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Le temps libre est-il le temps de notre liberté ?

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« L'homme semble prisonnier du temps et incapable d'y échapper.

Mais les facultés de son esprit, comme la raison, la volonté ou la mémoire lui permettent de s'y inscrire de façon délibérée, voire de le considérer comme le support indispensable de sa progression vers la maturité, ou de l'ignorer.

Ainsi la mort qui, à première vue, met irrémédiablement fin à tout projet, peut aussi stimuler l'être humain en le poussant à réaliser une oeuvre qui lui survivra, sans qu'il cherche inutilement à oublier son emprise et celle du temps.

Si tout homme est en partie déterminé par le passé et par son époque, il peut aussi s'appuyer sur cette histoire pour accomplir une oeuvre qui la dépasse ou pour s'y épanouir lui-même. Définition des termes du sujet: TEMPS: Milieu indéfini et homogène, analogue à l'espace, dans lequel se déroulent les événements. Temps objectif: Mouvement continu et irréversible (« flèche du temps ») par lequel le présent rejoint le passé. Temps subjectif: Sentiment intérieur de la temporalité, telle qu'elle est vécue par le sujet (synonyme : durée). LIBERTÉ: Ce mot, en philosophie a trois sens : 1° Libre arbitre.

Pouvoir mystérieux de choisir entre les motifs qui me sollicitent sans être déterminé par aucun d'eux. 2° Liberté de spontanéité.

S'oppose non plus au déterminisme mais à la contrainte : état de celui qui agit sans être contraint par une force extérieure. 3° Liberté du sage.

État de celui qui est délivré des passions et agit à la lumière de la raison. POUR DÉMARRER Les périodes de notre vie sur lesquelles ne pèse aucune obligation, où rien ne nous est imposé, où nous pouvons nous livrer au pur loisir, sont-elles celles pendant lesquelles peuvent se déployer sans contrainte nos choix, notre droit de dire oui ou non ? CONSEILS PRATIQUES La difficulté de ce sujet réside entièrement dans les différents sens que vous attribuerez au mot « liberté ».

C'est plus particulièrement sur le sens que vous donnez à l'exercice de la liberté humaine que vous êtes ici interrogés.

Le sujet sous-entend, en effet, que la liberté pourrait être simplement assimilée à d e simples activités de loisir, fussent-elles d'un haut niveau spirituel.

II est évident que nous sommes alors très loin de la véritable liberté, de l'autonomie de la personne, créant réellement.

Le temps de la liberté ne se confond pas avec celui des loisirs de masse. BIBLIOGRAPHIE J.

BAUDRILLARD, La société de consommation, Idées-Gallimard. Introduction L'Antiquité faisait l'éloge du loisir qui est l'otium, état d e paix correspondant au dégagement des soucis inhérents aux activités professionnelles et à l'absence d e contrainte temporelle.

Pour Aristote, par exemple, cet état d'exemption du travail est nécessaire à l'homme se livrant à la réflexion philosophique et aux exigences éthiques.

L'otium n'est donc pas le temps du désoeuvrement, mais celui du développement intellectuel et moral de l'homme. L'oisiveté, en revanche, qui se réduit à « ne rien faire » a été généralement condamnée (l'oisiveté, dit-on, est « mère de tous les vices », tandis que le travail serait source de moralité) depuis le Moyen Âge jusqu'au XIXe siècle (songeons à la critique portée contre elle par saint Thomas d'Aquin, par Th.

More dans son Utopie, ou par Voltaire qui écrit : « Il vaut mieux mourir que de traîner dans l'oisiveté une vieillesse insipide.

Travailler, c'est vivre.

»).

Il faut ainsi attendre P.

Lafargue qui réhabilitera le loisir oisiveté dans son Droit à la paresse (1882). On assiste aujourd'hui à une défense et à un développement du loisir ou plutôt des loisirs, lesquels englobent toutes les activités ou la non-activité du « temps libre », c'est-à-dire du temps dégagé des activités professionnelles.

Nous pouvons toutefois nous demander si ce « temps libre » est bien le temps de notre liberté. Une compensation du travail aliénant? Le temps libre, ou temps du loisir, constitue le cadre du développement personnel et de l'expression de soi.

L'importance croissante de l'automatisation du travail dans la civilisation technicienne accroît la nécessité de placer le centre d'accomplissement de l'homme dans un loisir actif.

Au couple travail-nécessité correspond celui du loisir-liberté.

« Pour des milliers d'hommes et d e femmes, écrit Friedmann, l'activité du travail gagne-pain n'a pas de valeur enrichissante et équilibrante.

Pour ceux-là la réalisation d e soi et la satisfaction ne peuvent être cherchées que dans les activités de loisir et plus précisément dans le temps libre, progressivement accru par la réduction de la semaine de travail » (Friedmann).

Ainsi toute activité peut être du loisir.

Celui-ci n'est pas caractérisé par son contenu, mais par la relation que l'individu entretient avec son activité. Le loisir au sens moderne n'est donc pas un simple repos, une halte dans l'activité laborieuse, ni un désoeuvrement.

C'est essentiellement une activité libre où l'homme trouve un épanouissement, une échappée hors du monde aliénant du travail.

Dans ces conditions, le loisir apparaît comme l'espace où l'homme peut enfin se reconnaître lui-même.

Dans un tel contexte, le temps de « loisir » s'oppose clairement au travail, parce qu'il est d'abord un temps où cesse l'activité imposée: Il n'est pas étonnant que Littré le définisse alors comme l'« état dans lequel il est permis de faire ce qu'on veut », mais on peut se demander si l'ouvrier du XIXe siècle était en mesure de combler ses désirs : encore faudrait-il qu'il en ait eu les moyens.

Ce qui apparaît néanmoins positif dans le loisir, c'est qu'il autorise le repos, et l'éloignement du milieu industriel. On constate cependant que le loisir est porteur d'espoirs plus ambitieux : on attend qu'y réapparaisse le souvenir de l'idéal antique, et qu'il favorise l'épanouissement d e la personnalité, ou l'accès à des domaines culturels.

Puisqu'il s'agit d'un temps disponible, que l'individu l'utilise pour se consacrer à ce qui lui apporte des satisfactions profondes. Une autre aliénation? Mais les loisirs comme cadre de la réalisation de soi ne sont-ils pas une illusion ? Si les loisirs se veulent hors du monde du travail, ils ne se situent pas hors de l'activité économique ; ils en sont au contraire le produit direct.

Si le travail est le lieu de la production aliénée, les loisirs apparaissent le plus souvent comme celui de la consommation aliénée.

Ainsi Riesman avait-il vu dans les loisirs une source d'individualisation et d'autonomie (cf..

La Foule solitaire).

Mais il a ensuite reconnu s'être trompé et que les loisirs consistent essentiellement en une consommation passive, non choisie, et impropre au développement de l'individu (cf..

L'Abondance pourquoi ?).

Le temps libre n'est en fait pas laissé à la libre disposition de l'individu.

Les structures socio-économiques lui dictent son organisation et son contenu.

Les individus se soumettent aux loisirs, ils ne les créent pas.

Selon Marcuse, les loisirs constituent seule ment une soupape de sécurité dans une société par nature répressive. Dans ces conditions, il apparaît que les loisirs ne peuvent être une réponse au travail aliéné, parce que, produits par les mêmes conditions économiques que ce travail, ils sont eux-mêmes aliénés.

Il convient donc, selon la conclusion de Riesman, « de s'en prendre au travail lui-même pour le modifier de telle façon que l'homme puisse vivre humainement aussi bien dans son oeuvre créatrice qu'en marge de cette oeuvre ».. »

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