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Le langage est le propre de l'homme

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Le langage est le propre de l'homme Il n'y a pas de préjugé auquel nous ne soyons tous plus accoutumés qu'à celui qui nous a persuadés depuis notre enfance que les bêtes pen¬sent. De tous les arguments qui nous persuadent que les bêtes sont dénuées de pensée, le principal, à mon avis, est que bien que les unes soient plus parfaites que les autres dans une même espèce, tout de même que' chez les hommes, comme on peut voir chez les chevaux et chez les chiens, dont les uns apprennent beaucoup plus aisément que d'autres ce qu'on leur enseigne ; et bien que toutes nous signifient très facilement leurs impulsions naturelles, telles que la colère, la crainte, la faim, ou autres états semblables, par la voix ou par d'autres mouvements du corps, jamais cependant jusqu'à ce jour on n'a pu observer qu'aucun animal en soit venu à ce point de perfection d'user d'un véritable langage c'est-à-dire d'exprimer soit par la voix, soit par les gestes quelque chose qui puisse se rapporter à la seule pensée et non à l'impulsion naturelle. Ce langage est en effet le seul signe certain d'une pensée latente dans le corps ; tous les hommes en usent, même ceux qui sont stupides ou pri¬vés d'esprit 2, ceux auxquels manquent la langue et les organes de la voix, mais aucune bête ne peut en user ; c'est pourquoi il est permis de prendre le langage pour la vraie différence entre les hommes et les bêtes. DESCARTES
La façon dont Descartes, à travers son œuvre, traite le thème des animaux dépend étroitement de sa conception des rapports de l'âme et du corps chez l'homme. L'âme cartésienne (substance pensante, immatérielle) reprend le rôle de l'âme rationnelle des Anciens, les fonctions jadis attribuées aux âmes végétative et sensitive (cohésion et croissance du corps, interaction avec le milieu) étant désormais assumées par le corps (substance étendue, matérielle). Du même coup, les animaux, à qui Descartes refuse la raison, n'ont plus d'âme du tout ! C'est la fameuse thèse des animaux-machines, qui ne manqua pas de choquer nombre des contemporains de Descartes, suscitant dans sa correspondance diverses mises au point analogues à celle que nous allons étudier. Si nous répugnons à priver les animaux d'une âme, nous sommes nécessairement contraints par le système cartésien à leur reconnaître la pensée.


« Le langage est le propre de l'homme Il n'y a pas de préjugé auquel nous ne soyons tous plus accoutumés qu'à celui qui nous a persuadés depuis notre enfance que les bêtes pensent.

De tous les arguments qui nous persuadent que les bêtes sont dénuées de pensée, le principal, à mon avis, est que bien que les unes soient plus parfaites que les autres dans une même espèce, tout de même que chez les hommes, comme on peut voir chez les chevaux et chez les chiens, dont les uns apprennent beaucoup plus aisément que d'autres ce qu'on leur enseigne ; et bien que toutes nous signifient très facilement leurs impulsions naturelles, telles que la colère, la crainte, la faim, ou autres états semblables, par la voix ou par d'autres mouvements du corps, jamais cependant jusqu'à ce jour on n'a pu observer qu'aucun animal en soit venu à ce point de perfection d'user d'un véritable langage c'est-à-dire d'exprimer soit par la voix, soit par les gestes quelque chose qui puisse se rapporter à la seule pensée et non à l'impulsion naturelle.

Ce langage est en effet le seul signe certain d'une pensée latente dans le corps ; tous les hommes en usent, même ceux qui sont stupides ou privés d'esprit, ceux auxquels manquent la langue et les organes de la voix, mais aucune bête ne peut en user ; c'est pourquoi il est permis de prendre le langage pour la vraie différence entre les hommes et les bêtes.

DESCARTES QUESTIONS 1.

Quelle est la thèse du texte et comment Descartes construit-il son argumentation ? 2.

a.

Quelle différence y a-t-il entre un préjugé qui nous persuade et un argument qui nous persuade ? b.

En quoi la capacité d'apprendre, d'une part, et de signifier les impulsions naturelles, d'autre part, peut-elle laisser croire que les bêtes pensent ? c.

Comment Descartes définit-il le « véritable langage » ? 3.

Le langage exprime-t-il la pensée ? QUESTION 1 Descartes considère le langage comme le premier et le plus puissant indice permettant de distinguer avec certitude l'homme de la bête. – Il part du sens commun, de l'habitude qui nous fait croire que les animaux pensent, habitude d'autant plus ancrée en nous qu'elle nous vient de l'enfance.

Mais qu'est-ce qui nous assure que les animaux, qui savent pourtant signifier très facilement leurs émotions, ne pensent pas ? Cette croyance n'a aucune réalité : en effet, les animaux sont des machines vivantes, soumises, déterminées par le mécanisme, c'est-à-dire par le mouvement.

Ils agissent mécaniquement, leurs mouvements sont automatiques, répétitifs. – Ainsi, seul l'homme pense, c'est pourquoi il parle, et seul l'homme a une âme.

S'il n'avait pas de vrai langage, il ne serait qu'un corps soumis au même mécanisme que les animaux.

Mais il a une âme qui le différencie essentiellement de l'animal. QUESTION 2 a.

Un préjugé qui nous persuade est une opinion à laquelle nous adhérons sans l'analyser, sans la passer au crible de la critique rationnelle.

«Le préjugé est jugé d'avance, dit Alain, avant qu'on se soit instruit.

Le préjugé fait qu'on s'instruit mal ».

C'est déjà ce qu'affirmait Descartes dès le début du Discours de la méthode.

Les opinions toutes faites s'inscrivent en nous dès l'enfance et viennent des parents, de l'école.

Il faut en faire table rase, conseillait Descartes. L'argument est un raisonnement qui prouve ou réfute rationnellement quelque chose, qui est construit logiquement et non jugé d'avance comme le préjugé.

Un argument auquel on adhère, qui nous a donc persuadés, est l'oeuvre de la raison, non du sentiment ou de l'habitude. b.

Faire de l'anthropomorphisme est facile : les chiens bougent la queue parce qu'ils sont satisfaits, aboient pour chasser les importuns, etc.

Toutes ces manifestations peuvent nous faire croire qu'ils agissent consciemment, manifestant ainsi une raison.

Mais, pour Descartes, il n'y a pas d'âme raisonnable chez l'animal, ce qui est établi par l'absence de vrai langage.

Certes, les animaux ont des codes, ils expriment des passions, ils peuvent même être dressés à dire des mots, mais ce n'est pas un vrai langage.

Ce sont des mouvements naturels, des automatismes mis en route. c.

Le vrai langage, « seul signe d'une pensée latente dans le corps », est créateur : l'homme a la possibilité de former, à partir de la combinaison d'un nombre réduit de signes, de nouveaux énoncés qui permettront d'exprimer la représentation de situations nouvelles. L'homme invente sans cesse un nouvel usage du langage, une nouvelle combinaison.

Le langage humain échappe au mécanisme instinctif et confirme ainsi l'opposition fondamentale entre l'homme et l'animal. QUESTION 3 (pistes de réflexion) — Le langage véritable est le propre de l'homme pour Descartes.

Il est « le révélateur de la raison » comme le dit G.

Rodis-Lewis.

On dispose du langage pour exprimer sa pensée, librement, pour répondre à tout nouveau contexte.

La raison est donc non quelque chose de plus, quelque chose qui s'ajoute à la nature, mais quelque chose de tout à fait autre : la raison est non-nature.

Personne avant Descartes ne l'avait aussi clairement montré, comme le souligne P.

Guénancia dans son livre Descartes (Bordas).

Ainsi, non seulement le langage exprime la pensée, mais il enseigne « la présence de l'homme en tout homme », quelles que soient les inégalités, et même jusque dans la folie. — Cf.

Hegel, il n'y a pas de pensée sans langage : « C'est dans les mots que nous pensons.

» - Il y a donc une dimension métaphysique du langage : le langage fait bouger les hommes, il sème l'espoir ou la peur, il laisse des traces écrites et permet l'histoire, la science, etc. - Cf.

le logos grec, à la fois parole et raison, à l'origine de la réflexion philosophique. Cf.

la force du verbe divin dans les religions monothéistes. Même si le langage ne peut pas exprimer toute la pensée, comme l'affirment Nietzsche et Bergson, il est sans conteste le signe de la pensée humaine, de la conscience.. »

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