouvoir politique qui ne soit pas autoritaire de manière larvée.

Le chef de cette société, Zamé, exerce un pouvoir absolu sur ses concitoyens, pratique une forme d'eugénisme et sa prétention à faire le bonheur collectif ne peut que contrarier les aspirations personnelles de certains membres de cette société.

Comme l'écrit Annie Lebrun à ce propos : « Ce qui vaut autant pour les systèmes politiques que pour les systèmes amoureux dans la mesure où on peut remarquer qu'au despotisme de Sarmiento correspond le libertinage noir de Blamont, qu'à l'utopie de Zamé correspond le sentiment vertueux d'Aline et de Valcour, qu'à l'anarchisme de Brigandos correspond la passion insoumise de Léonore.

Autant de conceptions amoureuses qui renvoient à trois attitudes devant le désir mais qui, toutes trois, ne sont que des modalités de la puissance du désir, comme les systèmes politiques évoqués renvoient, en deçà de leurs différences, à trois modes de fascination du pouvoir »[1]. Nous dirons donc que s'il paraît possible de concevoir mentalement une société sans mal, il ne reste pas moins que derrière cette conception, demeure toujours un coefficient de mal, la présence secrète et larvée de ce dernier,. »

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