Les utopies sont-elles utiles ?
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«
Introduction
Les utopies ne se sont jamais concrétisées — elles deviennent synonymes de chimères -~ sont-elles inutiles ? Le
sont-elles simplement parce qu'elles ne servent à rien ou parce qu'elles sont inutilement dangereuses ?
Première partie : analyse de l'utopie
a) L'utopie est un projet d'organisation idéale de la société humaine.
Si ce projet se donne comme possible, il est
souvent reçu comme séduisant mais irréalisable —> l'utopie apparaît comme une pensée-limite, à la frontière de la
réalité et du rêve.
b) Nulle utopie n'est véritablement u-topique (de nulle part) et u-chronique (d'aucun temps).
Chacune des grandes
utopies est (nécessairement ?) historiquement et géographiquement située : derrière la République de Platon se
profile la cité grecque; derrière l'Utopie de Thomas More la société anglaise du règne de Henri VIII.
c) En effet il apparaît que les utopies s'articulent toujours autour d'une critique de la société et d'une dogmatique
qui est le corollaire de cette critique.
Deuxième partie : les dangers de l'utopie
A) L'utopie comme dogmatique
a) L'utopie peut être conservatrice ou réactionnaire.
— Elle peut répondre à une volonté de retour aux structures immuables d'une société traditionnelle.
Cf.
l'Utopie de
Th.
More qui comporte des camps de travail, la mise au travail forcé des miséreux, etc.
— Elle peut fonctionner comme instrument politique du pouvoir établi, tout pouvoir prétendant oeuvrer pour
qu'advienne le temps (utopique) du bonheur général.
II existe des « discours » et des « institutions » utopiques
officialisés qui constituent l'autre face de l'utopie.
L'égalité des chances par le système éducatif n'est-il pas une
utopie servant le pouvoir établi ?
b) L'utopie peut être réductrice.
En se fondant sur la seule Raison, l'utopie ne risque-t-elle pas d'appauvrir le réel en le simplifiant, le schématisant, le
mutilant ? Cf.
par ex.
les architectures utopiques, hyperfonctionnalisées, qui pourtant se révèlent incapables de
répondre aux nécessités réelles de la vie humaine.
c) L'utopie peut être totalitaire.
— Par excès de rationalisation et de systématisation, l'utopie se présente souvent comme une structure fermée,
hypernormée, excluant toute déviance.
Cf.
La cité idéale de Platon et, pour une critique de cette hyperrationalité,
le Meilleur des mondes de A.
Huxley.
— C'est contre de telles utopies que N.
Berdiaeff a pu dire : « Les utopies sont réalisables ; la question est de
savoir comment en empêcher la réalisation.
»
B) L'utopie comme illusion aliénante.
a) Marx et Engels prononcent la fin de l'utopie.
Pour eux les utopies sont illusoires car conçues à partir d'un idéal
sentimental, non de l'étude scientifique des rapports socio-économiques.
Les utopies (celles de Saint-Simon, de
Fourier, etc.) correspondraient à une époque où la production capitaliste était encore peu développée (elles sont
ainsi historiquement datées) et donc à une époque où l'on ne pouvait pas voir à quelle société _conduisaient les
contradictions du capitalisme.
La doctrine communiste ne serait pas utopique dans la mesure où elle se fonderait sur
une analyse scientifique de l'histoire.
Mais on peut se demander si Marx et Engels n'ont pas été eux-mêmes victimes de l'illusion utopique.
b) En tant que projection d'un idéal (dans l'avenir), l'utopie peut apparaître comme une illusion servant de prétexte à
esquiver le défi de l'histoire et à s'évader de cette dernière.
Ainsi R.
Ruyer (dans l'Utopie et /es utopies) la rapproche de la schizophrénie en ce sens qu'avec elle l'homme perd le
contact avec la réalité et se dissocie de lui-même pour se projeter dans une restructuration fantastique de son
milieu.
Troisième partie : utilité de l'utopie
A) L'utopie comme type opératoire.
A.
Comte a souligné l'utilité des utopies qui sont à l'égard de l'art politique ce que les types géométriques,
mécaniques, etc., sont à l'égard des arts correspondants.
L'utopie peut donc avoir en tant que modèle une valeur théorique.
B) L'utopie, principe d'espérance..
»
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