L'amour permet-il de franchir la distance qui nous sépare d'autrui ?
Extrait du document
«
[L'amour inaugure entre les êtres humains un rapport nouveau.
D'étranger, l'autre devient familier.
La distance entre
lui et moi s'efface pour disparaître totalement dans le sentiment amoureux.]
Par l'amour, nous rencontrons l'autre
Dans la multitude des rapports sociaux que nous entretenons avec autrui, il arrive parfois que se détachent des communications
plus intimes, une complicité, des liens d'intimité, de l'amitié, de l'amour.
Enfin, la distance qui nous séparait de l'autre disparaît.
Nous éprouvons le sentiment d'une harmonie trouvée.
Amour et fusion (le mythe de l'Androgyne)
Dans Le Banquet, Platon présente le récit fabuleux suivant : à l'origine, l'humanité comprenait un seul
genre de créature, ce que nous pourrions appeler l'androgyne, mixte de mâle et de femelle.
Ces êtres
étaient ronds de forme, disposaient de quatre jambes, quatre bras, de flancs circulaires, de deux
visages opposés l'un à l'autre sur une même tête ronde, et jouissaient dune force extraordinaire ; leur
orgueil immense les poussaient à provoquer les dieux auxquels ils en étaient venus à se comparer.
Zeus décida de mettre un terme à leur indiscipline en les affaiblissant.
Pour ce faire, il les coupa en
deux dans le sens de la longueur et chargea Apollon de ramener leur peau sur le ventre (le point de
suture qui subsiste est le nombril), ainsi que de tourner leurs visages.
Il s'ensuivit que ces êtres
séparés mouraient de chagrin et de malheur, se laissant dépérir auprès de leur moitié distincte.
Pour
remédier à ce désastre, Zeus ramena leurs parties génitales qu'ils avaient derrière sur le devant, et
ceux-ci purent s'accoupler, soit pour créer un nouvel être unique, soit pour s'accorder un plaisir qui leur
offrait pour un moment le bonheur de leur union passée, et l'esprit libre, leur permettait ensuite de
vaquer à leurs affaires.
Le fond de la nature humaine porterait désormais la trace de cette union ou plénitude originaire, dont le
désir d'amour serait la nostalgie.
Désirant l'autre, nous visons ce paradis mythique de la fusion, lorsqu'il
n'existait ni séparation ni différence, mais seule une toute-puissance qui nous plaçait à l'égal des dieux.
Suivant ce mythe
platonicien, l'essence du désir serait un manque d'être, la recherche d'une totalité, à laquelle il nous est impossible d'accéder,
suite à une opération des dieux, sinon par l'expérience fugitive d'une union sexuelle.
Ainsi, l'amour restaure notre unité primitive.
Seul l'amour nous ouvre véritablement à l'altérité
Grâce à l'amour, nous sortons enfin de notre narcissisme.
L'autre n'est plus simplement un obstacle ou un moyen sur le chemin
de notre existence.
Il n'est plus un étranger, mais quelqu'un que nous acceptons absolument dans tout son être.
L'intimité devient
possible, supprimant ainsi la distance habituelle et sociale entre les être.
Aimer un être, c'est une manière de s'éclater vers lui et de le saisir dans sa réalité.
L'amour est conscience des charmes de la
personne aimée.
Fusion et effusion des conscience.
Exaltation des sens et des corps.
[Le rêve d'une fusion affective ne peut se réaliser.
L'amour nous fait découvrir la véritable différence de l'autre.
La distance n'est jamais comblée, même dans l'intimité,
la plus grande.]
L'amour nous révèle la véritable différence
L'amour, loin de supprimer la distance avec l'autre, nous révèle la différence même de l'autre.
L'alter ego, à la fois même mais
irrémédiablement autre que moi.
Avant d'aimer quelqu'un, on perçoit ses qualités, ses défauts, on le définit.
Lorsque nous
l'aimons, il existe pour lui-même et il reste une énigme.
La souffrance de l'amour traduit l'altérité
La souffrance de l'amour traduit cette approche jamais totalement accomplie de l'autre.
Même présent, même dans l'intimité et la
tendresse, «l'Autre reste toujours prochain», c'est-à-dire qu'il conserve son mystère.
La symbiose parfaite entre les êtres est une
illusion.
L'amour-fusion est un leurre.
L'autre n'est pas un simple objet, il est sujet donc liberté..
»
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