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L'apparence est-elle toujours trompeuse ?

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« [Introduction] Le sens commun oppose l'intérieur et l'extérieur, l'être et l'apparaître.

L'apparence est ici ce qui cache l'être véritable : l'apparence est trompeuse.

On ne peut s'y fier, dit-on.

Nous savons par exemple que le visage d'un homme peut être un masque qui dissimule pensées et sentiments.

Cependant, si je puis affirmer que l'apparence est trompeuse, c'est que je ne suis pas complètement trompé : un homme complètement trompé ne s'en rend même pas compte.

Ne faut-il donc pas que je connaisse l'être véritable pour juger que l'apparence n'y correspond pas? Mais l'être lui-même n'est connu que pour autant qu'il se montre à moi, qu'il m'apparaît.

L'apparence est ici ce qui révèle l'être.

Ainsi nous ne connaissons les pensées et les sentiments d'un homme que par ses expressions dévisage, ses paroles, bref, par ce qui apparaît de lui.

Quel étrange paradoxe donc que celui de l'apparence qui tout à la fois cache et manifeste, trompe et instruit ! Ainsi, en nous interrogeant sur les conditions qui rendent possibles l'affirmation « l'apparence est trompeuse », nous découvrirons que celle-ci ne peut tromper que pour autant qu'elle révèle.

C'est dès lors cette nature paradoxale de l'apparence qu'il faudra penser. [I.

Analyse des conditions qui rendent possible le jugement : « l'apparence est trompeuse ».] [1.

Toute apparence est-elle comme telle trompeuse?] Le sens commun affirme — pensons à certains proverbes — que les apparences sont trompeuses.

Cela concerne aussi bien le jugement sur les personnes, le témoignage des sens ou encore le raisonnement.

Et pourtant, en même temps, le sens commun témoigne d'une foi inébranlable en la réalité : qu'il y ait là une table, une chaise, voilà qui n'est pas douteux car cela m'apparaît.

Cette attitude contradictoire est le signe d'un jugement irréfléchi.

Réfléchir, c'est retourner vers le principe.

Or, si le sens commun s'interrogeait sur la légitimité de déclarer certaines apparences trompeuses il devrait ou bien présenter un principe qui autorise cette répartition des apparences en deux groupes : les fiables et les trompeuses, ou bien concéder qu'en l'absence d'un tel principe, toutes se valent, toutes sont également douteuses.

Il ne faut plus dire : il y a des apparences trompeuses, mais c'est l'apparaître comme tel qui est soupçonné de tromper.

Il ne faut pas dire : « souvent on est trompé », mais « ne l'est-on pas toujours? » C'est pourquoi la solution de repli du sens commun : « il y a des apparences fausses et d'autres vraies » est sans valeur car elle passe à côté de la question essentielle : est-ce en tant qu'apparence que l'apparence est trompeuse? Recenser des cas est insuffisant: il faut s'interroger sur l'essence.

C'est ainsi que Descartes, dans la première des Méditations métaphysiques, en l'absence d'un principe certain sur lequel fonder le jugement, doit suspendre toute foi en l'apparence (aussi bien sensible qu'intellectuelle). [2.

Il doit exister un principe qui permet de juger de l'apparence.] Ainsi éveillés au soupçon que l'apparence est peut-être toujours trompeuse, on est conduit à rechercher un principe qui sauverait l'apparence en rendant compte des cas où elle trompe.

Or quand nous déclarons une apparence trompeuse, soit il n'y a là que des mots, soit nous avons quelque idée de ce qui est vrai : seul l'être qui est sorti de la tromperie peut la démasquer.

Avant donc de s'interroger sur la vérité du jugement « l'apparence est trompeuse », il faut s'interroger sur sa possibilité : quel type d'indépendance à l'égard de la tromperie est présupposé par un tel jugement ? Si c'est seulement le temps qui nous a tiré du charme de l'apparence, rien ne nous garantit que demain notre jugement ne va pas encore changer.

Ainsi lorsque sous l'emprise de la. »

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