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NIETZSCHE: Dans l'ensemble, les méthodes scientifiques sont une conquête...

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Dans l'ensemble, les méthodes scientifiques sont une conquête de la recherche pour le moins aussi considérable que n'importe quel autre résultat : c'est en effet sur l'entente de la méthode que repose l'esprit scientifique, et tous les résultats des sciences ne pourraient, si ces méthodes venaient à se perdre, empêcher un nouveau triomphe de la superstition et de l'absurdité. Les gens d'esprit ont beau apprendre autant qu'ils veulent des résultats de la science ; on s'aperçoit toujours à leur conversation, et particulièrement aux hypothèses qu'ils y proposent, que l'esprit scientifique leur fait défaut : ils n'ont pas cette défiance instinctive contre les écarts de la pensée- défiance qui, à la suite d'un long exercice, a pris racine dans l'âme de tout homme de science. Il leur suffit de trouver sur un sujet une hypothèse quelconque, ils sont alors tout feu tout flamme pour elle et croient que tout est dit (...) C'est pourquoi chacun devrait de nos jours avoir appris à connaître au moins une science à fond : alors il saura toujours ce que c'est qu'une méthode et combien est nécessaire la plus grande prudenceNIETZSCHE

Ce texte de Nietzsche a une teneur épistémologique, et pose la question de l’importance de l’acquisition de la méthode en sciences, pour opposer cette acquisition à celle des résultats et relativiser cette seconde acquisition. C’est ainsi qu’il définit ce qu’est l’ « esprit scientifique ».

 

On peut distinguer trois moments dans le texte. Dans le premier, qui va du début à « empêcher un nouveau triomphe de la superstition et de l'absurdité », Nietzsche définit l’objet du texte – l’importance, en sciences, des questionnements sur la méthode – et la raison pour laquelle il s’intéresse à cet objet – il entend en effet prémunir le monde contre un nouvel âge de superstition.

 

« Nietzsche « Dans l'ensemble, les méthodes scientifiques sont une conquête de la recherche pour le moins aussi considérable que n'importe quel autre résultat : c'est en effet sur l'entente de la méthode que repose l'esprit scientifique, et tous les résultats des sciences ne pourraient, si ces méthodes venaient à se perdre, empêcher un nouveau triomphe de la superstition et de l'absurdité.

// Les gens d'esprit ont beau apprendre autant qu'ils veulent des résultats de la science ; on s'aperçoit toujours à leur conversation, et particulièrement aux hypothèses qu'ils y proposent, que l'esprit scientifique leur fait défaut : ils n'ont pas cette défiance instinctive contre les écarts de la pensée- défiance qui, à la suite d'un long exercice, a pris racine dans l'âme de tout homme de science.

Il leur suffit de trouver sur un sujet une hypothèse quelconque, ils sont alors tout feu tout flamme pour elle et croient que tout est dit (...) // C'est pourquoi chacun devrait de nos jours avoir appris à connaître au moins une science à fond : alors il saura toujours ce que c'est qu'une méthode et combien est nécessaire la plus grande prudence.

» (Les différentes parties du texte sont séparées par le signe //) Eléments d'explication Ce texte de Nietzsche a une teneur épistémologique, et pose la question de l'importance de l'acquisition de la méthode en sciences, pour opposer cette acquisition à celle des résultats et relativiser cette seconde acquisition. C'est ainsi qu'il définit ce qu'est l' « esprit scientifique ». On peut distinguer trois moments dans le texte.

Dans le premier, qui va du début à « empêcher un nouveau triomphe de la superstition et de l'absurdité », Nietzsche définit l'objet du texte – l'importance, en sciences, des questionnements sur la méthode – et la raison pour laquelle il s'intéresse à cet objet – il entend en effet prémunir le monde contre un nouvel âge de superstition. Dans la seconde partie du texte, qui va de « Les gens d'esprit » à « et croient que tout est dit », c'est un portrait du mauvais homme de science qui est dressé, c'est-à-dire de l'homme auquel l'esprit scientifique fait défaut. L'intérêt de la réflexion menée dans le texte est ainsi justifiée : par ce portrait, Nietzsche rend le risque de superstition tangible et réel.

Il faudra insister sur l'attitude psychologique qui est celle du mauvais homme de science : absence de mise en doute des propos, manque de défiance contre les « écarts de pensée », en un mot, manque de vigilance et de rigueur.

Cette attitude se trouve en effet corrigée précisément par l'interrogation permanente et minutieuse de la méthode scientifique. Dans la troisième partie du texte, qui va de « C'est pourquoi chacun devrait de nos jours » à la fin, Nietzsche élargit le champ de son propos et engage tout homme à cultiver cette défiance en connaissant « au moins une science à fond ».

C'est donc une attitude psychologique générale qu'il prescrit, son propos porte au-delà du cercle des scientifiques. Il faudra expliquer le texte en étant particulièrement attentif à la manière qu'a Nietzsche de prescrire la vigilance à l'égard de la méthode : son propos porte en effet sur des attitudes humaines générales – vigilance, refus de l'enthousiasme irréfléchi – plus que sur des attitudes proprement scientifiques.

C'est ce qui fait la singularité de ce texte épistémologique : sa portée dépasse le domaine des questions scientifiques. Pistes critiques La perspective critique pourra valider le propos de Nietzsche en le retravaillant dans le cadre strict de la philosophie des sciences : on pourra par exemple poser la question de la pertinence des réflexions scientifiques sur la méthode – sur la méthode expérimentale, par exemple. On pourra par exemple s'appuyer sur la définition que propose Claude Bernard du « savant complet » : Claude Bernard, Introduction à l'étude de la médecine expérimentale « Le savant qui veut embrasser l'ensemble des principes de la méthode expérimentale doit remplir deux ordres de conditions et posséder deux qualités de l'esprit qui sont indispensables pour atteindre son but et arriver à la découverte de la vérité.

D'abord le savant doit avoir une idée qu'il soumet au contrôle des faits ; mais en même temps il doit s'assurer que les faits qui servent de point de départ ou de contrôle à son idée, sont justes et bien établis ; c'est pourquoi il doit être lui-même à la fois observateur et expérimentateur. L'observateur (...) constate purement et simplement le phénomène qu'il a sous les yeux.

Il ne doit avoir d'autre souci que de se prémunir contre les erreurs d'observation qui pourraient lui faire voir incomplètement ou mal définir un phénomène.

A cet effet, il met en usage tous les instruments qui pourront l'aider à rendre son observation plus. »

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