Le savoir de l'historien est-il vérifiable ?
Extrait du document
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• Pourquoi la question ?
On peut reconnaître deux enjeux dans cette question : il s'agit d'une part de savoir dans quelle mesure on peut
réellement parler d'un savoir objectif de l'historien: peut-on vérifier qu'il ne fait pas que raconter des histoires? La
question nous renvoie d'autre part à un débat récent et important à propos de la Seconde Guerre mondiale et
particulièrement de l'existence et de l'utilisation par les nazis de chambres à gaz : ceux qu'on appelle les «
négationnistes » s'appuient sur les limites de la vérification historique pour minimiser ou nier le génocide des juifs.
• Quelles sont les exigences, quels sont les moyens de la vérification ?
« Vérifier » c'est, au sens le plus général, contrôler la véracité, l'exactitude d'une affirmation ou d'une hypothèse.
En
un sens plus restreint, la vérification scientifique consiste à mettre en évidence expérimentalement les résultats ou
les phénomènes prédits par la théorie.
Pour être probante, la vérification doit suivre des procédures précises.
De quels moyens l'historien dispose-t-il? Quelle difficulté particulière, liée à l'objet même de sa recherche, s'oppose à
la vérification de son savoir?
Introduction
Comment faire la différence entre un livre d'histoire et un roman? On répondra spontanément que l'écrivain imagine
alors que l'historien rapporte des faits.
Mais comment peut-il prouver le sérieux de ses récits ?
Nous montrerons dans un premier temps quels sont les outils de vérification dont dispose l'historien avant d'examiner
les limites de cette opération.
Nous rappellerons enfin l'écart inévitable qui subsiste entre l'histoire et des sciences
comme la physique.
I.
Un savoir sérieux.
L'histoire s'est constituée comme telle en se dégageant de genres littéraires comme le mythe ou l'épopée, en visant
une connaissance objective, ce qui implique des moyens de vérification.
• Les traces du passé.
L'historien s'appuie avant tout sur les traces des événements, qu'il s'agisse de récits, d'objets ou de vestiges
archéologiques.
Il a donc un support matériel qui distingue son savoir d'une pure fantaisie.
• Les procédures de recoupement.
L'historien doit en outre moduler son discours en fonction du nombre de matériaux dont il dispose : un seul élément
ne permet que des hypothèses, qui peuvent devenir des affirmations certaines si l'on est en mesure d'effectuer des
recoupements, de confronter divers éléments.
• L'appui des techniques scientifiques.
L'historien bénéficie enfin des techniques issues des progrès de la science.
II.
Les limites de la vérification.
Ces conditions sont cependant loin d'être toujours réunies et la vérification du savoir de l'historien demeure souvent
limitée.
• Un objet « passé ».
La première limite, radicale, consiste dans le fait que l'objet étudié par l'historien a par définition le défaut de ne plus
être présent.
La vérification demeure donc toujours abstraite.
• L'impossibilité de reproduire le phénomène.
Par ailleurs, la vérification scientifique d'une théorie repose essentiellement sur la possibilité de reproduire le
phénomène vérifié à volonté.
Mais l'événement historique est par définition unique dans le temps et dans l'espace.
• La question des « lois de l'histoire ».
Enfin, la vérification scientifique est facilitée par le fait que le physicien, par exemple, peut s'appuyer sur des lois
nécessaires c'est-à-dire qui valent pour tous les phénomènes quel que soit le moment où ils se produisent.
L'historien, lui, ne peut tabler sur de telles constantes..
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