Aide en Philo

L'exigence morale conduit-elle l 'homme à se dépasser ?

Extrait du document

« Termes du sujet: HOMME: Le plus évolué des êtres vivants, appartenant à la famille des hominidés et à l'espèce Homo sapiens (« homme sage »). • Traditionnellement défini comme « animal doué de raison », l'homme est aussi, selon Aristote, un « animal politique ».

Ce serait en effet pour qu'il puisse s'entendre avec ses semblables sur le bon, l'utile et le juste que la nature l'aurait pourvu du langage. MORAL(E): Moral: 1) qui concerne la morale.

2) qui est conforme aux règles de la morale; opposé à immoral. Morale: ensemble des règles de conduite -concernant les actions permises ou défenduesinconditionnellement valables. tenues pour universellement et Dépassement, dépasser: laisser en arrière, derrière soi, devancer; aller au-delà de certaines limites, excéder, outrepasser. Se dépasser: s'efforcer de sortir de soi-même, d'aller vers une transcendance. 1.

Différence entre l'homme et l'animal : l'animal « est là où il est « (Gusdorf) et ne peut dépasser ce que la nature lui impose ; l'homme est capable de dépasser le simple besoin, et par là, de s'engager sur la voie du dépassement de soi : les désirs et les passions en sont l'illustration.

Les limites naturelles imposent à l'animal des besoins et des instincts ; l'homme a des sentiments et des désirs dont l'expression est culturelle et historique.

Or, cette sensibilité, qui peut prendre la forme excessive des passions, apparaît comme essentielle dans l'accession au bonheur, à l'épanouissement de soi, à l'expression d'une personnalité.

Et, liés à une origine sociale, la forme des sentiments (de plaisir et de déplaisir), le contenu des désirs (ainsi que des craintes), sont intimement liés aux rapports avec autrui.

L'éducation joue un rôle fondamental dans l'avènement de cet aspect essentiel de la nature humaine.

De plus, le bonheur semble ne tenir qu'à la réalisation effective des désirs menant à des plaisirs irremplaçables.

Or, l'éducation, tout en révélant les désirs, les limite, les frustre.

En effet, elle exige le respect de règles morales.

Une exigence, c'est ce qui est demandé, réclamé, voire commandé, ordonné, dans la mesure où cela apparaît nécessaire au regard de la raison.

Une exigence oblige, voire contraint.

Les préceptes moraux sont ainsi vécus par l'enfant comme autant de barrières : ce qui est exigé de lui, non seulement ne le conduit pas au-delà de lui-même, mais l'empêche plutôt de devenir lui-même ! (cf.

aussi le surmoi chez Freud ; ou encore le principe du plaisir opposé au principe de réalité). De même, le passionné, qui vit sa passion comme la possibilité d'accéder à une dimension extraordinaire de l'existence, voit-il dans les exigences sociales, les impératifs de la morale, des moeurs, une amputation de son destin, de son existence.

Il lui semble au contraire qu'il serait bénéfique de laisser être cette puissance de sa passion qui, alors seulement, lui permettrait d'aller au-delà de lui-même, en un domaine inaccessible aux autres, échappant ainsi au monde quotidien, bas, monotone.

La loi n'est qu'un fardeau dont il faut savoir se défaire, qui n'est au service que des faibles et coupe les ailes des forts (cf.

Calliclès, Nietzsche).

Alors, il semble que l'exigence morale ne conduise pas l'homme au-delà de lui-même, bien plus : elle l'empêche de révéler sa subjectivité, sa nature propre, son originalité, d'accéder à lui-même. 2.

Toutefois, dans les rapports entre les hommes, les désirs et les passions sont à l'origine de conflits qui exigent qu'une limite soit imposée à leurs débordements.

Justement, en tant qu'exigence indéfinie de dépassement, le désir est insatiable, sans mesure, tyrannique si l'homme n'y met pas un frein.

« Si deux hommes désirent la même chose alors qu'il n'est pas possible qu'ils en jouissent tous les deux, ils deviennent ennemis dit Hobbes (Léviathan, XIII).

L'emportement passionnel n'est-il pas ce qui ouvre sur une destruction du bonheur, une perte de la liberté ? Épictète répète qu'il ne faut pas se laisser « emporter „ par son imagination et sa passion.

Sinon, c'est la voie ouverte au vice, au mal, au fanatisme, etc. Voilà pourquoi l'éducation exige de l'enfant qu'il apprenne à maîtriser ses penchants sensibles et, ce faisant, à dépasser ce qui fait de lui un être de désirs.

C'est-à-dire à surmonter sa nature sensible, à s'en rendre supérieur. Être au-dessus de soi, se transcender par la raison qui doit pouvoir faire la loi : dans cette exigence morale est inscrite l'idée d'un dépassement de soi.

Discipline, impératif moral, loi morale, devoir, conscience morale : tous ces aspects de l'exigence morale sont autant de façons de montrer, démontrer, poser et imposer ce qui, du point de vue éthique, est en accord avec les principes de la raison.

Ceux-ci montrent qu'il faut dépasser l'égoïsme des désirs individuels, la subjectivité des passions, pour viser une objectivité, un universel : non seulement dans un dépassement de soi, mais dans un mouvement vers autrui, qui est une autre forme de ce dépassement.

La pitié, la compassion, l'altruisme exigent que chacun dépasse le souci égoïste de soi pour s'ouvrir sur l'autre pour lui-même, pour lui venir en aide, faire don de soi-même, etc.

Alors, l'exigence morale conduit l'homme au-delà de lui-même, à la fois en le plaçant au-dessus de ses penchants sensibles et en l'obligeant à tenir compte des autres, et donc à penser l'homme sur un plan universel et non sur le plan de sa situation singulière et contingente. 3.

La difficulté problématique posée par la morale tient donc à ce qu'elle exige, pose comme devoir, une limitation de ce qui apparaît comme une promesse de bonheur réel, l'assouvissement des désirs ; et, ce faisant, elle montre une forme raisonnable du dépassement de soi par l'homme. 4.

Cependant, si l'exigence morale propose un idéal de pureté et de vertu dans les actions, un sens et une valeur du bien, la réalité de l'existence montre (ne serait-ce qu'en se référant à la complexité de l'être humain, des mobiles et des motifs qui peuvent le conduire à agir), que jamais l'homme ne peut atteindre parfaitement ce que l'exigence morale lui commande. Que les actions soient conformes au devoir ne veut pas dire qu'elles aient été accomplies par devoir (cf.

Kant).

Et même dans ce cas, comment être sûr qu'il n'y a que le devoir comme mobile de l'action ? (Cf.

inconscient, et le "cher moi" dont parle Kant, Fondements de la métaphysique des moeurs, section II, § 3).

Alors, ce dépassement est toujours à recommencer.

En le conduisant au-delà de ce qu'il est (présent), l'exigence morale lui indique ce qu'il doit devenir (futur), en progrès vers lui-même, un être moralement bon (cf.

finalité dans l'histoire, le « Royaume des fins » chez Kant). Et la passion joue là son rôle positif indispensable, la « passion de la vertu dit Rousseau.

L'Histoire montre ce dépassement et cet acheminement de l'homme vers lui-même comme sa tâche spécifique (espèce humaine).

Ainsi, l'exigence morale conduit l'homme à tendre vers lui-même.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles