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La pitié est-elle un mauvais sentiment ?

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« La pitié est un sentiment d'affliction que l'on éprouve pour les maux et les souffrances d'autrui.

Sentiment d'affliction d'autant plus lourd que nous héritons des valeurs chrétiennes.

Le sentiment est de l'ordre du ressenti.

Il n'est pas sur le même plan que la raison.

Un sentiment s'éprouve tandis que la raison commande, légifère.

Il est difficile de concevoir la pitié hors du cadre religieux.

La pitié est un sentiment que l'on éprouve à l'égard d'autrui.

En radicalisant, la pitié pourrait provoquer l'oubli de soi dans le rapport à autrui.

Telle fut l'attitude de certains saints ou mystiques.

Mais la pitié n'est-elle qu'un sentiment d'affliction ? Se caractérise-t-elle uniquement par la souffrance d'autrui et la douleur de ne pouvoir remédier à sa peine ? Problème : La pitié est-elle un sentiment mauvais en tant qu'il se retourne contre nous dès lors que l'on agit telle que nous l'ordonne les sens et non la raison ? Ou, au contraire, est-il possible de déceler dans la pitié un principe actif ? 1 - La pitié nous ramène au religieux et à la haine de soi « La pitié est en opposition avec les affections toniques qui élèvent l'énergie du sens vital : elle agit d'une façon dépressive.

On perd de la force quand on compatit.

(…) La pitié conserve ce qui est mûr pour son déclin, elle se défend pour les biens des déshérités et des condamnés de la vie.

Par le nombre et la variété des choses manquées qu'elle retient dans la vie, elle donne à la vie elle-même un aspect sombre et douteux », écrit Friedrich Nietzsche. Selon Nietzsche, la pitié est en contradiction avec la vie.

En proclamant la mort de Dieu, Nietzsche se donne pour mission de retrouver toutes les manifestions implicites, cachées, qui subsistent de Dieu et du religieux en général dans les valeurs qui constituent notre monde présent.

C'est pourquoi Nietzsche applique la méthode qui consiste à remonter aux principes mêmes des valeurs : la généalogie.

Quand il applique cette méthode à la pitié, Nietzsche y décèle des résidus du religieux.

Il faut se rappeler que l'essence de la vie et l'essence la plus intime de l'être est Volonté de puissance. L'expression Volonté de puissance ne doit pas nous induire en erreur : elle englobe une pluralité d'instincts en lutte incessante pour la prépondérance car Nietzsche conçoit le monde comme un ensemble de forces en lutte permanente.

La Volonté de puissance englobe l'ensemble des forces du monde.

C'est pourquoi il ne peut que rejeter la pitié.

La pitié est un héritage du christianisme sombre et douteux qui va à l'encontre de la vie et veut étouffer la Volonté de puissance.

L'homme doit se défaire de tout ce qui nous ramène au christianisme car il n'est que mépris.

De plus, la pitié nous projette toujours dans autrui, dans sa souffrance.

Ce qui a pour effet de nous aliéner.

La pitié est un mauvais sentiment car elle nous aliène à autrui et par conséquent nous conduit à nous mépriser nous-même.

Il faut donc bannir la pitié. 2 - La pitié est un sentiment originaire À l'opposé de Nietzsche, l'investigation de philosophique Jean-Jacques Rousseau va déboucher sur la pitié.

Le monde que décrit Rousseau est celui de l'état de guerre de tous contre tous où règne la loi du plus fort.

Un sentiment est à l'origine de cette dégradation de la société : l'amour propre.

Rousseau ne peut accepter la nature profondément de l'homme, il va alors la méthode généalogique pour remonter au principe originaire de l'homme. L'homme à l'état de nature est amoral : il n'est ni bon ni méchant.

Il est un être sensible.

Nulle raison de conflit : l'homme y vit isolé, le désir de possession n'existe pas, à la différence des temps présents où l'homme vit en société avec le désir de propriété.

Dans l'état de nature, un principe originaire le gouverne : la pitié.

La pitié obéit à sa sensibilité et c'est par sa sensibilité pour des êtres sensibles qu'il éprouve de la pitié.

La pitié est donc le principe premier de l'homme. La sensibilité est liée à la souffrance.

La pitié ne suppose rien d'autre que la sensibilité physique et la sensation que j'identifie.

C'est pourquoi la souffrance est un sentiment naturel.

La pitié précède la réflexion.

Dans l'état de nature, la pitié « tient lieu de lois, de mœurs, et de vertu avec cet avantage que nul n'est tenté de désobéir à sa douce voix », écrit Rousseau.

La pitié n'est pas un sentiment moral, contrairement à la thèse nietzschéenne, car toute morale suppose un jugement.

La pitié ne réfléchit pas, elle s'éprouve et agit dans l'immédiateté. 3 – La morale de la pitié La voix de la pitié ressemble à celle de la conscience morale.

Dans l'état de nature et au-delà de l'état de nature, la pitié fonde un rapport de justice à autrui.

Rousseau énonce une maxime de la pitié : Fais ton bien avec le moindre mal d'autrui qu'il est possible.

Une telle maxime formule la répugnance de l'homme de la nature, profondément sensible, à faire du mal à autrui. La pitié rousseauiste est profondément altruiste en tant qu'elle est cette attention que l'on porte à autrui.

Elle institue un rapport de conduite quasi morale.

Non seulement la pitié n'est pas un mauvais sentiment, mais est la. »

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