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Peut-on concevoir un société sans morale ?

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« La société désigne un ensemble d'individus liés par des relations d'interdépendance.

On peut parler dans ce sens de sociétés animales (les abeilles), mais ce qui distingue les sociétés humaines est que les relations d'interdépendance y sont réglées par des institutions conventionnelles (le droit, la justice).

Contrairement aux sociétés animales, une société humaine ne peut donc pas fonctionner sans normes instituées.

Mais la société humaine doit-elle nécessairement comporter en plus des règles légales des normes morales ? La morale comme le droit, se présente comme une théorie de l'action humaine, qui ne se contente pas de décrire l'action mais établit les normes qui permettent de déterminer ce qu'elle doit être.

Mais alors que dans une perspective juridique une action est bonne à partir du moment où elle est conforme aux lois en vigueur, la morale considère également l'intention de l'agent.

Ainsi l'action bonne selon la morale ne sera pas seulement celle qui respecte la loi, mais celle qui a été accompli par devoir.

On peut penser que la société ne requiert pour son bon fonctionnement que le fait que soient respectées les lois en vigueur, sans que l'intention de l'agent doive être orientée sur le devoir.

En effet lorsque les actions des hommes sont réglées par la législation, la liberté de chacun ne risque pas d'empiéter sur celles des autres, et la coexistence des individus, donc la vie en société, est possible.

En ce sens une société sans morale serait concevable.

Mais la société véritablement humaine requiert plus que la simple possibilité de la coexistence des individus, elle commence lorsque les hommes recherchent en commun un bien vivre qui permet l'épanouissement de leur dimension rationnelle.

Dans cette perspective les intentions qui gouvernent leurs actions doivent être prise en compte.

Donc une société véritablement humaine ne peut pas être concevable sans morale.

Pourtant il faut souligner que la morale ne se réduit pas à un ensemble de valeurs supposées absolues et que l'homme devrait respecter passivement.

La morale peut au contraire être conçue comme un ensemble de valeurs créées par l'homme. I.

Une société ne peut être concevable sans Justice, mais elle peut être concevable sans morale. Les relations d'interdépendance entre les individus au sein d'une société humaine sont réglées par des institutions conventionnelles .

Les lois qui régissent ces relations se distinguent de celles de la nature en ce qu'elles portent sur la liberté.

Dans La métaphysique des mœurs, Introduction à la métaphysique des mœurs, I : Kant explique que si ces lois portent sur l'action extérieures et sa légalité elle sont juridiques, sinon elles sont éthiques, c'est-à-dire morales.

Ainsi le droit est un système d'obligations externes, contrairement à la morale qui est un système d'obligation interne.

La légalité prise en vue par le droit fait donc abstraction des mobiles qui amènent l'action à être conforme au devoir.

Pour comprendre la différence entre le droit et la morale on peut prendre l'exemple d'un commerçant.

La légalité demande seulement au commerçant de ne pas voler ses clients, en leur rendant bien la monnaie par exemple.

La morale exigerait en plus que le commerçant le fasse non pas seulement parce que la loi l'exige, mais dans l'intention d'accomplir son devoir.

Or pour exister une société n'a besoin que du premier système d'obligation, puisqu'il suffit à assurer une coexistence pacifique des libertés.

On peut même aller jusqu'à penser qu'une société qui exigerait un comportement moral (et non pas seulement légal) de la part de ses membres, serait en réalité intrusive, et ne respecterait pas leur liberté individuelle.

Une société respectant le liberté de ses membres serait donc justement une société qui ferait la différence entre morale et droit, et qui n'exigerait de ses membres que la conformité de l'action à la légalité.

Dans cette perspective on peut tout à fait concevoir une société sans morale. II.

Une société véritablement humaine permet la réalisation du bien vivre selon la raison, et ne peut pour cela se passer de morale Nous avons vu qu'une société sans morale était concevable, au sens où le droit suffit à assurer la coexistence pacifique des membres de la société.

Mais une telle société serait-elle véritablement humaine.

Ne doiton pas penser qu'une société humaine devrait permettre à ses membres plus que de ne pas se nuire les uns aux autres, mais devrait leur permettre de se réaliser pleinement comme êtres humains ? Or Aristote considère que l'homme est par essence un animal rationnel.

L'animalité désigne le genre auquel appartient l'homme, la rationalité sa différence spécifique (c'est-à-dire ce qui le distingue des autres animaux).

Or pour se réaliser pleinement, l'homme doit exprimer ce qui le caractérise en propre, donc ne pas vivre seulement comme un animal, mais vivre de manière rationnelle.

C'est la raison pour laquelle Aristote écrit dans les livre I, ch.

1 et 2 de La politique, que la cité a pour fin non pas seulement l'entretien de la vie mais le bien vivre, c'est-à-dire une vie conforme à l'excellence de l'homme (qui lui permette de réaliser son essence rationnelle).

Si pour réaliser son essence rationnelle l'homme a besoin de la vie en société, c'est donc que l'homme est aussi par essence un animal politique.

Mais en quoi la vie en société permet-elle la réalisation de la rationalité de l'homme ? Aristote répond que c'est parce que la rationalité de l'homme passe par l'usage de la parole, qui lui permet de raisonner sur le juste et l'injuste.

Or la cité permet justement l'usage public de la parole en vue de dégager des principes de justice, ce qui est un bien proprement humain.

Ainsi pour réaliser son essence rationnelle, l'homme ne peut se contenter d'agir en conformité avec la légalité, mais il doit chercher à réaliser des actions qui lui semblent bonnes.

Dans ce sens une société dépourvue de morale ne serait pas pleinement humaine, car elle ne poursuivrait pas en commun une vie bonne pour tout le monde.

Donc si une société sans morale est concevable, cette société ne serait pas pleinement humaine, et la société permettant à l'homme de réaliser son essence rationnelle ne peut être dépourvue de morale.. »

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