LECTURES DE L’HISTOIRE : LES ALÉAS DE LA DISCORDE

« LECTURES DE L'HISTOIRE : LES ALÉAS DE IA DISCORDE Sans doute l'épreuve de la discorde civile entraînée par les fêlures religieuses a-t-elle constitué l'aiguillon et le plus clair de la réflexion politique en France en ce siècle-là et,comme travaux pratiques, une approche expérimentale d'une philosophie de l'histoire se faisant.

Penser les conditions concrètes de survie pour un corps social dont une partie est intolérable à l'autre,jus­tifier la légitimité et l'efficacité d'un souverain toujours au bord d'être inadmissible à une fraction de ses sujets, autant de pro­ blèmes qui, dans ce que Montaigne qualifiait pudiquement de -e< nos troubles», n'étaient pas exercices d'école, mais se posaient sur le devant de la scène avec une acuité tragique.

De plus, les théoriciens susceptibles de les élaborer sont souvent des acteurs politiques dotés de charges administratives, des magistrats, des parlementaires ou des conseillers des grands, des négociateurs dans les conflits ; Montaigne en reste l'exemple illustre, mais Thou, La Boétie, Bodin, L'Hospital, Du Vair eurent aussi ce double rôle. D'emblée, la pensée humaniste s'était reliée au souci de la vie publique.

Guillaume Budé ne se contentait pas d'être l'hellé­ niste sans égal et de créer le Collège des Trois Langues, fondant la mutation des savoirs; il réforme également l'enseignement du droit avec ses Annotations aux Pandectes (1508) et devient conseiller de deux rois.

Lefèvre ne se limite pas à faire connaître des auteurs mystiques ou spéculatifs ; il écrit aussi, avec ses Héca­tonomies, qui eurent, 28 éditions entre 1506 et 1543, un commen­taire au ton neuf de La République et des Lois de Platon, qui est une somme politique dissociée de la tradition aristotélicienne. »