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L'utopie n'est-elle qu'un rêve inutile?

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« VOCABULAIRE: UTOPIE (n.

f., étym.

: néologisme formé par Th.

MORE à l'aide du grec ou [non] et topos [lieu] pour désigner la cité imaginaire qu'il décrit ; d'où, par ext.) Description d'une société ou d'un avenir meilleur considéré comme irréalisable, chimérique ; par ext., l'adj.

utopique a souvent le sens d'irréalisable. Introduction et Problématique: Lorsqu'on qualifie une pensée ou une théorie d'utopique, c'est fréquemment avec l'intention de la disqualifier.

Dans le langage courant, l'utopie passe en effet pour n'être qu'un ensemble de propositions irréalisables, une rêverie sans danger mais inutile.

L'esprit qui se prétend les pieds sur terre refusera d'y perdre son temps.

Mais une telle acception peut sembler assez superficielle et caricaturale, et il serait quand même surprenant que des esprits de Platon à Saint-Simon en passant par More -aient consacré des textes à transcrire de simples rêves inutiles.

On peut au contraire supposer qu'ils avaient d'autres intentions que celle consistant à prouver la fertilité de leur imagination. Dans ce cas, l'utopie n'aurait aucune utilité. Première partie: Admettons que "La République" de Platon soit une sorte d'utopie.

On sait bien que le terme est postérieur à ce texte, et qu'au sens strict, ce dernier est peut être aussi autre chose; mais on sait également que, malgré ses tentatives d'application, le projet platonicien est resté comme un modèle impossible à réaliser: on se contentera, dans un premier temps, de ce caractère pour le ranger dans les utopies.

Les raisons de se rédaction révèlent que l'utopie peut constituer une réaction par rapport à une situation à une situation politique jugée malsaine.

C'est parce que la cité athénienne est pervertie aux yeux du philosophe qu'il convient de réfléchir à l'organisation d'une cité que l'on puisse considérer comme juste, sinon parfaite. L'invention d'un autre politique, d'une solution de rechange, est ainsi une manière de critiquer un réel insatisfaisant. Il n'est pas surprenant qu'on retrouve dans l'utopie dans l'utopie un caractère général de toutes les productions imaginaires: elle répond à un malaise, à une insatisfaction, et cherche à les corriger. La Callipolis (belle cité) selon Platon Comment introduire la justice dans la cité et en sauvegarder l'unité, sinon en formant, par la connaissance de l'Un-Bien, des hommes politiques dont le souci consiste à façonner cette unité en éduquant les citoyens ? Platon expose la question du gouvernement de la cité dans son dialogue La République, rédigé en 370 sous le coup de deux constats : — dans sa jeunesse il a vu l'oligarchie des Trente corrompre Athènes, tandis que la démocratie qui lui succède condamne scandaleusement à mort Socrate (399 ay.

J.-C.), le plus juste des citoyens ; ainsi est-on passé de l'échec d'un gouvernement cupide à l'échec de l'incompétence, de la tyrannie de quelques-uns à celle de l'opinion ; — la justice n'équivaut pas à l'intérêt du plus fort, parce qu'elle doit profiler sans défaillance un Bien qui unifie les activités de la cité en les entrecroisant sans risque de mélange. De ces constats découle l'exigence d'intervenir en édifiant un lieu dans lequel des hommes seront astreints, grâce à une nouvelle pédagogie (paideia, l'enfant, et agô, conduire et guider), à s'adonner à la philosophie politique, à la connaissance du modèle selon la mesure duquel l'unité de la cité devra sa mise en forme.

L'Académie, école de Platon, institue ce lieu privilégié d'enseignement, de discussion et de vie commune : la vieille éducation (rites initiatiques et poésie), qui fournissait jusque-là aux Grecs leur cadre culturel, y est rejetée, à l'instar de la rhétorique rétribuée des sophistes, au profit de ce nouvel art de la parole, la dialectique, ouvrant à la connaissance de la vérité.

Grâce à elle, les disciples-citoyens, bientôt hommes d'État, accèdent par la contrainte de l'argumentation (et non par la violence) à l'Idée de Bien, immuable et incorruptible, dont la contemplation favorise la découverte du régime politique juste.

La saisie de l'Un-Bien contribue efficace-ment à la dissolution de la diversité, car la plus grande perfection possible de la cité proviendra de son imitation adéquate.

Platon en décèle, d'ailleurs, la première incarnation dans les formes de l'Athènes ancienne (Tintée), victorieuse de l'Atlantide (Critias), gardées en mémoire depuis les récits de Solon.

Depuis lors, malheureusement, le monde est entré en décadence. La légitimation de l'homme d'État s'opère d'emblée par la possession du savoir de l'Un et de la mesure, mué en une compétence politique ou connaissance (nostalgie) de ce qui est, du savoir d'une concorde déchue, d'un âge d'or posé comme valeur éternelle.

Mais aussi, par la tempérance dont résulte la beauté à ses actions.

Incompatible avec un travail, un métier ou des intérêts privés, son action, réservée, l'expose à tisser la cohésion de la cité à partir de la dissolution de la multiplicité, des désirs et des ignorances, en les répartissant selon les lumières du modèle, de l'essence des choses bien proportionnées. Agissant en législateur, il ne saurait se contenter de prodiguer ses conseils à quelque roi.

Les conseils demeurent sans portée sur des rois qui ne fréquentent pas la philosophie.

Autant que les philosophes soient directement nommés rois (V, 473 cd), seuls susceptibles de commander, en vertu de leur science de l'Un, de copier le bonheur de l'ordre essentiel sur lequel ils ont les yeux rivés, de placer par conséquent la loi (ordre et mesure) sous la dépendance du Bien dont tout ordre procède, de modeler les moeurs afin qu'elles gagnent leur repos, et au besoin. »

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