La morale peut-elle être conciliable avec les opinions ?
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La morale peut-elle être conciliable avec les opinions ?
La morale doit être comprise comme l'ensemble des règles de conduite tenues pour inconditionnellement valables.
Elle indique à l'homme, aux hommes, quelles sont les bonnes et mauvaises manières de penser, d'agir.
La morale
n'est pas conçue ici comme telle ou telle morale particulière, mais comme morale en général- en son concept.
L'opinion doit par ailleurs être définie comme ce qui s'oppose au savoir : c'est un jugement, un avis émis sur un
sujet.
Elle n'est pas nécessairement rationnelle et raisonnable, et s'oppose en ce sens au savoir.
Les opinions sont
ainsi synonymes de croyances, de convictions.
La morale peut-elle être conciliable avec les opinions ? Poser cette question revient à présupposer que morale et
opinions sont opposées, voire exclusives les unes des autres.
La morale définit en effet ce qu'il faut faire, tandis que
les opinions sont des avis subjectifs.
Le caractère objectif et impératif de la morale est-il alors conciliable avec le
contenu subjectif des opinions ? En quel(s) sens peut-on rapprocher (extérieurement) morale et opinions ?
I- La morale serait conciliable avec les opinions parce que la conscience les rapproche.
1- Qu'est-ce que la conscience ? Quel est son rapport avec la morale ? Avec les opinions ?
Texte d'Alain
La conscience est le savoir revenant sur lui-même et prenant pour centre la personne humaine elle-même, qui se
met en demeure de décider et de se juger.
Ce mouvement intérieur est dans toute pensée ; car celui qui ne dit pas
finalement : « Que dois-je penser ? » ne peut être dit penser.
La conscience est toujours implicitement morale ; et
l'immoralité consiste toujours à ne point vouloir penser qu'on pense, et à ajourner le jugement intérieur.
On nomme
bien inconscients ceux qui ne se posent aucune question d'eux-mêmes à eux-mêmes.
Ce qui n'exclut pas les
opinions sur les opinions et tous les savoir-faire, auxquels il manque la réflexion, c'est-à-dire le recul en soi-même
qui permet de se connaître et de se juger ; et cela est proprement la conscience.
Rousseau disait bien que la
conscience ne se trompe jamais, pourvu qu'on l'interroge.
Exemple : ai-je été lâche en telle circonstance ? Je le
saurai si je veux y regarder.
Ai-je été juste en tel arrangement ? Je n'ai qu'à m'interroger ; mais j'aime mieux m'en
rapporter à d'autres.
2- Pourquoi la conscience concilie la morale et les opinions, ce qui est objectif et ce qui est subjectif ?
Texte de Hobbes
Une doctrine inconciliable avec la société civile, c'est que chaque fois qu'un
homme agit contre sa conscience, c'est une faute.
Cette doctrine repose sur
la présomption par laquelle on se fait soi-même juge du bien et du mal.
En
effet, la conscience d'un homme et son jugement, c'est tout un.
Et la
conscience, comme le jugement, peut être erronée.
En conséquence, encore
que celui qui n'est pas assujetti à la loi civile commette une faute chaque fois
qu'il agit contre sa conscience (puisqu'il n'a pas d'autre règle à suivre que sa
propre raison), il n'en va pas de même de celui qui vit dans une République,
car la loi est alors la conscience publique, par laquelle il a antérieurement
accepté d'être guidé.
S'il n'en est pas ainsi, étant donné la diversité des
consciences privées, qui ne sont rien d'autre que des opinions privées, la
République sera nécessairement divisée, et nul ne s'aventurera à obéir au
pouvoir souverain au-delà de ce qui aura trouvé grâce à ses propres yeux.
3- La morale pourrait bien être conciliable avec l'opinion : ce serait la
conscience qui rendrait cet accord possible.
Comment Rousseau la définitelle ?
Rousseau: "Conscience ! Conscience ! Juge infaillible du bien et du mal"
Cette formule de Rousseau, que l'on peut lire dans l'Emile, aborde la question de la conscience dans sa dimension
morale.
En effet, si comme nous l'avons montré dans l'analyse de la citation de Pascal, la conscience signifie au
sens premier « accompagné de savoir », elle prend également un sens moral, et les expressions que nous venons
d'évoquer montrent qu'elle apparaît comme ce sentiment qui pourrait nous permettre de distinguer le bien du mal.
Tel est le sens de la formule de Rousseau puisqu'il la qualifie de « juge infaillible ».
Ainsi, la conscience morale serait ce sentiment moral inné que tout homme possèderait.
Il suffit alors d'écouter « la
voix de sa conscience » pour savoir qu'on a mal agi, ou, pour bien juger, de juger « en son âme et conscience ».
Si
on peut alors définir l'homme par la conscience, c'est donc aussi en tant qu'être moral ou, en tout cas, en tant
qu'être pour qui la question morale se pose.
Pourtant, faire reposer la morale sur un sentiment n'est pas sans poser
problème.
En effet, n'est-il pas possible de faire le mal en toute bonne conscience ?
Comment dans ces conditions Rousseau peut-il soutenir l'infaillibilité de ce sentiment ? Parce qu'un sentiment anime.
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