Peut-il y avoir une science de l'inconscient ?
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Analyse du sujet : Un sujet à la limite de la question de cours.
L'important est ici le mot science: l'analyse de
conscient peut-elle être faite de façon rigoureusement scientifique, et si oui, comment ?
Conseils pratiques : Évitez de réciter seulement inconscient ou sur Freud.
Interrogez-vous sur les critères de la
scientificité d'une démarche.
[Introduction]
Freud lui-même ne s'est pas privé de situer la psychanalyse, telle qu'il l'a mise au point, dans une histoire des
conceptions scientifiques de l'être humain.
Il considère en effet que la connaissance de ce dernier aura connu trois
bouleversements majeurs, avec la fin du géocentrisme (Copernic et Galilée), la théorie de l'évolution des espèces
(Darwin), et la révélation de l'inconscient (Freud lui-même).
Mais cet inconscient peut-il constituer, au sens strict,
un objet scientifique ? Peut-il exister une véritable science de l'inconscient ?
[I.
Qu'est-ce qu'un objet scientifique ?]
Par définition, est « objet » ce qui est « placé devant » le sujet connaissant.
Si l'inconscient est bien ce qui existe
en moi de plus intime ou de plus profond, l'objection déjà faite par Auguste Comte à la classique introspection (elle
ne respecterait pas la condition minimale d'une observation scientifique, qui consiste en la distinction entre
observateur et observé) peut être, à son propos, redoublée.
Dans cette optique, c'est très logiquement que Freud
affirmait l'impossibilité de l'auto-analyse, et la nécessité, pour que la cure soit
possible, du psychanalyste comme intervenant (auditeur-interprète)
extérieur.
De surcroît, un objet scientifique peut être:
- soit purement a priori - comme c'est le cas notamment en mathématiques -,
ce que n'est à l'évidence pas l'inconscient, puisque Freud en a déduit, élaboré
et travaillé la définition à partir de l'observation et du traitement de ses
patients ;
- soit construit à partir d'un ensemble d'observations et d'expérimentations,
et pensé en termes d'expérimentation possible - ce que ne peut non plus être
l'inconscient (on peut rappeler au passage que, de ce point de vue, la
psychanalyse rejoint la situation générale des sciences humaines : on peut y
multiplier les observations, mais la vérification expérimentale y semble
impossible).
Pour ce qui le concernait, Freud affirmait cependant le caractère scientifique
de sa démarche en faisant valoir :
- que le concept d'inconscient a une portée explicative, et qu'en son
absence, certains phénomènes psychiques (rêve, lapsus, etc.) demeurent
incompréhensibles ;
- que la théorie psychanalytique a bien une portée pratique, ou thérapeutique
: la cure en proposerait ainsi une vérification.
En soulignant cette efficacité de la théorie analytique, Freud participe d'une conception « moderne » de la
scientificité, qui fait de la science, comme l'a souligné Jean-François Lyotard, un ensemble d'énoncés « qui marchent
».
Reste à savoir si une telle conception n'est pas un peu étroite ou restreinte, et de la sorte sérieusement
discutable.
[II.
Conditions d'une science]
Toute science particulière suppose l'existence d'une méthode : la psychanalyse en propose bien une.
Mais la science suppose aussi l'existence d'un débat ouvert et permanent entre chercheurs travaillant dans le même
champ scientifique.
De ce point de vue, la théorie analytique paraît avoir un statut très particulier : les « infidèles »
à Freud (Adler, Jung) sont condamnés comme dissidents ou hétérodoxes, et marginalisés.
Toute science présente de surcroît une histoire véritable, constituée complémentairement par ses avancées
théoriques et par l'élimination de ses erreurs.
L'histoire de la psychanalyse n'est que celle de sa diffusion, de ses
hérésies, des résistances qu'elle a rencontrées ; mais Freud aurait énoncé une fois pour toutes son contenu
théorique, et il s'agirait au mieux de « faire retour » (cf les travaux de Lacan) à l'esprit de ses découvertes, pour les
reformuler, éventuellement dans un autre vocabulaire.
On rencontre ainsi un fondateur initial, délivrant la version
définitive de ce qu'il y a à savoir, ce qui ne se produit dans aucune science « normale » : on imagine mal que
l'astronomie continue à n'être rien de plus que ce qu'en a découvert Galilée...
On peut enfin rappeler l'argumentation de Popper : est scientifique un énoncé qui se prête à l'épreuve de la
falsifiabilité, c'est-à-dire qui est susceptible d'être réfuté par l'expérience.
Ce n'est pas le cas en psychanalyse, où
la théorie n'a de portée que dans le cadre de sa mise en pratique lors d'une cure particulière, et comme telle non
répétable.
On peut en conséquence considérer que la psychanalyse, considérée comme discours modèle d'un « savoir »
possible sur l'inconscient, n'est pas une science.
On pourrait alors la définir comme étant simultanément une
thérapeutique et une herméneutique..
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