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La philosophie a-t-elle une valeur pratique ?

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« Le thème de cet énoncé exige de tenter une circonscription du domaine d'application de l'activité philosophique. Chercher à définir le terrain sur lequel opère la philosophie doit permettre d'indiquer le lieu où s'exerce son pouvoir. Ainsi est-ce par la détermination de l'emprise de l'exercice de la philosophie que doit être interrogée la question de son effectivité, de son efficience pratique – en opposition à une conception de la philosophie comme spéculation de la raison retirée des faits et leur succédant, pensée intervenant une fois les actes accomplis (Hegel), ou s'ajoutant au contexte pratique matériel comme superflu de rationalité (Marx). Le problème de cet énoncé se construit à partir de la complexité de la notion de “ valeur pratique ”.

Par cette expression peut être signifié le caractère d'efficacité propre à toute pratique.

Dès lors, il s'agit de comprendre la fonction de l'exercice de la pensée comme pratique (la philosophie est avant tout un exercice de la pensée ou de l'esprit, c'est-à-dire une pratique, certes intellectuelle) afin d'en déterminer la valeur, ou encore, de déterminer la nature de la valeur pratique de la pensée.

Ainsi seulement peut s'éclairer le sens de l'efficacité de la pratique qu'est la pensée, autrement dit la possession de valeur pratique par la philosophie, ou son manque. I.

Pratique du sens Dès la période antique, la philosophie s'est définie comme enracinée en l'étonnement (Platon, Théétète).

Mais un étonnement dont l'impression doit se dissoudre par la compréhension progressive de ses causes ; un étonnement qui s'abolit une fois que raison est rendue des motifs de son surgissement : en conséquence, la philosophie commence avec l'étonnement mais s'accomplit par sa disparition (Aristote, Métaphysique).

Ainsi comprise, la philosophie est acte de donation de sens au réel par la pensée qui s'y projette pour le rendre, compréhensible. Alors, la philosophie comme activité de spéculation sur le réel (activité réfléchissant et pensant le réel) interroge les conditions de possibilité du sens pour en assurer la mise en œuvre.

Mais toujours elle précède le sens comme acte (puisqu'elle en exprime la possibilité), et donc semble se désengager du réel auquel elle se trouve confrontée.

La philosophie apparaît comme une pratique (exercice de la pensée) dénuée de toute valeur pratique, c'est-à-dire dépourvue de toute efficience car précédant l'acte pratique en s'en extrayant. Mais enfin doit être remarqué que la pensée comme caractéristique propre de l'activité philosophique dont la fin est la donation de sens est toujours déjà mise en œuvre du sens, autrement dit engagement du concept dans le monde auquel il s'applique.

Car le don de sens est déjà acte, acte précédant l'agir pratique et le rendant possible.

En tant que pratique de la pensée faisant être le sens, la philosophie est donc la condition de possibilité même de la pratique comme agir.

Outre qu'ayant une valeur pratique, la philosophie est la valeur de la pratique – car sans elle, la pratique serait sans sens.

Mais elle est aussi ce qui doit être dépassé pour agir (Wittgenstein, Tractatus). II.

Connaissance et pratique (de soi) Si la philosophie non seulement possède intrinsèquement une valeur pratique en tant que la pensée est son activité, mais encore est la condition pour la pratique d'avoir une valeur (de faire sens), penser le lieu de son enracinement doit permettre de déterminer la nature propre de sa valeur comme pratique transcendantale (sens kantien de condition de possibilité). La philosophie comme déploiement de la pensée donnant sens au monde auquel elle se trouve confrontée s'enracine en le sujet.

C'est à partir du sujet que se projette le sens sur le monde.

Ainsi, la donation de sens au monde par le sujet assure par répercussion la connaissance du sujet par lui-même.

Recherchant la vérité, la donation de sens procède implicitement de la connaissance de soi.

Il faut s'efforcer à la connaissance de soi (adage delphique) pour prétendre donner sens en aspirant à la vérité.

Et cette connaissance (théorique) de soi, en tant qu'elle a le sens pour finalité, agit rétrospectivement sur le sujet de la connaissance.

L'activité philosophique de la pensée est toujours aussi pratique de soi, car l'aspiration à la vérité dans la mise en œuvre (de la possibilité) du sens par la pensée transforme le sujet pratiquant la pensée (lecture du stoïcisme par Foucault).

Contrairement à la mise en jeu cartésienne de la notion de vérité ne faisant pas intervenir de processus de transformation du sujet par l'acte de penser, en la philosophie dimension théorique de la pensée et pratique du soi par la connaissance peuvent ne pas se séparer. En conséquence, la philosophie comme exercice spéculatif et théorique de la pensée est toujours déjà également pratique (de soi).

Et si cette pratique peut se prévaloir de quelque valeur, cela ne tient qu'au caractère intrinsèquement rationnel de toute pratique humaine en tant qu'axiologiquement organisée.

En plus qu'être la condition de la pratique comme agir rationnel de l'homme, la philosophie est la condition de la valeur de la pratique puisque par elle se peut extérioriser dans la pratique le sens procédant de la connaissance (de soi).

Pouvoir agir (rationnellement) et, partant, détenir quelque valeur pratique, suppose la connaissance (de soi), autrement dit la philosophie (Platon, Alcibiade) : telle est la valeur pratique de la philosophie. Conclusion - La philosophie comme exercice de la pensée est une pratique.

La valeur de la pratique qu'est la philosophie consiste en la possibilité même pour la pratique d'avoir une valeur.

Ainsi eput être compris que la vie humaine dans sa dimension pratique (ou pragmatique) exige la philosophie comme entreprise de donation de sens au monde, c'est-à-dire comme projet de connaissance de soi : “ une vie sans examen ne vaut pas la peine d'être vécue ” (Socrate).. »

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