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Le doute est-il l'échec de la pensée ?

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« Termes du sujet: DOUTE: État de l'esprit quand nous nous demandons si un fait est réel ou non, si une proposition est vraie ou non.

Douter n'est pas nier : la négation est une certitude, le doute revient à admettre qu'on ne sait pas. PENSÉE: Faculté de connaître, de comprendre, de juger, de raisonner, qui est censée caractériser l'homme, par opposition à l'animal.

Synonyme d'entendement, de raison. PENSER: Exercer une activité proprement intellectuelle ou rationnelle; juger; exercer son esprit sur la matière de la connaissance; unir des représentations dans une conscience. VALEUR: Du latin valor, « mérite », « qualités ». (1) Propriété de ce qui est jugé désirable ou utile (exemple : la valeur de l'expérience).

(2) En morale, norme ou idéal orientant nos choix et nos actions (exemple : le bien, la justice, l'égalité).

(3) En économie politique, on distingue la valeur d'usage d'un objet, qui est relative au degré d'utilité que chacun lui attribue, et sa valeur d'échange (son prix), qui résulte du rapport de l'offre et de la demande. PHILOSOPHIE La philosophie, selon Pythagore, auquel remonte le mot, ce n'est pas la sophia elle-même, science et sagesse à la fois, c'est seulement le désir, la recherche, l'amour (philo) de cette sophia.

Seul le fanatique ou l'ignorance se veut propriétaire d'une certitude.

Le philosophe est seulement le pèlerin de la vérité.

Aujourd'hui, où la science constitue tout notre savoir et la technique, tout notre pouvoir, la philosophie apparaît comme une discipline réflexive.

A partir du savoir scientifique, la visée philosophique se révèle comme réflexion critique sur les fondements de ce savoir.

A partir du pouvoir technique, la sagesse, au sens moderne se présente comme une réflexion critique sur les conditions de ce pouvoir. * * * * * * * RAISON: Du latin ratio, « calcul », « faculté de calculer, de raisonner » (en grec logos). Au sens subjectif : mode de penser propre à l'homme (lui-même défini comme « animal raisonnable »). Par opposition à l'intuition : faculté de raisonner, c'est-à-dire de combiner des concepts et des jugements, de déduire des conséquences. Par opposition à la passion ou à la folie : pouvoir de bien juger, de distinguer le vrai du faux, le bien du mal. Par opposition à la foi : la « lumière naturelle », naturellement présente en tout homme. Par opposition à l'expérience : faculté de fournir des principes a priori (c'est-à-dire indépendants de l'expérience) Au sens objectif : principe d'explication, cause (exemple : les raisons d'un phénomène). Argument destiné à légitimer un jugement ou une décision (exemple : donner ses raisons). Introduction Le doute peut être considéré comme un défaut ou une imperfection, puisque, par exemple, celui qui sait quelque chose avec certitude ne doute pas ou ne doute plus.

Pourtant, douter suppose une certaine intelligence, même sous la forme quotidienne et ranale de l'hésitation: un être stupide ne doute guère, ou, comme on dit, ne doute de rien.

Sur un autre plan, mais de !bon analogue, la réflexion philosophique, «fille de l'étonnement », ne peut que souligner l'acte par lequel un être refait le mouvement inaugural de la philosophie, c'est-à-dire passe du mythe à la raison, ou, plus généralement, doute de la vérité des idées reçues et cherche à substituer, à une pensée dominée par l'irrationnel, une pensée que la raison éclaire et organise.

Mais où s'arrête le doute philosophique ? Ne pourrait-il pas mettre en cause la valeur de la raison elle-même? La mise en cause de la raison par les attitudes sceptiques Des doutes extérieurs à la rationalité Ainsi, le doute par esprit de dénigrement, raillerie, agressivité, le doute du dilettantisme, les formes pathologiques du doute (l'excès de scrupule).

On retrouve souvent une telle attitude chez les Cyniques de l'Antiquité, lorsqu'ils transforment l'ironie socratique en sarcasme méprisant.

Ces formes de doute restent extérieures à la rationalité et ne l'inquiètent donc pas.

Le doute qui affirmerait la stricte impossibilité de toute connaissance ne serait pas davantage consistant.

Dire « je ne sais rien » est contradictoire.

En toute rigueur, il faudrait se taire. Le doute sceptique met en cause radicalement la raison. Le scepticisme est défini par Lalande comme : « La doctrine d'après laquelle l'esprit humain ne peut atteindre avec certitude aucune vérité ».

L'esprit se déclare incapable d'affirmer ou de nier quoi que ce soit. 1° Scepticisme antique et doute cartésien. On sait que les « Méditations » de Descartes commencent, elles aussi, par l'exercice d'un doute absolu : Descartes rejette le témoignage des sens (en rêve on croit voir, entendre, bouger et ce n'est qu'illusion).

Il rejette même les vérités mathématiques (car il peut se faire qu'un « malin génie » tout-puissant s'amuse à me tromper dans toutes mes pensées). Mais ce doute cartésien s'oppose radicalement au doute sceptique.

D'abord le doute cartésien est provisoire (il prend fin lorsque Descartes s'aperçoit qu'il peut douter de tout sauf du fait même qu'il pense et qu'il doute : et cette évidence invincible : je pense donc je suis est une première vérité d'où bien d'autre vont jaillir). C'est un doute volontaire, un doute « feint », dit Descartes dont la fonction est d'accoutumer « l'esprit à se détacher des sens » (« abducere mentem a sensibus ») et même de tout objet de pensée pour révéler en sa pureté l'acte même de penser. Le doute cartésien a la valeur d'une pédagogie de l'ascèse qui vise à nous délivrer provisoirement des pensées pour révéler que nous avions l'esprit que nous sommes.

Le doute cartésien est méthodique (le malin génie n'est lui-même qu'un « patin méthodologique » (Gouhier), c'est une technique mise au service de la recherche du vrai. Le doute cartésien est un doute optimiste et héroïque, un déblaiement préalable qui précède la construction de l'édifice philosophique, une décision volontaire de faire table rase de toutes les connaissances antérieures pour bâtir une philosophie nouvelle. 2° Les arguments des sceptiques grecs. Tout au contraire, le scepticisme absolu des pyrrhoniens et de leurs disciples n'est pas un point de départ mais une conclusion –la conclusion d'échec- au terme de l'aventure du savoir. Enésidème avait groupé les arguments sous dix titres ou « tropes que Sexus Empiricus réduisit à cinq.

Il faut connaître ces arguments qu'on retrouve chez Montaigne, chez Pascal et chez Anatole France. (a) La contradiction des opinions. Les sophistes grecs frappés par la contradiction des opinions des philosophes (par exemple : Héraclite disait que le réel n'est que changement, alors que Parménide niait le changement) aboutissent à la conclusion pessimiste que la vérité (qui devrait être universelle) est inaccessible.

Les sceptiques ont été parfois de grands voyageurs qui, à force d'avoir vu les gens les plus divers professer des opinions contradictoires, adopter des valeurs différentes, ne croient plus à rien.

Pyrrhon avait par exemple accompagné le conquérant Alexandre dans un grand nombre de ses expéditions.

Montaigne avait visité l'Allemagne, l'Italie, mais avait surtout dans sa « librairie » voyagé parmi des systèmes philosophiques innombrables et tous différents.

Pascal reprend les thèmes de Pyrrhon et de Montaigne : « Vérité en deçà des Pyrénées, erreur au-delà.

» (b) La régression à l'infini. Une vérité ne peut pas être acceptée sans preuves comme telle car il n'existe pas un signe du vrai « comparable à la marque imprimée sur le corps des esclaves et qui permet de les reconnaître quand ils sont en fuite.

» Mais si je propose une preuve pour une affirmation, le sceptique me dira « Prouve ta preuve ».

ainsi la preuve qu'on apporte pour garantir l'affirmation a besoin d'une autre preuve et celle-ci d'une autre à l'infini. Pour connaître la moindre chose je suis d'autre part contraint de remonter à l'infini, c'est-à-dire de mettre ce donné en rapport avec une infinité d'autres faits.

Car chaque chose est relative à toutes les autres et pour connaître le moindre objet il faudrait connaître son rapport avec tout l'univers.

Nous ne connaissons le tout de rien, ce qui revient à ne connaître rien du tout. (c) La nécessité d'accepter des postulats invérifiables. Ne pouvant remonter de preuve en preuve à l'infini, l'esprit accepte toujours sans démonstration un point de départ qui est une simple supposition et dont la vérité n'est pas garantie. (d) Le diallèle (les uns par les autres). Il n'est pas possible de raisonner en évitant les « cercles vicieux ».

Ainsi, je démontre que a est vrai en supposant b est vrai et je démontre que b est vrai en supposant que a est vrai.

Je commets un cercle vicieux en démontrant les unes par les autres des propositions dont aucune n'est fondée a priori.

Le cercle vicieux par excellence est celle-ci : pour prouver la valeur de ma raison, il faut que je raisonne, donc précisément que je me serve de cette raison dont la valeur est en question ! Nous voilà, comme dit Montaigne, « au rouet ». (e) Toute opinion est relative. « L'homme est la mesure de toute choses » formule qu'Anatole France interprétait ainsi : « L'homme ne connaîtra de l'univers que ce qui s'humanisera pour entrer en lui, il ne connaîtra jamais que l'humanité des choses.

» Toute affirmation sur l'univers est relative à celui qui affirme.

Socrate résume la thèse de Protagoras : « N'arrive-t-il pas parfois qu'au souffle du même vent l'un de nous frissonne et non l'autre ? Or que dirons-nous alors de ce souffle de vent envisagé tout seul et par rapport à lui-même ? Qu'il est froid ou qu'il n'est pas froid ? Ou bien en croirons-nous Protagoras : qu'il est froid pour qui frisonne et ne l'est pas pour qui ne frisonne pas ? » (« Théétète », 152b).

L'affirmation sur un même objet diffère non seulement d'un individu à un autre mais chez le même individu selon les moments (le monde ne m'apparaît pas de la même façon quand je suis gai ou triste) et même selon les perspectives d'observation (une tour vue carrée de près paraît ronde de loin).

Pour les sceptiques il n'y a pas de vérités objectives mais seulement des opinions subjectives toutes différentes. Le sophiste Protagoras, écrit Diogène Laerce « fut le premier qui déclara que sur toute chose on pouvait faire deux discours exactement contraires, et il usa de cette méthode ». Selon Protagoras, « l'homme est la mesure de toute chose : de celles qui sont en tant qu'elles sont, de celles qui ne sont pas en tant qu'elles ne sont pas » Comment doit-on comprendre cette affirmation ? Non pas, semble-t-il, par référence à un sujet humain universel, semblable en un sens au sujet cartésien ou kantien, mais dans le sens individuel du mot homme, « ce qui revient à dire que ce qui paraît à chacun est la réalité même » (Aristote, « Métaphysique », k,6) ou encore que « telles m'apparaissent à moi les choses en chaque cas, telles elles existent pour moi ; telles elles t'apparaissent à toi, telles pour toi elles existent » (Platon, « Théétète », 152,a). Peut-on soutenir une telle thèse, qui revient à dire que tout est vrai ? Affirmer l'égale vérité des opinions individuelles portant sur un même objet et ce malgré leur diversité, revient à poser que « la même chose peut, à la fois, être et n'être pas » (Aristote).

C'est donc contredire le fondement même de toute pensée logique : le principe de non-contradiction., selon lequel « il est impossible que le même attribut appartienne et n'appartienne pas en même temps, au même sujet et sous le même rapport ».

Or, un tel principe en ce qu'il est premier est inconditionné et donc non démontrable.

En effet, d'une part, s'il était démontrable, il dépendrait d'un autre principe, mais un tel principe supposerait implicitement le rejet du principe contraire et se fonderait alors sur la conséquence qu'il était sensé démontrer ; on se livrerait donc à une pétition de principe ; et d'autre part, réclamer la démonstration de toute chose, et donc de ce principe aussi, c'est faire preuve d'une « grossière ignorance », puisqu'alors « on irait à l'infini, de telle sorte que, même ainsi, il n'y aurait pas démonstration ».

C'est dire qu' « il est absolument impossible de tout démontrer », et c ‘est dire aussi qu'on ne peut opposer, à ceux qui nient le principe de contradiction, une démonstration qui le fonderait, au sens fort du terme. Mais si une telle démonstration est exclue, on peut cependant « établir par réfutation l'impossibilité que la même chose soit et ne soit pas, pourvu que l'adversaire dise seulement quelque chose ».

Le point de départ, c'est donc le langage, en tant qu'il est porteur d'une signification déterminée pour celui qui parle et pour son interlocuteur.

Or, précisément, affirmer l'identique vérité de propositions contradictoires, c'est renoncer au langage.

Si dire « ceci est blanc », alors « blanc » ne signifie plus rien de déterminé.

Le négateur du principe de contradiction semble parler, mais e fait il « ne dit pas ce qu'il dit » et de ce fait ruine « tout échange de pensée entre les hommes, et, en vérité, avec soi-même ».

En niant ce principe, il nie corrélativement sa propre négation ; il rend identiques non pas seulement les opposés, mais toutes choses, et les sons qu'il émet, n'ayant plus de sens définis, ne sont que des bruits.

« Un tel homme, en tant que tel, est dès lors semblable à un végétal." Si la négation du principe de contradiction ruine la possibilité de toute communication par le langage, elle détruit aussi corrélativement la stabilité des choses, des êtres singuliers.

Si le blanc est aussi non-blanc, l'homme non-homme, alors il n'existe plus aucune différence entre les êtres ; toutes choses sot confondues et « par suite rien n'existe réellement ».

Aucune chose n'est ce qu'elle est, puisque rien ne possède une nature définie, et « de toute façon, le mot être est à éliminer » (Platon). La réfutation des philosophes qui, comme Protagoras, nient le principe de contradiction a donc permis la mise en évidence du substrat requis par l'idée de vérité.

Celle-ci suppose qu'il existe des êtres possédant une nature définie ; et c'est cette stabilité ontologique qui fonde en définitive le principe de contradiction dans la sphère de la pensée.

C'est donc l'être qui est mesure et condition du vrai, et non l'opinion singulière.

« Ce n'est pas parce que nous pensons d'une manière vraie que tu es blanc que tu es blanc, mais c'est parce que tu es blanc qu'en disant que tu l'es nous disons la vérité » (Aristote). Puisque, s'il est vrai que tout est vrai, le contraire de cette affirmation ne saurait être faux, le relativisme trouve sa vérité dans le scepticisme.

Dire que tout est vrai, c'est dire tout aussi bien que tout est incertain et que rien ne peut être dit vrai. Il apparaît que le scepticisme comme le relativisme est une position intenable.

Dès qu'il se dit il se contredit. Le doute de la raison à la recherche de la foi Entre le doute et la vérité. »

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