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l'acte de créer permet-il de résister contre la violence?

Publié le 21/09/2025

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« « La résistance est le pêché de l’intelligence » disait Soren Kierkegaard.

L’ironie du philosophe souligne la force qu’est l’esprit dans l’acte de résister. Le discernement, la connaissance, l’entendement sont autant de soutien à la résistance comme rempart à la violence sous toutes ces formes, qu’elle soit morale, psychologique ou physique. Dans quelle mesure l'acte de créer permet-il de résister à la violence ? Au sens fort, créer, c’est faire, réaliser quelque chose qui n’existe pas encore. Comment l’acte de créer, en tant que déploiement de soi autant qu’expression de sensibilité, d’émotions, de pensées porteuses de principes et favorisant l’esprit critique, participe-t-il à bousculer l’oppression et les violences faites aux individus et s’avère-t-il être un outil puissant pour résister et gagner en liberté ? Dans un premier temps, nous verrons que l’acte de créer est un acte de résistance en soi.

Puis, nous évoquerons la création, proposition d’une pensée, incarnée de multiples manières, pour lutter contre toute forme de violence et d’oppression et donc outil pour étendre sa liberté. I/ L’acte de créer, comme expression et déploiement d’une subjectivité, acte de résistance en soi.

« Créer, c’est résister, résister, c’est créer.

» Stéphane Hessel A/ Subjectivité et acte de création. L’acte de créer s’étend à tous les domaines que la sensibilité et l’intelligence humaine ont investis : Des sciences humaines aux sciences expérimentales, en passant par l’art sous toutes ses formes, littérature, poésie, peinture, sculpture, photographie, etc.

Toute réalisation de l’homme est l’œuvre d’une subjectivité, c’est-à-dire ce qui est propre à un sujet déterminé, qui ne vaut que pour lui seul. La subjectivité est incarnée par :  Une identité  Une sensibilité  Une faculté de penser  Une mémoire, une histoire Hannah Arendt, dans la condition de l’Homme moderne, souligne que l'acte de création est un moyen pour l'homme de s'affirmer en tant qu'individu unique et de s'opposer à toutes formes d'oppression. La subjectivité nourrit alors la création qui célèbre et restaure l’individu violenté. B/La violence faite au sujet. Dans la sphère sociale et politique, la violence est une attaque, voir une négation de la subjectivité.

De la réduction au silence, à l’emprisonnement, en passant par la censure, tout ce qui cherche à faire peur, dominer ou nuire, vient violenter directement le cœur de la subjectivité. Les travaux de la philosophe Hannah Arendt sur le totalitarisme éclairent le rapport de ce régime politique à la subjectivité qui est absolument annulée et niée. Si une résistance est possible, c’est dans le rapport à soi-même parce que la simple existence de soi engendre une multiplicité de plis et de replis, extérieurs à l’espace public. 1 Exemple : Winston, le héros du personnage de 1984 de Georges Orwell, lutte pour préserver dans l’anonymat une différence, un chez soi, (…), par la pensée, dans le désir, dans le souvenir. C/ Créer, c’est s’emparer de son l’existence, se positionner dans le monde et s’affranchir de sa condition. La création, sublimation de la violence et espace de liberté Ce rapport à soi-même, parce que la simple existence de soi permet un repli à soi, extérieur à l’espace public, est, dans une certaine mesure, une mise à l’abri de la violence. Exemple : Nâzim Hikmet a écrit une grande partie de son œuvre poétique emprisonné par le gouvernement turc.

Comme l’indique les vers qui suivent, par la puissance de l’imagination, la subjectivité du poète est refuge, évasion et espace de liberté, en prison. Dans la poésie, l’emprisonnement est sublimé, en tant que transformation du drame au profit de l’œuvre d’art. « Je suis dans la clarté qui s'avance Mes mains sont toutes pleines de désir Le monde est beau Mes yeux ne se lassent pas de regarder les arbres Les arbres si verts, les arbres si pleins d'espoir Un sentier s'en va à travers les mûriers Je suis à la fenêtre de l'infirmerie Je ne sens pas l'odeur des médicaments Les oeillets ont dû s'ouvrir quelque part Être captif, là n'est pas la question Il s'agit de ne pas se rendre Voilà.

» La création comme processus d’émancipation. Créer, c’est, au sens littéral, produire quelque chose qui n’existe pas.

La création devient finalement réalisation d’un autre soi, déploiement à l’infini du sujet. En ce sens, la création s’apparente à un rempart contre l’immobilisme et est à l’origine du nouveau. Cela peut impliquer un affranchissement du monde tel qu’il est parfois figé et l’émancipation par rapport aux déterminismes potentiellement enfermant (sociaux, économiques, culturels) afin de pouvoir s’inventer ou se réinventer. Par exemple, Edouard Louis, dans En finir avec Eddy bellegueule, décrit l’émancipation de sa condition initiale.

En écrivant, il partage sa transformation autant que l’écriture participe, en elle-même à sa transformation. 2 Il s’émancipe en écrivant et partage un roman personnel et politique qui met en lumière la trajectoire d’un transfuge de classe.

Le roman témoigne de la conquête d’une forme de libération. II/ Créer, en tant que proposer une pensée au monde et aux autres pour résister à la violence. A/ L’acte de création, expression de sa spécificité comme moyen de transformation sociale. L'art peut susciter des émotions et des réflexions qui remettent en question l'ordre établi.

La création, comme expression d’injustices faites à un humain ou groupe d’humains vulnérabilisés a alors vocation à susciter les émotions, l’indignation nécessaires à l’empathie et à la solidarité, autant qu’à éveiller.... »

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