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Le développement des techniques est-il synonyme de progrès?

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« L'idée d'un progrès cumulatif, celle d'une loi de perfectionnement ainsi que la théorie des âges du monde ont été appliquées, à partir de la Renaissance, non plus à la croissance de l'Église mais à l'avancement des sciences. Lorsque s'ouvre le siècle des Lumières, l'idée de progrès demeure néanmoins chargée d'ambiguïtés.

Le progrès est-il également d'ordre matériel et moral ? Est-il unilinéaire et continu ou présente-t-il des directions multiples et des discontinuités ? Aussi la racine du problème se trouve dans le fait de se demander si l'humanité ne serait pas vouée à progresser d'une manière ou d'une autre sans que les inventions techniques de la modernité y soient pour quelque chose.

Mais cela serait éluder les problèmes quasi inhérent de la civilisation technicienne dont la nature est radicalement différente de ce qu'a connu l'humanité jusqu'à présent. 1) le développement technique est synonyme de progrès. Condorcet dans Esquisse d'un tableau historique des progrès de l'esprit humain en 1795 décrit l'histoire humaine en 10 étapes.

Les trois premières époques retracent les débuts conjecturaux des sociétés humaines, simples familles ou peuplades isolées qui, passant de la pratique de la chasse et de la pêche à une économie pastorale puis à la sédentarisation agricole, s'acheminent lentement, à travers le développement des arts et des langues et les formes successives d'organisation sociale et morale, vers un état de civilisation toujours plus complexe.

Mais c'est surtout, explique Condorcet dans la huitième époque, à l'imprimerie qu'il faut attribuer, pour avoir « répandu une lumière indépendante et pure », le recul décisif des superstitions et des préjugés désormais soumis à l'examen critique de la raison qui génère toutes les sciences, – mathématiques, astronomiques et naturelles aussi bien qu'économiques, juridiques et morales.

Sur l'héritage que laissent Bacon, Galilée et Descartes, s'ouvre l'avant-dernière période dédiée à la recherche de la nature de la vérité et des droits naturels de l'individu, et qui est marquée par l'influence des Lumières dont la Révolution française couronna en politique les idées de liberté de penser, de tolérance, de justice et de perfectibilité indéfinie.

Le progrès de l'humanité n'est garanti que par l'inépuisable travail des scientifiques, la connaissance mathématique et des sciences de la nature ne connaîtront pas d'achèvement.

Le progrès n'est de l'ordre de l'accumulation, c'est véritablement l'esprit humain qui progresse.

Du progrès technique découlera le progrès moral.

Au centre du progrès humain se trouve une technique : l'imprimerie dont presque tout a découlé.

Par là, le développement technique a apporté du progrès à l'homme.

Le progrès technique a engendré un progrès moral, ici par exemple avec la diffusion des connaissances. 2) le développement des techniques peut apporter une régression. Selon Hans Jonas dans le Principe La technique a transformé en profondeur l'essence de l'agir humain.

La technique a considérablement augmentée la portée de l'agir humain.

La portée causale déborde tout ce que l'on a connu autrefois.

La promesse technique s'est transformée en menace, ce que l'homme pourra faire à l'avenir n'a pas d'équivalence par le passé.

Elle a fait apparaître de nouveaux devoirs.

L'éthique antique est inopérante à l'heure de la technique.

Aujourd'hui, les conséquences de certains actes ne seront visibles que dans quelques centaines d'années.

L'exemple de la pollution, de la surexploitation des ressources forestières, des pêches abusives, de la disparition des déchets nucléaires) .Aussi tous nos pronostics à long terme sont incertains.

Le principe responsabilité voudra donc que l'on favorise les hypothèses pessimistes au profit des hypothèses optimistes.

Le mal est toujours certain.

Le principe responsabilité dit « Agis de telle façon que les effets de ton action soient compatible avec la permanence d'une vie authentiquement humaine sur terre.

» Il s'agit d'un droit à l'existence d'une vie pas encore actuelle.

Ce principe est programmatique, il vise quelque chose qui ne s'est pas encore produit.

L'homme s'est vu remettre une essence, il en est responsable.

Il faut donc une prescience, une anticipation.

Il faut une métaphysique que n'a pas encore la science.

Le principe responsabilité pressent l'impossible, il veut le limiter.

Il doit aller au devant des abus.

Tous les possibles demeurent une fois que l'action s'est produite.

Il faut que les conséquences des actions soient voulues.

Il faut pour cela que des principes soient voulus pour que les conséquences soient voulues. Il faut donner à l'agir humain une dimension de volonté et qu'elle soit au principe de ses réalisations.

Car la réalité humaine correspond à quelque chose de non- voulu.

L'agir a pris des dimensions cosmologique.

La menace des civilisations technologiques repose sur l'idée que la technologie domine aussi l'homme comme elle domine la nature. C'est l'étant dans sa totalité qui est menacé.

Peut-on dans ce cas parler de progrès ? Est-ce un progrès de se retrouver avec une nature dégradée voire inhabitable ? Il s'agit bien plutôt d'une régression morale et humaine. 3) une idée de progrès à tempérer. Lorsque en 1906 paraissent, dans Le Mouvement socialiste, les études de Georges Sorel sur Les Illusions du progrès, les doutes se sont déjà multipliés concernant l'identification de l'accroissement des connaissances positives au progrès moral, du développement des sciences au progrès social.

Une contre- idéologie se met en place, fondée sur l'idée que la théorie du progrès est une doctrine bourgeoise qui a tenu lieu de philosophie de l'histoire et de justification ultime à une classe en montée de puissance ; elle a été pour la démocratie moderne, qui a « vulgarisé la vulgarisation du XVIIIe siècle », un instrument d'émulation et d'intégration.

Aussi, récusant la distinction entre histoire progressive, acquisitive, cumulative et histoire stationnaire, Lévi-Strauss a démontré que le progrès n'est ni nécessaire ni continu.

Il procède par bonds, par sauts, par mutations qui s'accompagnent de changements d'orientation.

Il est fonction d'une « coalition entre les cultures », d'une « mise en commun des chances » que chaque culture rencontre dans son développement historique.

Qualifiées par la diversité culturelle, les sociétés ne convergent donc pas vers un même but.

Au reste, les fins que la civilisation occidentale poursuit sont fixées avec la révolution néolithique.

Il convient donc de tempérer le triomphalisme dont s'est accompagnée la révolution. »

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