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l'obéissance morale n'est-elle qu'obéissance à des règles établies

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« INTRODUCTION.

— Les éducateurs s'entendent pour affirmer que le devoir essentiel de l'enfant est d'obéir aux ordres qu'il reçoit et d'observer le règlement qui lui a été fixé.

Mais est-ce là un stade définitif et pouvons-nous concevoir la vie morale comme une simple obéissance à des règles établies ? I.

— POUR LE SENS COMMUN. C'est bien d'après sa conformité aux règles établies que le vulgaire juge de la valeur morale de la conduite des hommes : pour lui, vivre moralement consiste à observer les règles de conduite, non plus fixées.

par les parents, mais admises comme valables par le milieu dans lequel on vit. a) Le plus souvent ces règles sont considérées comme un fait social' qui se suffit à lui-même : on ne cherche pas qui les a établies; on les trouve établies et on les accepte comme valables. b) Si nous voulions déterminer en vertu de quel pouvoir elles s'imposent, nous aboutirions à une autorité qui domine la conscience individuelle : pour la morale chrétienne vulgaire, d'où dérive la morale des.

incroyants eux-mêmes, la vie morale consiste à obéir aux règles établies par Dieu et par ceux qui participent de Dieu le pouvoir de commander;.

pour la morale laïcisée dont s'inspirent les discours officiels, la société. La vie morale, pour bien des honnêtes gens, consisterait dans l'obéissance à ces règles. II.

— POUR LE PHILOSOPHE. Le philosophe ne peut pas accepter cette conception.

Sans doute, la vie morale comporte bien l'obéissance aux règles légitimement établies.

mais elle ne se réduit pas à cette obéissance. a) Tout d'abord, la vie morale n'est pas simple obéissance.

Comme l'a bien fait valoir KANT, la moralité consiste, non pas à observer matériellement une règle reçue de l'extérieur, mais à s'imposer à soi-même cette règle : elle est autonomie et non hétéronomie. Le principe de la moralité réside dans l'autonomie, soit la faculté de se déterminer soi-même de par une législation rationnelle.

L'homme est lié à son devoir par une loi qui ne lui est pas extérieure.

Aucun intérêt ne vient le forcer à faire son devoir, aucune force étrangère à sa propre volonté ne vient le contraindre. Si le devoir procédait d'une contrainte, l'homme ne serait pas libre mais hétéronome, c'est-à-dire sous la dépendance d'une loi qui ne procède pas de lui-même.

Le devoir ne se définit que par l'autonomie de la volonté.

Être libre et moral, c'est agir conformément à sa propre volonté législatrice universelle. Cette loi du devoir, bien qu'en nous, vise l'universalité.

Le principe suprême du devoir est inconditionné et absolu.

La volonté n'y est pas intéressée, et elle n'est pas non plus motivée par la crainte d'un châtiment ou d'une sanction s'il y a désobéissance.

Dans l'accomplissement du devoir, la volonté est fondée sur un principe d'autonomie : "L'autonomie de la volonté est cette propriété qu'a la volonté d'être à elle-même sa loi (indépendamment de toute propriété des objets du vouloir).

Le principe de l'autonomie est donc : de choisir de telle sorte que les maximes de notre choix soient comprises en même temps comme lois universelles dans ce même acte de vouloir." b) Ensuite, elle n'est pas une obéissance 'à des règles, c'est-à-dire à des prescriptions particulières établies par les hommes pour certaines circonstances déterminées et par suite positives.

Le respect de l'agent moral s'adresse, audelà de la règle positive, à la loi naturelle qui la fonde; c'est à celle-ci qu'en définitive il obéit : le règlement du collège s'impose à moi parce que ma nature exige la vie en société et que toute vie en société implique une organisation régulière. c) Nous ne pouvons encore moins admettre le qualificatif de « établies ».

La chose est évidente si l'on fait de ce mot un synonyme de « positif a nous venons de le dire, les règles positives ne valent qu'en considération de la loi naturelle qui les fonde, et c'est à elles que va l'obéissance.

Voudrait-on d'ailleurs considérer les lois naturelles comme « établies », c'est-à-dire définitivement fixées, nous devrions objecter que si, en soi, il y a des lois naturelles éternelles et immuables, pour nous, les lois naturelles ne se découvrent que lentement, à mesure que l'individu et l'humanité progressent dans le sens d'une plus haute moralité.

Les règles morales ne sont pas établies : nous les établissons, et la vie morale consiste autant à découvrir la règle qu'à la suivre. CONCLUSION.

— Nous ne pouvons donc pas admettre que la vie morale ne soit qu'obéissance à des règles établies. Il reste vrai néanmoins que l'obéissance aux règles établies est un important élément de la vie morale : c'est en nous soumettant à une règle que nous n'avons pas faite que nous conquérons peu à peu la maîtrise de nous-même sans laquelle il n'y a pas d'autonomie véritable; l'obéissance à la règle est le moyen pratique d'obéir à la loi et le mépris des règles établies mettrait l'homme en dehors de la loi naturelle; enfin, c'est la fidélité aux règles établies qui donne la lumière permettant d'en établir de meilleures.

La vie morale est bien dong obéissance aux règles établies; mais c'est au-delà de ces règles que nous devons viser.. »

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