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La politique est-elle l'affaire de tous ?

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« La politique ne saurait être une activité professionnelle...

Profession politique? Par définition la question ne mérite pas d'être posée aux élus qui exercent tous un « métier » avant et après leur mandat (même si la vie politique française laisse croire depuis une vingtaine d'années qu'il existe, grâce à l'intervention des partis et à la diversité des modes de scrutin — la « proportionnelle » permet ainsi de « placer » les battus du scrutin majoritaire — des élus professionnels !).

Elle renvoie plutôt à la permanence de techniciens de la gestion des affaires publiques à la tête des administrations. On argumentera, avec justesse, que la complexité de la gestion publique est telle qu'elle réclame la formation de « spécialistes », des savants de l'Administration, des technocrates.

De fait, un Etat moderne semble développer de façon inévitable une véritable technocratie. On pourra faire référence à Platon : « Tant que les philosophes ne seront pas rois dans les cités, ou que ceux qu'on appelle aujourd'hui rois et souverains ne seront pas vraiment et sérieusement philosophes [...] il n'y aura de cesse aux maux des cités, ni, ce me semble, à ceux du genre humain.

» Ainsi que le rappelle Léo Strauss en tête de son ouvrage « La cité et l'homme », la tradition tient Socrate pour le fondateur véritable de la philosophie politique.

Cicéron aurait dit de lui qu'il « fut le premier à faire descendre la philosophie du ciel pour l'établir dans les cités, pour l'introduire également dans les foyers, et pour l'obliger à faire des recherches sur la vie et les manières des hommes aussi bien que sur le bien et le mal ».

en ce sens, il n'est pas d'histoire de la pensée politique qui ne doive commencer avec ce livre majeur que constitue la « République ». Rédigé par Platon, ce livre expose la conception de la justice de Socrate.

Tout y est présenté sous la forme habituelle mais hautement complexe du dialogue.

Répondant aux questions de ses interlocuteurs, Socrate développe une image de la cité idéale.

Socrate n'est-il que le porte-parole de Platon, un simple personnage dont le philosophe se sert pour exprimer ses propres idées tout en restant masqué ? A l'inverse, Platon n'est-il rien d'autre que le fidèle secrétaire du maître dont il se contente de noter scrupuleusement la pensée ? Et dans ce jeu mobile et contradictoire où s'enchaînent et s'entraînent questions et réponses sans que l'ironie soit jamais totalement absente, est-il seulement légitime de dégager une doctrine ? Derrière la fausse simplicité d'une conversation entre philosophes, l'art du dialogue soulève d'insurmontables difficultés qu'il nous faudra ici ignorer pour tenter de cerner l'image du politique qui se dégage de la « République ». Dans cet ouvrage, Socrate présente donc l'idée qu'il se fait de la cité idéale.

Il décrit une société fortement hiérarchisée au sein de laquelle les « gardiens » forment une classe dans laquelle règne une communauté parfaite. Au livre V, Glaucon, qui est l‘un de ses principaux interlocuteurs, demande à Socrate si une cité aussi parfaite que celle qu'il a décrite peut exister dans la réalité.

Avec beaucoup de prudence, car il sait ce que sa réponse peut avoir de ridicule et de scandaleux, Socrate répond qu'une seule réforme est nécessaire à qui veut changer radicalement la société: il suffit que se conjuguent le pouvoir politique et la philosophie.

Socrate déclare : « Tant que les philosophes ne seront pas rois dans les cités, ou que ceux qu'on appelle aujourd'hui rois et souverains ne seront pas vraiment et sérieusement philosophes ; tant que la puissance politique et la philosophie ne se rencontreront pas dans le même sujet ; tant que les nombreuses natures qui poursuivent actuellement l'un ou l'autre de ces buts de façon exclusive ne seront pas mises dans l'impossibilité d'agir ainsi, il n'y aura de cesse, mon cher Glaucon, aux maux des cités, ni, ce me semble, à ceux du genre humain, et jamais la cité que nous avons décrite tantôt ne sera réalisée, autant qu'elle peut l'être, et ne verra la lumière du jour. Voilà ce que j'hésitais depuis longtemps à dire, prévoyant combien ces paroles heurteraient l'opinion commune.

Il est en effet difficile de concevoir qu'il n'y ait pas de bonheur possible autrement, pour l'Etat et pour les particuliers.

» Socrate va s'attacher à justifier une proposition qui, aux yeux de ses interlocuteurs, ne peut être reçue que comme un insoutenable paradoxe. Pour ce faire, il entreprend de construire une définition de la philosophie.

En ce sens, la « République » est autant un traité de la philosophie qu'un traité de la politique.

Par là même se marque combien, aux yeux de Platon, sont indissociables ces deux dimensions : celle du savoir et celle du pouvoir. Encore faut-il s'entendre sur ce que sont les « vrais philosophes ».

Socrate les présente comme « ceux qui aiment le spectacle de la vérité ».

Mettant en place l'opposition, fondamentale dans la doctrine Platonicienne, entre la science et l'opinion, il oppose les vrais philosophes à ceux qui, amoureux des apparences, sont incapables de s'élever jusqu'à la vision du Beau et du Juste, et qui ne méritent pas le nom de « philosophe » - «qui aime la sagesse » - mais celui de « philodoxe » - « qui aime l'opinion ». C'est aux philosophes et non aux philodoxes que doit revenir le gouvernement de la cité.

Au début du livre VI, Socrate trace des premiers un portrait particulièrement élogieux : le philosophe est « par nature, doué de mémoire, de facilité à apprendre, de grandeur d'âme et de bonne grâce » ; il est « parent de la vérité, de la justice, du courage et de la tempérance ».

Comment dans ces conditions, lui refuser le gouvernement de la cité ? Rendant hommage à l'habileté de la démonstration de Socrate, un autre des interlocuteurs (Adimante) s'insurge contre les conclusions auxquelles il aboutit.

Il objecte : « On voit bien que ceux qui s'appliquent à la philosophie, et qui, après l'avoir étudiée dans la jeunesse pour leur instruction, ne l'abandonnent pas mais y restent attachés, deviennent pour la plupart des personnages tout à fait bizarres, pour ne pas dire tout à fait pervers, tandis que ceux qui semblent les meilleurs, gâtés néanmoins par cette étude que tu vantes, sont inutiles aux cités.

» Socrate n'en disconvient pas.

Il souligne cependant que l'inutilité de la philosophie n'est pas le fait des philosophes, mais des citoyens qui se refusent à chercher conseil auprès d'eux.

Socrate s'explique au moyen d'une image.

Il compare la société à un navire dans lequel les marins, ignorants es lois de la navigation, se disputent le gouvernail et méconnaissent le seul vrai pilote qui pourrait les guider, préférant le tenir pour un « bayeur aux étoiles », « un vain discoureur » et « un propre à rien ». En ce qui concerne la perversité des philosophes, Socrate s'attache à en expliquer les causes.

Il décrit les. »

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